Spirou chez les Soviets

Répandre le gène du communisme sur toute la Terre, tel est le crédo complètement fous des nouveaux dirigeants de l’URSS. Pour cela, ils enlèvent le comte de Champignac. Spirou et Fantasio partent alors pour lui porter secours. Fred Neidhart et Fabrice Tarrin imaginent leur périple semé d’embûches dans Spirou chez les Soviets, une nouvelle histoire très réussie du célèbre groom. Une jolie aventure dans les pas de Franquin ou Tome & Janry !

Champignac a disparu !

Alors qu’il met au point le métodur – en contrepoint du métomol – un processus chimique issu de champignons pour rendre rigide tous les métaux, le comte de Champignac disparait ! Dans la cour du château, deux agents patibulaires. L’un d’eux écrase même le pauvre Spip.

Le lendemain matin, Spirou cherche partout son écureuil tandis que de la fenêtre du premier étage, Fantasio remarque des traces de pas dans la neige. Ils entrent alors dans l’atelier du comte mais il n’y est pas. Spirou retrouve Spip complètement congelé. Après l’avoir réchauffé, le groom observe que son animal a un étrange comportement.

Spirou et Fantasio, journalistes pour Vaillant

Pour comprendre la soudaine disparition de Champignac, Fantasio se plonge dans la lecture d’un de ses carnets. Il découvre avec stupéfaction que le comte a été approché par des agents du KGB pour élaborer le GPS : un rayon qui aurait un impact sur le monde. Mais le savant a refusé tout net de collaborer avec eux. Et si la piste de la disparition se transformait en enlèvement ?

Pour en avoir le cœur net, Spirou et Fantasio décident de partir pour la Russie. Mais voilà pour y entrer et enquêter, il faut un bon motif. Ils se rendent alors dans le bureau de Charles Dupuis pour lui proposer un reportage en URSS. Il accepte avec réticence.

Les deux amis passent alors chez Boulier, le comptable, pour établir leurs frais de séjour puis chez M. R qui leur fourni des gadgets dignes de James Bond et de fausses cartes professionnelles : ils seront missionnés par Vaillant, l’hebdomadaire communiste français. Une belle couverture pour tenter de retrouver le comte. Ils montent alors dans l’avion, direction Moscou…

Spirou et Fantasio : un univers riche

Après des reprises plus ou moins réussies, Spirou et Fantasio sont de retour dans une nouvelle aventure, Spirou chez les Soviets : une très jolie histoire ! Si Yoann et Velhmann ont imaginé récemment des récits des célèbres enquêteurs (La colère du Marsupilami), ils doivent maintenant alterner leur travail avec Fred Neidhardt et Fabrice Tarrin pour ce qui concerne la série principale.

En effet depuis plusieurs années, Spirou et Fantasio sont déclinés de multiples façon : la collection Le Spirou de … (Les marais du temps de Frank Le Gall, Fantastio se marie de Benoît Feroumont, La lumière de Bornéo de Zidrou et Frank Pé ou encore Fondation Z de Denis-Pierre Filippi et Fabrice Lebeault), mais également les superbes récits d’Emile Bravo (Le journal d’un ingénu, Spirou ou l’espoir malgré tout)  ou ceux de Yann et Olivier Schwartz (Le groom vert-de-gris, La femme léopard ou Les hosties noires). A cela, on peut ajouter deux excellentes séries sur des personnages secondaires : Zorglub de José Luis Munera et Champignac de Béka et David Etien. Sans oublier la série irrévérencieuse Le petit Spirou de Tome & Janry. Depuis 1938 et ses 82 ans, Spirou a donc réussi à se renouveler et à toucher un nouveau public.

Spirou chez les Soviets : une belle aventure à l’ancienne

C’est ainsi qu’arrive Spirou chez les Soviets en cette rentrée littéraire 2020 ! Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette aventure est très réussie, s’inscrivant vraiment dans les pas de Franquin ou Tome & Janry. En choisissant la Guerre froide comme toile de fond, Fred Neidhardt se glisse dans les pas du créateur de Gaston Lagaffe.

Son histoire est haletante et dynamique comme celles des inventeurs du Petit Spirou. Il y a comme d’habitude le côté fantastique avec la création d’un rayon pouvant répandre le gène du communisme, des objets techniques et scientifiques poussés (une fusée ou la boussole-Spip) et bien entendu un kidnapping qui met les deux héros en marche vers l’aventure.

