À l’occasion de la sortie du tome 3 de leur série Les trois fantômes de Tesla, publié chez Le Lombard, j’ai eu le plaisir de recevoir Richard Marazano et Guilhem Bec. Un entretien qui s’était déroulé mercredi 13 juillet 2022, lors d’un live diffusé sur ma page Instagram @livressesdesbulles.
Comment vous est venue l’idée de cette série Les trois fantômes de Tesla ?
Guilhem Bec : On a mis un petit moment avant de trouver un sujet qui nous accrochait tous les deux. Mais quand on l’a eu, tout s’est passé vite. J’avais envie de faire des récits plus réalistes avec Richard. On avait fait des recherches de personnages, de design. Quand Le Lombard a vu ces premiers essais, ils nous ont dit qu’ils le voulaient. On les a sentis tellement emballés, qu’on n’a pas eu besoin d’aller démarcher ailleurs.
Richard Marazano : Le projet était en gestation et il est né au Lombard. L’univers était posé et la proposition a tout de suite été très intéressante.
Pourquoi avoir choisi cette thématique ?
Richard Marazano : Guilhem avait envie de faire quelque chose qui tourne autour des récits scientifiques de la fin du 19e siècle. Avec mes études de physique et d’astrophysique, j’avais quand-même cette culture-là… On est donc partis sur Tesla parce qu’il savait que j’avais une passion pour ce personnage depuis longtemps.
Guilhem Bec : Moi aussi, mais depuis moins longtemps que toi. Et qui de mieux que quelqu’un avec une culture scientifique pour traiter ce sujet ?
Les trois fantômes de Tesla tome 1 : Le mystère Chtokavien
Pourquoi avez-vous choisi ce format ?
Richard Marazano : Le plus difficile pour moi n’a pas été le foisonnement d’idées, mais le fait qu’on soit sur 45 planches. Ce récit était ambitieux.
Guilhem Bec : Richard avait plutôt prévu des récits sur 54 pages, mais on nous a demandé de les faire en 46 pages. Il a donc fallu être succincts et en un minimum de planches, un maximum d’informations devaient passer.
Comment s’est déroulé votre travail ?
Guilhem Bec : J’ai passé trois albums à me faire des sueurs froides.
Richard Marazano : À chaque fois, les retours étaient systématiquement les mêmes. La page était géniale et on repartait sur un nouveau cycle.
Quelle méthode de travail utilisez-vous ?
Guilhem Bec : Richard travaille au compte-gouttes. Je reçois une page et je ne reçois la suite que quand j’ai terminé la page. Il veut se laisser une marge de manœuvre pour ajuster ce qui va suivre en fonction de ce que je lui propose graphiquement.
Richard Marazano : Chaque page que je lui envoie, je la corrige en fonction de ce que j’ai reçu avant. Pour être au plus près du geste de mon dessinateur.
Connaissiez-vous New York avant de travailler sur Les trois fantômes de Tesla ?
Richard Marazano : Au début de la série, Guilhem voulait dessiner New York. Super mais je n’y suis jamais allé. Je ne connais pas les proportions réelles des bâtiments, des trottoirs, de la largeur des rues.
Guilhem Bec : Je savais qu’il y aurait des scènes sur le Brooklyn et le Manhattan Bridge, mais je n’avais aucune idée de ce qu’on voyait quand on était dessus. Maintenant, avec Google street view, on a des idées. Mais le mieux était quand-même d’aller sur place, afin de faire nos propres repérages…
Je n’aurais pas dessiné New York de la même manière, si je n’y étais pas allé réellement. Dans certains quartiers, la ville est dans son jus des années 1940 et souvent tout cela n’est pas réparé. On a cherché ceux qui n’avaient pas beaucoup bougé depuis cette époque.
Saviez-vous, dès le départ, où la série vous conduirait ?
Richard Marazano : J’avais le fil conducteur jusqu’à la fin de la série. D’ailleurs, les trois couvertures ont été réalisées pendant le premier tome, donc on savait vraiment où on allait. Le récit a évolué quand on est allés à New York. Il y a des éléments du récit qui n’existaient pas avant notre séjour.
On a emprunté des lieux comme l’Empire State Building. Il était évident que la fresque murale avec les éclairs devait être intégrée au récit comme quelque chose d’annonciateur des événements finaux de notre aventure.
Les trois fantômes de Tesla tome 2 : La conjuration des humains véritables
Comment se fait-il que ce soit Richard, le scénariste, qui ait également fait le travail des couleurs ?
Richard Marazano : Après plusieurs essais de couleurs chez Le Lombard, il manquait un élément narratif dedans. Le travail écrasait son dessin.
Guilhem Bec : Donc à ce moment-là, j’ai dit à Richard qu’il était le mieux placé pour trouver l’ambiance dans chaque image. Pour savoir ce qu’il fallait éclairer ou mettre dans l’ombre.
Richard Marazano : Après deux pages d’essais, ça a été une évidence pour tout le monde. Mais je n’avais pas vocation à faire les couleurs au départ.
