Constellation

Notre avis : En pleine Guerre Froide, un américain et une russe se retrouvent côte à côte dans un avion. Constellation de Frederik Peeters est un huis-clos étonnant comme seul peut l’imaginer l’auteur des Pilules bleues, une réédition datant de 2002.

1957 à bord du vol Constellation reliant Paris à New-York. Un américain très nerveux réfléchit à quitter son travail de représentant. S’assied alors à côté de lui, une très belle femme mystérieuse à l’accent russe qui habite New-York.

Son angoisse grandit encore plus, il lui invente une vie d’espionne du KGB, il transpire, il a peur. S’engage alors une discussion un brin surréaliste…

A travers ce court récit de 32 pages, Frederik Peeters imagine un huis-clos légèrement angoissant à des milliers de mètres d’altitude. En choisissant comme toile de fond, la Guerre Froide et un duo américano-soviétique, il exacerbe ce sentiment de méfiance entre ses deux personnages. Et si l’écrivaine russe était une espionne, une terroriste ? L’avion serait alors sans défense.

Il faut souligner que l’homme est très craintif et qu’il ne serait pas vraiment celui que l’on croit. Une piste pour perdre le lecteur. Grâce à une narration très soignée d’une redoutable efficacité, l’auteur de L’odeur des garçons affamés (avec Loo Hui Phang, Casterman) happe facilement le lecteur.

Les récitatifs insistent sur l’état d’esprit et ce que pense l’américain, ainsi que les dialogues qui laissent des blancs sont efficaces. Comme pour ces précédentes publications, l’auteur suisse réalise de belles planches en noir et blanc, au trait charbonneux qui convient idéalement à l’ambiance pesante du récit.

  • Constellation
  • Auteur : Frederik Peeters
  • Editeur : L’Association, collection Ciboulette
  • Prix : 9€
  • Parution : 21 mars 2017

Résumé de l’éditeur : 1957, un vol Paris-New-York. à bord de l’appareil qui survole l’Atlantique, un Constellation, fleuron de l’aviation civile, le hasard a placé un soi-disant représentant en insecticide et une écrivaine à l’accent russe côte à côte. La guerre froide fait rage, les deux passagers hésitent à se laisser aller à un flirt ou à céder aux suspicions de rigueur. L’heure du café voit s’en mêler un steward qui ne leur laissera pas le loisir d’en décider. Frederik Peeters livre un huis-clos aux allures de roman d’espionnage où le récit avance au gré de trois chapitres qui décrivent successivement la même scène vécue par chacun des trois personnages principaux. Initialement publiée en 2002, il était temps de rééditer cette fiction de l’auteur de Pilules Bleues et de Lupus notamment.

Cobalt

Notre avis : Alors qu’il est retiré des affaires mais toujours dans les petits papiers, Cobalt doit réaliser une dernière mission : tuer quatre personnes. Pablo de Santis et Juan Saenz Valiente imaginent Cobalt, un très bon polar fantastique édité par Michel Lafon.

M. Cobalt possède une belle couverture : il est pharmacien. Sa double vie l’a emmené par le passé à être un tueur à gage. Rangé des affaires, il doit reprendre du service lorsque Cuivre le recontacte de la part de Zinc : il doit éliminer quatre personnes.

Avant de partir, l’homme mystérieux lui demande de fabriquer des balles spéciales parce que ses futures cibles sont elles aussi spéciales…

Ce récit de Pablo de Santis est d’une belle efficacité. Construit comme un polar classique, à la « James Bond », à l’ancienne, il prend une tournure fantastique intelligente dans la seconde partie de l’album. L’auteur argentine glisse dans les pattes de son personnage principal, quatre créatures mi-humaines, mi-algues quasi invincibles.

En face d’elles, il imagine Cobalt, un héros plutôt âgé, très ingénieux, fort dans les potions et autres produits chimiques mais aussi dans le tir au revolver : un tueur à l’ancienne.

Pour l’accompagner dans ce projet, Pablo de Santis a fait appel à Juan Saenz Valiente. Le dessinateur argentin dévoile un trait singulier et original restituant bien l’ambiance rétro de l’album. Ses belles planches en bichromie varient à chaque nouveau chapitre.