De nombreux hommages aux maîtres du 9e art

Si l’intrigue est simple (retrouver le comte), les obstacles mis sur la route de Spirou et Fantasio sont nombreux. Tome & Janry avaient choisi la pègre chinoise et la mafia italienne dans Luna fatale ou Spirou et Fantasio à New York, Fred Neidhardt part vers l’Est et l’URSS; une nouveauté pour les deux héros. La période de la Guerre froide est propice aux extravagances et à l’espionnage. Les Soviétiques ont des desseins de tueurs (la savant créateur du GPS arbore une tête ressemblant à Boris Karloff, célèbre créature de Frankenstein au cinéma).

Ainsi, les codes du communisme sont détournés et grossis pour faire rire le lectorat : le goulag, les pommes de terre ou encore Natalia, le guide qui cornaque Spirou et Fantasio. Une femme qui s’avèrera une alliée précieuse.

Mais ce qui fait le charme de Spirou chez les Soviets ce sont tous les clins d’œil appuyés à la pop culture. Natalia emmène les deux amis au Café Pouchkine que Gilbert Bécaud n’aurait pas renié, les auteurs de la littérature russe ne sont pas en reste mais le plus gros point étant les hommages aux maîtres du 9e art : Tintin dans le titre de l’album ou les héros d’André Franquin aux éditions Dupuis (Charles le patron, Boulier le comptable, De Mesmaeker, Lebrac, Gaston, voire le créateur lui même). On ne peut pas tout dévoiler tellement il y en a. Cela apporte aussi de la folie à cet album plus que réussi.

Un dessin très vivant

Fabrice Tarrin n’en est pas à son premier Spirou et Fantasio puisqu’il avait déjà œuvré sur Le tombeau des Champignac sur un scénario de Yann. Grand amateur des récits des héros créés par Rob’Vel en 1938, le dessinateur s’est facilement glissé dans les pas de ses glorieux prédécesseurs, comme le souligne son comparse :

« Ce qui me plaît dans le dessin de Fabrice, c’est cet héritage des grands maîtres de la bande dessinée franco-belge. »

Son trait trait est souple et d’un grand dynamisme. Ses planches sont solides et très équilibrées. Il n’y a pas de fausses notes dans ses pages. Fred Neidhardt lui a fait lorgné vers le dessin de Franquin dans les albums La mauvaise tête ou Le repaire de la murène pour Spirou chez les Soviets. Il a bien fait puisque c’est une grande réussite. Ce style Franquin des années 1950 est d’ailleurs couplé à d’autres influences. Il confie ainsi : « Je suis allé également voir chez Uderzo, surtout pour sa façon de respecter l’anatomie des personnages. J’ai puisé dans Conrad aussi, pour les ambiances très noires à la Milton Caniff qu’il a apporté dans les années 1980. »

Spirou chez les Soviets : une histoire haletante, dynamique et drôle dans la veine des anciens animateurs de la série. Une vraie belle surprise !

Article posté le lundi 07 septembre 2020 par Damien Canteau

Spirou chez les Soviets de Fred Neidhardt et Fabrice Tarrin (Dupuis)
  • Spirou chez les Soviets
  • Scénariste : Fred Niedhardt
  • Dessinateur : Fabrice Tarrin
  • Editeur : Dupuis
  • Parution : 04 septembre 2020
  • Prix : 12.50 €
  • ISBN : 9782800169552

Résumé de l’éditeur : Le comte de Champignac a disparu ! Il a été enlevé par des agents du KGB… Des savants russes ont besoin de lui pour les aider à répandre le gène du communisme dans le monde entier. Dans le contexte de la guerre froide, Spirou et Fantasio jouent les James Bond, espions infiltrés sous la couverture d’un reportage pour Vaillant (Pif Gadget), le journal communiste de l’époque. Parviendront-ils à délivrer Champignac de l’embrigadement bolchévique et à sauver le monde de la contamination communiste ? Au dessin, Fabrice Tarrin s’inscrit pleinement dans la continuité des créateurs de la série qui ont fait de Spirou un grand héros éternel. Le scénario de Fred Neidhardt, l’un des plus fins connaisseurs de « Spirou », distille avec jubilation des références à la grande époque de la BD franco-belge, dans un univers de guerre froide où plane de-ci de-là l’ombre de 007. De quoi raviver le goût pour la série Spirou et Fantasio dans ce qu’elle a de plus mythique et intemporelle !

À propos de l'auteur de cet article

Damien Canteau

Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.

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