Entretien avec Dav pour Le premier Printemps de la série Sous les arbres

À l’occasion de la sortie de son dernier album, Le premier Printemps aux Éditions de la Gouttière, Dav est venu nous parler de sa série Sous les arbres. Un entretien qui s’est tenu le 09 Mars 2022, lors d’un live diffusé sur la page Instagram de Yoann, @livressesdesbulles.

Comment as-tu débuté dans la bande dessinée ?

J’ai commencé en fanzine en 1995 qui s’appelait Le Rhinolophe Mag. Ça m’a permis d’aller sur mes premiers salons de bande dessinée et de rencontrer des dessinateurs. C’est là que j’ai rencontré Curd Ridel, un dessinateur qui m’a fait signer mon premier album en 2002 chez Bamboo : Django renard. Voilà le début de la fin.

Couverture Django renard tome 1 - on m'apelle Django

J’ai fait ensuite beaucoup de presse, comme Le Journal de Mickey. J’ai rencontré Christophe Arleston qui gérait Lanfeust Mag. Cela a mis en place tout le reste de ma carrière.  Aujourd’hui, je travaille aussi pour le Journal Spirou

La bande dessinée a-t-elle toujours fait partie de ta vie ?

J’ai toujours eu des albums de bande dessinée à moi. Mes parents n’en lisaient pas. J’aimais bien dessiner, donc les premiers cadeaux que j’ai eus étaient des classiques, Les tuniques bleues, Les Schtroumpfs, Spirou, Astérix, Tintin. Je les ai eus, lus et relus et ça vient de là.

En dessinais-tu déjà ?

Dès la Primaire, j’ai voulu raconter des histoires, dessinées comme un enfant de CM1, CM2. C’est un truc qui ne m’a jamais lâché. Si je n’avais pas dessiné, j’aurais peut-être écrit pour d’autres ou pour un autre médium que la bande dessinée.

À quel public est destinée ta série Sous les arbres ?

J’ai de la chance parce que la série a un super accueil auprès des scolaires, des parents et des gamins aussi. Même si c’est avant tout une série qui est choisie par les parents. On a grandi avec les mêmes dessins animés et on se retrouve tous dans cet univers.

J’ai grandi avec l’univers des dessins animés Disney, ça fait partie de notre culture. J’ai grandi avec Basile Détective privé, Robin des Bois, Le Livre de la jungle, Rox et Rouky et même récemment Zootopie. Pour moi, c’est naturel de voir un animal parler.

Pourquoi avoir choisi des animaux comme personnages principaux de Sous les arbres ?

Quand j’ai voulu faire cette série jeunesse, je suis naturellement allé vers les animaux. Ça me semble logique, sympa et mignon. J’avais envie de dessiner des maisons dans les arbres. Je n’ai pas envie de voitures, de maisons, de gens, de rues, de téléphones portables. Je refuse beaucoup de projets contemporains à cause de ça. Ça ne m’intéresse pas et plein d’autres le font très bien. Je ne veux pas dessiner le réel. 

Quel était le projet de cette série ?

Quand j’ai commencé Sous les arbres, ce projet ne devait pas prendre trop de temps. Il fallait que ce soit sympa et facile à dessiner. Des arbres, de la forêt, des maisons dedans et naturellement des animaux. Des animaux qui causent. Mais ce ne sont pas des histoires animalières, elles pourraient se passer dans un quartier avec des gens normaux. Les échanges sont humains. Bon, ils mangent des vers de terre mais ce n’est pas impactant sur l’histoire. Je voulais des sentiments humains sur cette série même si ce sont des animaux.

Je voulais des histoires qui nous parlent à tous, avec le prisme des animaux. Plus rigolos et plus simples à dessiner. M. Grumpf est un personnage qu’on a tous dans notre entourage. Quand l’album est sorti, un de mes copains m’a dit que son père vivait le même calvaire. Il habite dans une rue où toutes les feuilles du quartier arrivent dans sa descente de garage.

Comment ton projet est-il arrivé aux Éditions de la Gouttière ?

J’ai envoyé mon projet à La Gouttière et Pascal Mériaux, le patron, m’a répondu dans les trois heures. Il était complètement enchanté, avec déjà des idées de ce qu’il voulait en faire. Le jour même, il avait déjà un plan tout tracé pour les quatre albums. Et ça m’a conforté dans l’idée que j’étais chez les bonnes personnes. Les Éditions de la gouttière se sont engagées, avant la sortie du tome 1, à aller jusqu’au bout. C’était un trésor pour moi.

Comment s’est déroulée l’écriture des scénarios ?