  • Cobalt
  • Scénariste : Pablo de Santis
  • Dessinateur : Juan Saenz Valiente
  • Editeur : Michel Lafon
  • Prix : 13.95€
  • Parution : 13 avril 2017

Résumé de l’éditeur : M. Cobalt, un pharmacien sexagénaire, est en réalité un agent  » endormi  » depuis longtemps.M. Cuivre, une vieille connaissance, se rend à la pharmacie et lui demande de réaliser une toute dernière mission, éliminer quatre personnes. Cobalt n’a aucune envie de reprendre du service mais il sait bien que si son ancien chef fait appel à lui, c’est que la situation est désespérée…
La ville est devenue plus sombre ces dernières années, les jeunes et les familles l’ont abandonnée, la violence et la tristesse y sont reines, les assassinats et les suicides se répètent jour après jour. La ville est aux prises avec un gouvernement d’êtres malfaisants.
Cobalt entre dans une vieille bibliothèque ; à l’intérieur d’un livre, il reçoit sa première instruction : tuer le capitaine Morand qui vit à l’hôtel Titanic. La ville est entre les mains de ce monstre qui détient une étrange algue noire aux pouvoirs maléfiques…

Le travailleur de la nuit

Notre avis : Gentleman cambrioleur, Alexandre Jocob était un vrai voleur anarchiste non-violent. Sa vie, digne d’un roman, est contée dans Le travailleur de la nuit, un album de Matz et Léonard Chemineau.

1905. Le procès d’Alexandre Jacob se tient à Paris. Il est accusé d’avoir tué un gendarme. Une occasion pour le juge de retracer son parcours de cambrioleur.

Dès ses 11 ans, Alexandre s’engage comme mousse dans une compagnie maritime de Marseille. La vie à bord est délicate et après une avance trop pressante de son supérieur, il déserte. Arrivé à Sydney, il enchaine les petits boulots et se retrouve sur un navire qui s’avérera être un bateau pirate.

De retour chez lui, il découvre que sa mère a décidé d’accueillir Jules, un adolescent orphelin, très proche des milieux radicaux de gauche. Avec lui, il découvre les grandes figures extrémistes. Pourtant, Alexandre ne souhaite pas franchir le pas de la violence mais combattre les riches et les puissants en les ruinant. Sa vie est alors rythmée par les vols. Il regroupe des hommes et des femmes qui forment les Travailleurs de la nuit…

Alors que les éditions Sarbacane avaient publié Alexandre Jacob de Gaël et Vincent Henry en janvier 2016 (voir notre chronique), Rue de Sèvres leur emboitent le pas avec une autre version de la vie de ce cambrioleur d’un nouveau genre. S’appuyant sur les mêmes sources historiques et les mêmes ouvrages que leur prédécesseur (voir la bibliographie en fin d’album), les faits sont donc similaires. Le lecteur qui a découvert l’album des frères Henry n’apprend donc pas grand chose de plus sur le voleur. Le présent ouvrage apporte de la nouveauté et des informations sur l’enfance et les dernières années de sa vie.

L’existence très romanesque de ce Robin des Bois est parfaitement restituée par Matz. Ce qui frappe avant tout dans ce personnage c’est sa volonté farouche de ne jamais faire usage de la force dans son action, sauf en cas de légitime défense, mais aussi son rejet de toute forme d’autorité (police, gouvernement, justice) et des extrémismes.

Celui qui aurait servi de modèle à Arsène Lupin – le gentleman cambrioleur – même si Maurice Leblanc a toujours nié cette filiation, mérite que l’on s’y arrête. Ce personnage ayant existé a donc fait l’objet de nombreuses fictions.

Découvert par les publications de Les premiers, Les amis de Pancho Villa mais surtout Julio Popper (avec le même scénariste), Léonard Chemineau poursuit le début de sa carrière de dessinateur avec une grande intelligence, choisissant des projets forts. Comixtrip apprécie beaucoup le travail de ce jeune auteur pétri de talent. Comme pour ses précédents ouvrages, il réalise des planches très belles aux couleurs lumineuses et les visages de ses personnages sont de véritables trognes. A lire !

