Akira Toriyama, créateur de Dragon Ball et Dr. Slump, est décédé le vendredi 1er mars 2024. Âgé de seulement 68 ans, il restera comme l’un des plus grands mangakas.
Ses séries ont ouvert tout un pan de la culture japonaise en France et dans le monde. Au-delà du manga, Akira Toriyama tient une place importante dans la culture populaire. Une perte immense pour la création et le 9e Art.
Une lettre comme un grand coup de massue
C’est par une simple lettre de Bird Studio et Capsule Corporation Tokyo, publiée sur le site officiel de Dragon Ball, qu’est annoncé le décès d’Akira Toriyama. L’effet est rapide sur les réseaux sociaux. La nouvelle est un grand coup de massue pour les nombreux admirateurs du maître mangaka.
Akira Toriyama est décédé le vendredi 1er mars à l’âge de 68 ans des suites d’un hématome sous-dural aigu.
“Nous vous informons de cette nouvelle avec une grande gratitude pour votre bienveillance pendant toute sa vie.”
Comme le souligne ce communiqué, Akira Toriyama fut un grand créateur durant plus de 45 années. Débutée en 1984, sa carrière professionnelle fut riche. Une carrière faite de séries populaires dans le monde entier. Une carrière portée au zénith par Dr. Slump mais surtout Dragon Ball.
Akira Toriyama ou le rêve fou de devenir mangaka
Né le 5 avril 1955 à Nagoya au Japon, Akira Toriyama arrête rapidement ses études après le lycée. Il se rêve en mangaka. Mais le chemin pour atteindre son but est parsemé d’échecs et de refus.
Ses parents se montrent très réticents à ce projet et son premier travail d’illustrateur dans une agence de publicité s’arrête rapidement, au bout de deux ans.
Dans un café, alors qu’il y traîne sa peine, Akira Toriyama découvre un concours de manga. Il s’y inscrit mais le résultat est négatif.
Akira Toriyama, Arale et Dr. Slump
Le futur mangaka ne désespère pas. Il continue de participer à des concours. Si rien n’est bon pour lui jusqu’à présent, il est repéré par Kazuhiko Torishima, directeur des éditions Hakusensha.
“Tu as un don, appelle-moi vite, signé Torishima.”
Pendant deux années, Akira Toriyama s’entraîne avec Torishima. Son travail est récompensé par une première publication. Malheureusement Wonder Island est un échec.
Mais c’était sans compter sur son mentor. Kazuhiko Torishima décèle le vrai talent de Toriyama dans les aventures de Dr. Slump. Il propose même au futur maître mangaka de mettre en avant Arale, la petite fille androïde de l’inventeur.
A 25 ans, c’est le début de la grande carrière de Toriyama. Dr. Slump est un vrai succès chez Weekly Shōnen Jump. Entre 1980 et 1984, les épisodes s’enchaînent. C’est une vraie folie. Les amateurs sont de plus en plus nombreux à suivre les aventures complètement folles de l’inventeur pervers et de son androïde surpuissante. Il y manie un humour dévastateur, loufoque et burlesque.
Mais ce n’était rien comparé à ce qui allait suivre. L’histoire d’un petit garçon du nom de Son Goku.
Akira Toriyama, Son Goku et la folie Dragon Ball
Alors qu’Akira Toriyama achève Dr. Slump, il commence un nouveau récit. Dragon Ball naît dans les pages de la même revue Weekly Shōnen Jump.
Inspiré d’un personnage de roman chinois du XVIe siècle, Sun Wukong, Dragon Ball relate les aventures de Sangoku de son enfance à l’âge adulte. L’histoire d’une quête pour retrouver les 7 boules de cristal, capables de faire apparaître le dragon Sheron. Mais inutile d’en dire plus, vous connaissez déjà ce récit.
Les chiffres sont délirants ! En onze ans, de 1984 à 1995, le mangaka publie 42 volumes soit 7 770 pages ! Les 519 chapitres de 15 pages chacun sont vendus entre 250 et 300 millions d’exemplaires dans le monde.
Le club Dorothée comme détonateur
Le mercredi 2 mars 1988, dans le Club Dorothée, débarque Dragon Ball. C’est un séisme pour les jeunes téléspectateurs devant leur écran de télévision. Ils assistent à l’arrivée du futur phénomène manga ! Un phénomène qui les bouleverse pour toute leur vie.