Ils m’ont laissé deux ans tranquille pour écrire mes scénarios avant. Donc, quand j’ai commencé par L’Automne de Monsieur Grumpf, on connaissait déjà les trois histoires suivantes. Le premier Printemps et Le frisson de l’Hiver étaient écrites. Pour Un chouette Été, j’avais l’histoire mais non storyboardée. C’était un confort incroyable, ce qui n’aurait pas été le cas chez un autre éditeur.

Quel est ton personnage préféré dans l’univers Disney ?

Mon personnage préféré chez Disney est la Bête dans La Belle et la Bête. Il est dessiné par Glen Keane, un immense dessinateur d’animation qui a longtemps travaillé pour Disney. Il a créé Ariel, Aladdin, Tarzan. Ce gars est un génie. J’aime beaucoup Mickey également.

Disney pour moi c’est de l’animation, je suis toujours hyper client. Les Disney de mon enfance m’ont donné envie de faire de la bande dessinée. J’avais envie d’être dans cet univers. J’ai la même passion avec les Disney d’aujourd’hui.

Dans quel ordre faut-il lire les quatre albums de Sous les arbres ?

Aujourd’hui les quatre albums sont sortis, donc l’ordre n’est pas important. Les quatre histoires sont indépendantes, on n’a pas besoin d’en lire une pour comprendre l’autre. Chaque album a une émotion différente. Avec Le premier Printemps, c’est de l’émotion de famille. Quelque chose qui nous touche fort parce que c’est un papa et son bébé. Sur les trois autres, ce sont des gens qui sont plutôt seuls. 

Quelle est l’origine de ce projet ?

Au départ ce projet devait être fait avec Cyril Trichet, un copain dessinateur qui travaille chez Soleil. On voulait faire un projet Ulule en crowdfunding. Et c’est sur la route de Disneyland, qu’on a commencé à mettre les bases du truc. Il fallait que ce soit simple. Des animaux dans la forêt. On a décidé de se partager les saisons dans des albums courts de 30 pages. Deux ans après, Cyril n’avait pas de temps et n’avançait pas sur Le frisson de l’Hiver. Donc j’ai repris son projet.

Pourquoi avez vous choisi ce format à l’italienne ?

L’avantage du format à l’italienne est qu’il permet des grandes cases. Ce ne serait pas possible sur un format A4, qui ferait vide. Cela permet une autre narration. Je voulais qu’il y ait des moments de respiration. Dans chaque album, il y a au moins deux pleines pages. C’est un format qui existait déjà aux Éditions de la Gouttière.

Comment t’organises-tu pour travailler ?

Quand je me mets à bosser, c’est que j’ai envie. Si je n’ai pas envie, je peux m’arrêter pendant des semaines. Ça ne m’empêchera pas de dessiner, mais je ne vais pas faire le travail que je dois faire. Je vais dessiner pour mon envie à moi. Quand j’ai envie, ou que je suis en retard, alors là, je vais m’y mettre. Et là, ça va très vite. Je suis plus un sprinter, qu’un marathonien. 

Et comment procèdes-tu ?

Quand je fais des pages, j’aime qu’elles soient finies tout de suite. Je fais mon crayonné le matin, un peu l’après-midi. L’encrage commence dans la foulée parce qu’il faut que ce soit fini le lendemain. Je ne peux pas faire une page sur trois jours. Je ne peux pas faire tout le crayonné, puis tout l’encrage. J’ai besoin de rester dans cette énergie là. Comme ça je vais vite et ça me permet de revenir en arrière. Je travaille tout sur papier. Donc c’est cutter, colle.

Par contre, je travaille les pages dans l’ordre et à la suite. Je dessine beaucoup dans mon carnet de croquis. Tous les jours, je remplis des pages en m’entrainant avec les personnages que je dois dessiner. Je les dessine dans plein de positions. Pas nécessairement celle qu’ils auront dans l’album. Juste pour comprendre comment ils bougent et vivent.

Travailles-tu parfois en numérique ?

Le numérique, c’est juste pour la couleur et les textes, avec typo informatique. Les couleurs, je ne sais pas les faire. Donc je les fais à l’informatique. Mes dessins sont à l’encre, au crayon, au feutre pinceau noir et de l’aquarelle noire, pour le lavis. Après je peux faire des retouches informatiques. Le numérique permet de gommer quelques petits trucs.

Pourquoi cet attachement au papier ?