  • Le travailleur de la nuit
  • Scénariste : Matz
  • Dessinateur : Léonard Chemineau
  • Editeur : Rue de Sèvres
  • Prix : 18€
  • Parution : 19 avril 2017

Résumé de l’éditeur : Retrace l’histoire d’Alexandre Jacob, qui avec son gang de cambrioleurs a écumé la France et défrayé la chronique, laissant à ses victimes sa carte avec un mot humoristique et distribuant ses énormes butins aux nécessiteux. Il aurait inspiré à M. Leblanc le personnage d’Arsène Lupin.

Alex et Ani, tome 2 : L’épreuve d’Hadès

Notre avis : Après un premier volume – Le secret d’HéraclèsAlex et Ani sont de retour dans un deuxième tome signé Nathaniel Legendre et Silvio Speca.

Dans ce premier opus, le lecteur découvrait Alexiarès (Alex) et Anicetos (Ani), frère et sœur jumeaux, petits-enfants de Zeus et enfants d’Héraklès, envoyés dans les Enfers.

Sans notion de temps ni d’espace, Alex et Ani errent dans le royaume d’Hadès. A part chasser des myriapodes pour se nourrir ou tenter d’échapper aux Kérès, leur vie n’est guère réjouissante.

Un jour, Ani – malgré les recommandations de son frère – part chasser des minoporcs et croise alors Sisyphe roulant son rocher. Après avoir essayé de l’aider mais en vain, elle se retrouve dans un état second après avoir bu dans la gourde du colosse…

Petite série jeunesse éditée par Cerises & Coquelicots, Alex et Ani revisite habilement la mythologie grecque. Personnages moins connus que leur père ou leur grand-père, ce duo est le fruit de l’union d’Herakles et Hébé, lorsque le demi-dieu séjourna sur le Mont Olympe.

Le récit de Nathaniel Legendre dont c’est la huitième série (notamment Zigeuner chez 12Bis, Les champions d’Albion chez Jungle ou Lady McLeod chez Cerises & Coquelicots), arrive plutôt facilement à accrocher son jeune lectorat. Action, animaux fabuleux, légendes et complots de la part d’Hadès sont au cœur de son histoire. Pour mettre en image Alex et Ani, le scénariste a fait appel à Silvio Speca, auteur italien de Shadow warriors (Dream éditions). Son dessin très rond convient idéalement à ce style de récit. Ses personnages sont affublés de grands yeux à la Disney. Il faut souligner qu’il a travaillé pour le Studio Disney en Italie à partir de 1998, ce qui se ressent dans son trait. Son découpage classique rythme bien le récit. On déplorera ses couleurs un peu fades qui ne soutiennent pas assez son dessin comme petit bémol à sa partie graphique très juste.

  • Alex et Ani, tome 2 : L’épreuve d’Hadès
  • Scénariste : Nathaniel Legendre
  • Dessinateur : Silvio Speca
  • Editeur : Cerises et Coquelicots
  • Prix : 15€
  • Parution : 23 mars 2017

Résumé de l’éditeur : Contrarier une fois de trop le puissant Zeus, leur grand-père, n’était peut-être pas la plus judicieuse des idées. Maintenant, voilà Alexiarès et Anicétos retranchés dans les profondeurs du royaume d’Hadès. Contraints de se nourrir au petit bonheur la chance de trucs gluants et de fuir en permanences des monstruosités de tous poils, pour être francs, ils ne savent même plus depuis combien de temps ils trainent leurs guêtres dans les parages, à la recherche de leur père. Mais il y a pire encore. Non seulement Alex joue au père-la-morale en toutes circonstances, mais il semblerait qu’il ne soit plus tout à fait insensibles aux charmes des filles de son âge… En d’autres mots, c’est VRAIMENT l’Enfer ! Le calvaire des jumeaux prend une toute autre tournure lorsqu’au détour d’une colline, Ani fait la rencontre du robuste Sisyphe, poussant sans fin son rocher au sommet. Une piste qui va les mener jusqu’au nightclub le plus tendance du monde souterrain, la fameuse boite de Pandore, non sans être passés par les forges de tonton Héphaïstos ou s’être liés d’amitiés avec ces têtes de linottes, mais cependant farouches guerrières, que sont les Danaïdes.

Après la pluie, volume 1

Notre avis : Que se passe-t-il dans la tête d’une jeune adulte qui tombe amoureuse d’un quadragénaire ? Jun Mayuzuki imagine ce bouleversement de sentiments dans Après la pluie, un seinen Kana.