Comment qualifieriez-vous cette série ?
Richard Marazano : On a essayé de sentir l’esprit du temps, dans un certain milieu.
Guilhem Bec : On va d’ailleurs faire une petite mise au point. Pour nous, ce n’est pas une uchronie. On voulait raconter des faits qui se seraient déroulés, qui auraient été étouffés et qu’on révèle au grand jour, à travers cette histoire.
Richard Marazano : C’est de la politique fiction. Comme une Histoire parallèle.
Qui était réellement Nikola Tesla ?
Richard Marazano : Nikola Tesla est un scientifique avec deux facettes. Il a fait un travail de recherche qui a eu une influence en sciences physiques. Mais c’est également un personnage qui ripe parfois sur des idées fantasmatiques.
Nikola Tesla (1856-1953) en 1890
Il a été placé au cœur de plein de complots aussi délirants les uns que les autres sur l’utilisation d’armes créées à partir de son travail. À côté de cela, le radar n’aurait pas été possible sans Tesla.
Quelle est sa place dans le monde scientifique ?
Richard Marazano : On sert encore aujourd’hui de brevets fondamentaux déposés par Tesla.
Guilhem Bec : Tesla a subi une guerre de réputation et il a été disqualifié dans les milieux scientifiques. Mais le lendemain de sa mort, le FBI a débarqué chez lui, a tout raflé et on n’a plus jamais revu ces documents. Encore un fantasme sur ce qu’ils ont pu faire de tout cela.
Il fallait vraiment faire un récit de rétro SF avec tous ces éléments-là.
Les trois fantômes de Tesla tome 3 : Les héritiers du rayon
Pourquoi ce tome 3 vous a-t-il pris plus de temps ?
Richard Marazano : La création d’une œuvre est guidée par son rythme propre à elle.
Guilhem Bec : Pour le tome 3, on a un peu été écrasés par la somme de travail. Je savais que ce tome allait me demander un travail colossal, mais pas à ce point-là. Ça a été une somme gigantesque de travail à abattre. Les lecteurs ne s’en rendent pas nécessairement compte. Et tant mieux, pour eux, il faut que ça coule de source. À nous de travailler pour lui faciliter les choses.
Richard Marazano : À la lecture, tout doit être évident, même quand il y a plusieurs arcs narratifs. Fluide, naturel et amusant.
Guilhem Bec : Je suis admiratif des auteurs qui arrivent à faire leur bouquin tous les ans. Moi il me faut plus de temps que ça.
Qu’avez-vous pensé de l’accueil du plus pour Les trois fantômes de Tesla ?
Guilhem Bec : Il y a tout de suite eu un enthousiasme pour cette série. Je l’ai bien senti en dédicace. C’était sans commune mesure avec ce que j’ai pu connaître auparavant. Il se passait quelque chose et on ne le maîtrise pas du tout.
Richard Marazano : La bande dessinée, c’est un public de niche. Le succès d’un livre, c’est quand il mobilise sa niche. Il atteint son public. Pour Les trois fantômes de Tesla, on a trouvé le public fait pour ce livre.
Merci Richard Marazano et Guilhem Bec d’avoir accepté mon invitation pour nous parler de cette très belle série Les trois fantômes de Tesla publiée chez Le Lombard.
CET ENTRETIEN ET SA RETRANSCRIPTION ONT ÉTÉ RÉALISÉS DANS LE CADRE DU LIVE QUI S’EST TENU MERCREDI 13 JUILLET 2022 SUR LA PAGE INSTAGRAM DE YOANN DEBIAIS @LIVRESSEDESBULLES .
SI VOUS VOULEZ EN SAVOIR PLUS SUR LA SÉRIE LES TROIS FANTÔMES DE TESLA, N’HÉSITEZ PAS À REGARDER ICI LE REPLAY DU LIVE
- Les trois fantômes de Tesla tome 3 : Les héritiers du rayon
- Scénariste et coloriste : Richard Marazano
- Dessinateur : Guilhem Bec
- Editeur : Le Lombard
- Prix : 14,50 €
- Parution : 10 juin 2022
- ISBN :9782803670543
Résumé de l’éditeur : Les forces japonaises déchaînent une pluie de robots sur New York, mais en réalité, c’est un autre combat qui se joue. Héritier des fantômes de Tesla et des grands scientifiques de son temps, Travis doit empêcher Edison et ses alliés nazis de faire basculer le monde dans un nouvel âge d’obscurantisme. Pour cela, il reçoit l’aide inattendue de son « pater ex machina ». Ensemble, père et fils parviendront-ils à écrire une conclusion heureuse à cette uchronie politico-scientifique ?
À propos de l'auteur de cet article
Claire & Yoann
Claire Karius @fillefan2bd & Yoann Debiais @livressedesbulles , instagrameurs passionnés par le travail des auteurs et autrices de bandes dessinées, ont associé leurs forces et leurs compétences, pour vous livrer des entretiens où bonne humeur et sérieux seront les maîtres-mots.
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