Je dessine tout sur papier, parce que j’adore ça. Je déteste le faire sur ordinateur. C’est un discours de vieux dinosaure, mais je passe suffisamment de temps sur les ordinateurs à ne rien faire, comme nous tous. Quand je dessine, c’est un moment hors du temps. Je ne veux pas dépendre d’un ordinateur pour faire du dessin, parce que c’est du plaisir. Un moment qui ne peut être soumis à quoi que ce soit d’autre, comme une panne électrique. 

Je ne dessine que sur papier, même s’il m’arrive de faire des tests en numérique. Tout le monde parle de la rapidité du numérique. Je fais mes planches en un jour sur papier, donc c’est bon. Et dessiner sur l’ordinateur ne m’amuse pas.

Envisages-tu de refaire un artbook ?

J’aimerais bien refaire un Davbook, mais je traîne un peu les pieds en raison de la logistique. C’était une super aventure de crowdfunding, qui m’a ouvert plein d’autres horizons  sur le métier d’auteur de bandes dessinées. Je continue à travailler avec des éditeurs, mais on sait qu’il n’y a pas que ça. Il y a autre chose, surtout pour faire des projets atypiques comme un carnet de croquis. Avec mes carnets à la maison, j’ai encore du matos pour faire deux Davbook.

Qu’est-ce que ça t’apportait de travailler avec un éditeur pour Sous les arbres ?

Sous les arbres aurait dû être fait en crowdfunding, mais ça n’aurait pas eu le même écho. Je suis content que le bouquin existe comme ça. Je n’ai aucun regret là-dessus. La rencontre avec les éditeurs des Éditions de la Gouttière est une belle rencontre, une des meilleures dans ce milieu professionnel. Ça m’a rappelé mes échanges avec Bamboo, qui est une super maison aussi.

Peux-tu nous parler de ton prochain projet ?

Mon prochain projet n’est pas secret, il est signé. C’est Joris Chamblain, qui fait Les carnets de Cerise, au scénario. C’est lui qui m’a présenté aux Éditions de la Gouttière. Ce sera chez Glénat, et pour l’instant, il devrait y avoir 76 pages, mais ça pourrait encore évoluer. Ça devrait sortir probablement en 2023. Mais je n’ai pas encore commencé les pages. C’est un Mickey pirate.

Existe-t-il des contraintes quand on dessine Mickey ?

Il y a des choses qu’on ne peut pas faire, comme Mickey qui picole ou avec une arme à feu. Ça c’est logique. Joris et moi sommes deux passionnés de Disney, avec un pass annuel à Disneyland. On adore le personnage, donc on a envie de faire les choses bien. On ne veut pas le torturer, mais faire du Mickey pur jus, avec les moyens qu’on nous donne. Un album de presque 80 pages.

Les seuls qu’on n’a vraiment pas le droit de faire, c’est dessiner des super-héros, comme Marvel, Star War ou Pixar. La collection est sur les personnages de la bande dessinée Mickey, Dingo, Picsou. On peut faire Tic et Tac, mais il n’y aura pas Simba. Il y a surtout une vérification au niveau scénario. Mais pour le dessin, ça coule de source. Je vais illustrer ce qui a été écrit. Je n’ai  pas envie de faire du scabreux.

Pouvoir dessiner Mickey, est-ce un rêve de gosse qui se réalise ?

Je ne peux pas dire que c’est un rêve de gosse. C’est plus un rêve d’adulte. Quand j’ai commencé dans la bande dessinée en 2001, je suis entré chez Mickey Parade pour faire des jeux. La première question que je leur ai posée était “Est-ce que je peux dessiner Mickey ?. Et à l’époque on m’a dit non. Très peu d’auteurs avaient le droit de le dessiner. Le cahier des charges était hyper précis. Et 19 ans plus tard, quand Glénat a récupéré les droits de Mickey, je me suis entraîné à en faire. J’en ai posté plein sur les réseaux sociaux.

Depuis quand t’entraînes-tu à dessiner Mickey ?

Joris m’a fait revenir au Journal de Mickey pour faire des Mickey énigmes. Depuis quatre ans, je fais Mickey et Dingo mènent l’enquête. Je m’entraîne en attendant que l’album Glénat commence. Et je vais pouvoir le faire à ma façon, comme Sous les arbres à l’aquarelle, avec la même technique de couleur. Sous les arbres est comme pour un test de mise en couleur pour le futur Mickey.

Aurais-tu envie de t’atteler à un projet adulte ?

Je n’ai pas vraiment envie de faire de projet adulte. Tout ce qui est contemporain m’ennuie profondément. J’ai écrit des histoires adultes qui iraient bien dans la collection Grand Angle de Bamboo. Mais ça veut dire qu’il faut que je dessine un monsieur avec une voiture, un téléphone. Je n’ai pas envie de faire ça aujourd’hui. Je ne veux faire que de la jeunesse et c’est mon envie depuis le départ.