Akira, tout juste majeure, est souvent fatiguée en cours. Il faut souligner qu’elle doit s’occuper de son appartement où elle vit avec sa mère et qu’elle cumule un petit travail pour payer ses études.

Tous les jours, elle sert les clients dans le café-restaurant Garden tenu par Masami Kondo, un homme de 45 ans. Divorcé et père d’une jeune enfant Yuto, il est complètement perdu.

Malgré les sollicitations d’un de ses camarades, Akira est très attirée par le quadragénaire pourtant négligé, qui sent mauvais et qui s’excuse tout le temps auprès des clients…

Prépublié au Japon à partir de 2014 au Japon dans la revue Big comic spirit des éditions Shôgakukan, Après la pluie n’est pas un shôjo malgré sa partie graphique qui pourrait y faire penser mais bien un seinen. Ce manga multi-primé et plébiscité par le public (plus de 100 000 exemplaires vendus au Japon) est étonnant et accrocheur.

Entre mélancolie et légèreté, le premier opus de ce titre est assez rafraîchissant. Le mangaka met ainsi face-à-face deux êtres très différents, qui ont des vies différentes, des parcours différents et des envies ou buts différents. Akira est jeune, plutôt déterminée, qui travaille d’arrache-pied et qui aime plus les hommes mûrs que ceux de son âge qui lui font la cour. De l’autre, Kondo n’est pas la figure du sex-symbol quadragénaire tel Brad Pitt ou George Clooney, il est négligeant dans son attitude et dans son hygiène, ne sourit pas beaucoup, semble dépassé par les événements, ne sait pas s’occuper de son fils et fait des courbettes aux clients dès qu’il y a quelque chose qui ne va pas.

Les contradictions sont donc nombreuses entre le patron et son employée. Pourtant ces deux êtres vont se rapprocher avant tout par la jeune majeure. Lui, préférant rester en retrait, se méfiant des adolescentes.

Se dévoilant lentement par une mise en place qui prend son temps, Après la pluie ravira les amateurs de shôjo – oui, oui on peut l’affirmer – et semble avoir une belle fenêtre pour conter une histoire d’amour des plus atypiques. Jun Mayuzuki dévoile des pages très efficaces malgré un classicisme du à ce genre de manga. Son trait est fin, précis et délicat. Une belle petite surprise.

  • Après la pluie, volume 1
  • Auteur : Jun Mayuzuki
  • Editeur : Kana, collection Big Kana
  • Prix : 7.45€
  • Parution : 07 avril 2017

Résumé de l’éditeur :  Akira Tachibana, 18 ans, est en classe de première au lycée. Après les cours, elle travaille dans un restaurant familial géré par Masami Kondô, 45 ans. La jeune fille, plutôt introvertie, est secrètement très attirée par son patron. Alors qu’Akira s’apprête à peine à sortir de l’adolescence, Kondô, lui, est déjà à la moitié de sa vie. Une histoire d’amour à suivre de près…

Marie Curie, la scientifique aux deux Prix Nobel

Notre avis : Pionnière dans de nombreux domaines scientifiques, Marie Curie a eu une vie quasi romanesque. Son histoire est révélée dans Marie Curie, la scientifique aux deux Prix Nobel, un très bel album jeunesse signé Céka et Ygaël.

Pologne dans les années 1870. Sous le joug des Russes, le pays doit se plier au diktat de Saint-Pétersbourg, y compris dans les écoles où les élèves doivent absolument apprendre la langue et l’Histoire de l’occupant. Dans l’école de Marya Sklodowka – bientôt Marie Curie – l’enseignante de la jeune fille est plus souple et les encourage à continuer à parler polonais malgré les pressions extérieures.

Il faut souligner que son père – professeur dans le même établissement – sera démis de ses fonctions après avoir tenu tête à son directeur pro-russe. La vie de la famille est alors bouleversée : Sklodowski doit donner des cours clandestins pour survivre en accueillant chez lui des pensionnaires.

De son côté, Marya – déjà très douée en mathématiques – s’intéresse de plus en plus aux expériences scientifiques et les inventions de son père. Elle obtient déjà des distinctions et part étudier à Varsovie à l’Université Volante (cours clandestins). Pour payer ses études, elle travaille en tant que fille au pair au Nord de la Pologne.