Avec Akira publié en 1990 en France, Dragon Ball est l’œuvre qui fait entrer le manga dans les familles françaises.
La série animée originale date de 1986. S’il faut attendre deux ans pour que AB Production la diffuse dans le Club Dorothée, il faudra attendre 1993 pour la publication de la version manga aux éditions Glénat.
La croisade de Ségolène Royal contre la violence dans les manga, renforce le succès de Dragon Ball. La ministre déléguée à l’Enseignement scolaire tape sur le Club Dorothée. L’effet est inverse de sa “mission”. Cela accentue la résistance et met un autre coup de projecteur sur Dragon Ball, Ken le survivant et autres Chevaliers du Zodiaque.
Dragon Ball, un manga au-delà des mangas
En réalisant Dragon Ball, Akira Toriyama ne s’imaginait pas ce succès planétaire. En effet, pour les générations des quinquagénaires et quadragénaires actuels, la série papier et sa version animée sont un coup de tonnerre.
Dragon Ball leur ouvre un monde nouveau. Des univers japonais riches et variés. Des mondes qui les bercent enfants et les accompagnent dans leur vie d’adolescents et d’adultes. Maintenant parents, ils transmettent également cette passion dévorante pour les mangas à leurs enfants.
Dragon Ball est un vecteur transgénérationnel poursuivi par Dragon Ball Z, Dragon Ball Super et autres longs métrages d’animation. Il est un roi du transmédia avec les séries et autres jeux vidéo.
Des artistes lui rendent hommage
De nombreuses autrices et de nombreux auteurs de bande dessinée s’en revendiquent. Des artistes japonais comme des français.
« L’idée de ne plus jamais te revoir me remplit de tristesse », écrit Eiichirō Oda, auteur de One Piece. « Je t’admire tellement depuis que je suis enfant. »
“Il a toujours été mon guide », a exprimé Masashi Kishimoto, l’auteur de Naruto. Poursuivant ainsi : « Merci, Akira Toriyama, pour tout ce que vous avez réalisé au cours des 45 dernières années », conclut-il. « Et merci beaucoup pour votre travail acharné. »
« Akira Toriyama est décédé. Je me souviens bien sûr de la première diffusion de Dragon Ball à la fin des année 80, mais aussi de la découverte de Dr Slump dans le fanzine Mangazone. Merci monsieur Toriyama pour toutes ces années de lecture et d’animé ! » [Denis Bajram, auteur français]
« Mon premier choc. RiP » [Guillaume Singelin, auteur français]
« J’apprends avec une immense tristesse le décès d’Akira Toriyama, un génie graphique qui m’a tellement inspiré. » [Run, auteur français]
« Je crois que M. Toriyama m’a appris ce que signifie être un professionnel et ce que signifie travailler. Je le respectais de tout mon cœur. Nous prions pour qu’il repose en paix. » [Hironobu Sakaguchi, créateur de Final Fantasy, Chrono Trigger, Blue Dragon]
« « Sans Toriyama-san, je ne serais pas devenu mangaka. Quelle tristesse… » [Hiro Mashima, auteur de Rave, Fairy Tale, Edens Zero)]
Akira Toriyama, récompensé à Angoulême et enfin reconnu en France
Si Akira Toriyama est récompensé dès 1981 par le Prix Shōgakukan pour Dr Slump, il faudra attendre de nombreuses années pour distinguer le mangaka en France.
Le Festival international de bande dessinée d’Angoulême lui décerne un prix spécial en 2013. Non pas un grand prix mais un prix spécial ! Jean-Claude Denis est président de l’édition et Willem, Grand Prix 2014. Les mondes asiatiques sont quasiment ignorés jusque-là.
Les auteurs belges et internationaux sont bien évidemment récompensés dès 1974 avec André Franquin. Will Eisner, l’année suivante. Les comics sont donc mis en lumière longtemps avant les artistes japonais.
Après cette première ouverture vers l’Asie, Katsihiro Otomo obtient la récompense suprême en 2015. Puis quatre ans plus tard, la première mangaka en la personne de Rumiko Takahashi.
Dragon Ball est une véritable icône de la culture pop. Il est au-delà des mangas. Il est dans l’imaginaire collectif mondial. Dragon Ball est et demeure dans la culture.
Akira Toriyama restera comme le premier auteur à avoir démocratisé et popularisé le manga dans le monde entier. Un apport important et une perte immense pour le 9e art.
À propos de l'auteur de cet article
Damien Canteau
Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.
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