Ma première série jeunesse chez Soleil était Les Garnimos, des petits animaux dans la savane. Il m’ont laissé faire trois tomes, même si ça n’a pas très bien marché.

Couverture les garnimos tome 1 - opération bidon

Quand Delcourt a racheté Soleil, je suis parti chez Bamboo faire Appa, Le petit bonhomme pain d’épice. 

Couverture Appa tome 1 - Boule de poils    Couverture Le Bonhomme en pain d'épice

Les as de la jungle, chez Delcourt toujours de la jeunesse. Pour moi c’est la clé, j’ai vraiment envie de travailler pour les enfants.

Couverture Les as de la jungle tome 1

 

As-tu des projets avec Les Éditions de la Gouttière ?

Sous les arbres est une série pour les tout-petits, les primo-lecteurs vers six ans. Et Mickey sera pour toute la famille. Je vais réfléchir à de nouveaux projets pour Les Éditions de la Gouttière, mais ce sera en jeunesse. Je ne me vois pas faire autre chose. J’ai des envies. Je me vois bien bosser sur les dinosaures. Il faut juste que je trouve le bon titre pour les dinosaures. Idéalement ce serait le même format, la même collection Sous quelque chose. Avec des animaux complètement différents.

Les éditions étrangères de Sous les arbres viennent de sortir. On devrait avoir les échos d’autres pays. Et si jamais on peut m’inviter à l’étranger pour les dédicacer, je veux bien. Il se passe plein de choses autour de la série. Donc ça ne va pas s’arrêter brutalement maintenant. C’est un chemin vers autre chose.

Considères-tu que tu crées uniquement pour les enfants ?

Depuis que je fais ce métier, j’estime que mes albums jeunesse ne sont pas des histoires pour les enfants, mais pour les parents. Elles sont faites pour être racontées aux enfants, mais elles s’adressent aux parents. Ce sont des histoires mignonnes avec un sous-texte que les gamins ne percuteront pas. Comme dans Un chouette Été avec le retour à l’enfance. C’est plus pour nous adultes. Sous les arbres repose donc là-dessus. Une série pour enfants écrite pour les parents. En particulier le dernier tome qui est sur la paternité ou plutôt la parentalité. C’est avant tout une série tout public.

As-tu eu des coups de cœur graphique récemment ?

J’ai beaucoup aimé Malgré tout de Jordi Lafebre, Les beaux étés qui sont magnifiques.

   

Et puis le gros coup de cœur est pour la série Le château des animaux, de Xavier Dorison et Félix Delep, c’est super bien dessiné. On dirait de l’animation. Ce sont des coups de cœur graphiques que j’ai achetés pour les dessins.

Le château des étoiles d’Alex Alice, j’ai les six tomes, je n’en ai pas lu un seul. Mais c’est magnifique.

Merci beaucoup Dav d’être venu nous parler de Sous les arbres, une série pour les parents et pour les enfants.

CET ENTRETIEN ET SA RETRANSCRIPTION ONT ÉTÉ RÉALISÉS DANS LE CADRE DU LIVE QUI S’EST TENU MERCREDI 09 MARS 2022 SUR LA PAGE INSTAGRAM DE YOANN DEBIAIS @LIVRESSEDESBULLES .
   SI VOUS VOULEZ EN SAVOIR PLUS, N’HÉSITEZ PAS À REGARDER LE REPLAY DU LIVE.

 

Article posté le mardi 10 mai 2022 par Claire & Yoann

Sous les arbres de Dav chez Éditions de la gouttière
  • Le premier Printemps – Sous les arbres
  • Auteur : Dav
  • Editeur : Éditions de la Gouttière
  • Prix : 10,70 €
  • Parution : 18 Février 2022
  • ISBN : 9782357960541

Résumé de l’éditeur : Papa sanglier a très envie de faire découvrir la nature et le printemps à son tout jeune marcassin… Malheureusement, la moindre fleur et le moindre pollen font éternuer le bébé ! Les premiers pas dans l’herbe se terminent en pleurs… Et s’il fallait juste faire preuve de patience et de temps pour enfin cueillir à deux un bouquet pour maman ?

À propos de l'auteur de cet article

Claire & Yoann

Claire Karius @fillefan2bd & Yoann Debiais @livressedesbulles , instagrameurs passionnés par le travail des auteurs et autrices de bandes dessinées, ont associé leurs forces et leurs compétences, pour vous livrer des entretiens où bonne humeur et sérieux seront les maîtres-mots.

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