Rapidement, son petit laboratoire varsovien est trop exigu pour son immense talent. Elle décide de partir pour Paris. Elle suit des études à la Sorbonne (il y avait peu de femmes à l’époque dans l’établissement). Elle francise son prénom et travaille d’arrache-pied pour réussir. Elle obtient une Licence ès sciences physiques puis une autre de mathématiques.

Ayant besoin d’un laboratoire pour effectuer ses recherches, elle fait la demande à Pierre Curie – physicien spécialiste du magnétisme – qui l’accueille volontiers. Les expériences se mélangent alors à leur amour naissant : c’est le début de la grande aventure du couple Curie

Il faut passer outre la couverture de Marie Curie, la scientifique aux deux Prix Nobel – pas très réussie dans sa composition – et entamer l’histoire de la grande chercheuse. Cet album est riche et passionnant ! A travers 88 pages – il en fallait autant pour conter son existence très riche – le jeune lecteur (à partir de 10 ans) découvre la vie quasi romanesque de la première très grande scientifique française.

Tous les éléments clef sont mis en lumière par Céka : l’enfance, le départ à Varsovie, la vie parisienne, la rencontre avec Pierre, les recherches, les découvertes (le radium, le polonium), la mort accidentelle de Curie, la radiographie, les voitures équipées pendant la Première guerre mondiale, les Prix, la naissance de Irène (future prix nobel) et Eve (écrivaine) ou la maladie.

D’une belle fluidité grâce à un découpage en petits chapitres, l’auteur de Artips histoire(s) de l’art en BD (Petit à Petit) accroche son lectorat. Pionnière dans de nombreux domaines, cette femme sera une figure du féminisme (première femme Prix Nobel, première à siéger à l’Académie des Sciences, première femme au Panthéon en son nom propre…). Avec Pierre, ils voueront toute leur vie à la science. Par leur très grande modestie et le fait de ne jamais breveter leurs recherches afin d’en faire profiter le monde entier, le couple reste des modèles en France et dans le Monde.

Le dessin de Ygaël est idéal pour restituer l’ambiance folle du récit. Les avancées scientifiques et le tourbillon de vie de Marie Curie sont très bien mises en scène . Déjà dessinateur d’une biographie d’un grande homme de science – Pasteur, toujours avec Céka – il réalise des planches d’une belle lisibilité et sobres. Parfois, l’on pourrait voir des influences de dessins animés des années 80 dans ses personnages (l’enseignante de Marya ressemble à Tante Polly dans Tom Sawyer) et c’est plaisant.

Prépublié dans le magazine Cosinus des éditions Faton (éditeur des excellentes revues pour enfants-ado Arkéo, Léonard, Virgule ou Olalar où collabore Thomas Priou avec son personnage Lionnel), Marie Curie est une excellente biographie ! A lire !

  • Marie Curie, la scientifique aux deux Prix Nobel
  • Scénariste : Céka
  • Dessinateur : Ygaël
  • Editeur : Faton
  • Prix : 18.50€
  • Parution : 15 avril 2017

Résumé de l’éditeur : Rien ne prédestinait Marie Curie, née à Varsovie en 1867, à un parcours aussi extraordinaire… Et pourtant, aidée par son mari Pierre, elle va devenir grâce à son travail, sa ténacité et son génie une pionnière de la radioactivité, avec notamment la découverte du radium, et la seule femme à obtenir deux prix Nobel. « Marie Curie, la femme aux 2 prix Nobel » : un album BD de 96 pages complété par un dossier documentaire illustré pour découvrir la vie d’une femme exceptionnelle, génie des sciences.

Your lie in April Coda

Notre avis : Cinq histoires préquel à la série Your lie in April, Coda est un recueil très sympathique et agréable signé Naoshi Arakawa aux éditions Ki oon.

Les lecteurs – connaisseurs ou non de la série – vont être ravis de découvrir des histoires inédites des héros de Your lie in April. En effet, Naoshi Arakawa imagine cinq récits se déroulant avant la série principale, lorsque les personnages principaux étaient plus jeunes. Ainsi, l’on retrouve Kôsei, Tsubaki, Ryota mais aussi Kaori, Emi, Toshiya ou Nagi; leur passé et leur enfance.

Le lecteur découvre notamment :

  • Un soir d’été. La mère de Kôsei lui propose de participer à un récital de piano alors qu’il n’a que 4 ans ! Malgré son potentiel énorme, le petit garçon ne souhaite plus répéter…
  • Un fantôme d’été. Le grand jour est arrivé pour Kôsei ! Tsubaki et Ryota sont même venus écouter le récital; tout le monde s’est bien habillé pour jouer mais aussi pour y assister…

Phénomène au Japon et maintenant en France depuis quelques années, Your lie in April est un magnifique manga de Naoshi Arakawa ! Mélange subtil de musique, de vie de musicien, de secrets, de non-dits, de difficultés à jouer en public mais aussi d’entraide et d’amitié, cette série moderne et rafraichissante plait à de nombreux lecteurs.

Même si l’on ne connait pas la série-mère, il est facile de lire ce « Coda » parce que les récits courts sont sympathiques, agréables et teinté de beaucoup d’humour. A découvrir !

  • Your lie in April, Coda
  • Auteure : Naoshi Arakawa
  • Editeur : Ki oon, collection shônen
  • Prix : 6.60€
  • Parution : 09 mars 2017

Résumé de l’éditeur : Entrez dans les coulisses de Your Lie in April et découvrez les aventures inédites de vos musiciens préférés ! Une chasse aux graines magiques improvisée, une amie à qui redonner le sourire, un fan-club plus motivé que jamais, une fête de l’école à préparer, un rêve à poursuivre… entre souvenirs d’enfance et anecdotes musicales hautes en couleur, l’enthousiasmant Naoshi Arakawa n’a pas fini de vous surprendre !

Le comte de Monte Cristo

Notre avis : Excellente adaptation du roman de Alexandre Dumas, Le Comte de Monte Cristo ravira les amateurs du chef-d’œuvre mais aussi ceux de mangas. Signé Ena Moriyama, il est publié par Kurokawa.

Accusé de complotisme contre l’Empereur, Edmond Dantès est emprisonné sans procès au Château d’If, laissant derrière lui sa femme Mercédès. Quelle déchéance pour cet homme loyal le jour de son mariage !

Pendant de nombreuses années, il se morfond dans sa cellule. Il arrive à communiquer avec l’Abbé Faria qui lui révèle l’existence et le lieu d’un immense trésor. Après la mort du vieil homme, Dantès prend sa place dans le sac jeté à la mer.

Dantès récupère le trésor et devient alors le Comte de Monte Cristo (nom du lieu de la découverte) et revient à Marseille. Il aide Morrel, l’un de ses seuls soutiens et échafaude des plans machiavéliques pour se venger de Morcerf et Danglars – ses anciens amis – qui l’ont envoyé dans les geôles d’If…

Ecrit avec Auguste Maquet, Le Comte de Monte Cristo fut publié en 1844. Le roman de Alexandre Dumas fait donc l’objet d’une adaptation. Après celle en dessin animé réalisée par Mahiro Maeda en 2004, c’est Ena Moriyama qui s’y colle. Ce one-shot fut publié en 2014 au Japon dans la revue Young Animal des éditions Hakushensha.

Tout ou presque y est. Si l’on regrettera des raccourcis ou d’énormes ellipses vis-à-vis de l’œuvre originale, le manga est très agréable à la lecture et très accrocheur. Une bonne façon d’entrer dans le roman de Dumas si l’on est rétif à sa lecture longue.

La partie graphique est très réussie. Les planches sont soignées et très détaillées. Les expressions des visages sont bien dans l’esprit du genre. Entonnement, pourquoi Le comte de Monte Cristo n’a pas fait l’objet de plusieurs tomes ? Cela aurait permis de mieux appréhender tous ses aspects.

  • Le comte de Monte Cristo
  • Auteur : Ena Moriyama, d’après Alexandre Dumas
  • Editeur : Kurokawa
  • Prix : 8.90€
  • Parution : 09 mars 2017

Résumé de l’éditeur :Tout commença en France à Marseille en l’année 1815. Le jour prévu de son mariage, Edmond Dantès, capitaine de vaisseau plein de promesses se fait enfermer injustement au Château d’If, une prison pour criminels politiques. Pendant son long emprisonnement il apprend qu’il a été victime d’une impardonnable trahison. Débutera ensuite une tragédie de vengeance dans laquelle Dantès jouera ses années perdues en prison ainsi que celles qu’il lui reste à vivre en liberté.

Les aventures de Bob Leclerc, tome 1 : Le cauchemar argenté

Notre avis : Les éditions Mosquito ont eu la très bonne idée de publier le premier volume des Aventures de Bob Leclerc – Le cauchemar argenté – un excellent album de science-fiction signé Grégoire Bouchard.

Pilote émérite de la Guerre du Vietnam, Bob Leclerc était jusqu’à présent rangé des affaires. S’il avait toujours un lien fort avec l’armée par la construction de maquettes, l’homme très pieux est amené dans une base secrète par deux hommes très discrets.

Sans savoir pourquoi il se retrouve dans cette voiture, il découvre étonné toutes les précautions pour arriver dans le lieu top-secret. Sous-marin ou train sont au programme pour aller dans la base secrète. Là, il se retrouve vraiment dans son élément. Il est missionné pour s’occuper des martiens qui arriveraient sur Terre…

Créées dans les années 90 dans la revue Iceberg, Les aventures de Bob Leclerc trouvent un nouveau souffle grâce à Mosquito. Si Vers les mondes lointains – album Paquet, un préquel à la série – est épuisé, le lecteur découvre cet ex-militaire, as du pilotage, par ce très beau premier volume édité de très belle manière (grand format, 202 pages de grande qualité).

Grégoire Bouchard avait imaginé son héros pendant l’âge d’or de la ligne claire, dans la veine des Serge Clerc, Daniel Torrès ou Yves Chaland (même si son trait est beaucoup plus fouillé que ces illustres pairs). Il construit son récit d’une manière très lente pour que la mise en place soit d’une très grande efficacité. Son personnage principal est quasi mutique mais vaillant et va-t-en guerre.

Il installe son histoire dans les années 50, décennie du début de la conquête spatiale et âge d’or des récits de science-fiction américains. Bob Leclerc est un fin connaisseur de toute cette nouvelle technologie, affûté physiquement et très ouvert aux expériences scientifiques voire les cours magistraux. La lecture pourra sembler exigeante pour le néophyte mais il faut passer outre ses moments de pure technologie.

On attend avec une certaine impatience, la suite et la fin de ce diptyque si original ! Une très belle découverte !

  • Les aventures de Bob Leclerc, tome 1 : Le cauchemar argenté
  • Auteur : Grégoire Bouchard
  • Editeur : Mosquito
  • Prix : 25€
  • Parution : 03 mars 2017

Résumé de l’éditeur : Nous sommes au Canada à l’été 1959. Les martiens se sont secrètement infiltrés sous forme humanoïde dans la population du pays tout entier. Pour contrecarrer cette invasion, une équipe exceptionnelle de savants et techniciens travaillent dans le plus grand secret à la construction d’une fusée atomique capable d’atteindre la planète Mars. Leur but : annihiler la civilisation martienne ! A n’existe qu’un homme au pays capable de commander cette expédition sacrée : Bob Leclerc.

La valeur de ma vie

Notre avis : Les éditions Akata proposent La valeur de ma vie, un shôjo à-part signé Yoshimi Tôda, mettant en scène une lycéenne, ex-voyou qui n’est pas disponible pour un amour à porté de ses yeux. Elle songe avant tout à son pardon.

Alors que l’entrée au lycée est un moment très attendu par les collégiens, Yuri Daidô ne l’entend pas de cette oreille. Mal dans sa peau, cette ancienne petite frappe a d’énormes secrets enfouis au fond d’elle. Ce passé si lourd lui pèse beaucoup. Il faut souligner qu’un moment dur dans sa vie de collégienne lui a retiré la mobilité de son bras droit, la gênant dans sa vie quotidienne. Elle pense que ses trois années futures dans son nouvel établissement ne vont pas se dérouler de la meilleure des manières. Elle veut prouver la valeur de sa vie, tout d’abord à elle même…

Prépublié dans la revue Betsucomi Deluxe des éditions Shôgakukan au Japon en 2013, La valeur de ma vie est un shôjo one-shot – premier d’une nouvelle série chez Akata – mettant en lumière de belles valeurs. Le récit de Yoshimi Tôda est fondé sur la personnalité très forte de Yuri, une lycéenne qui doute et qui porte en elle, un lourd passé. Le lecteur va donc suivre le quotidien de l’adolescente et va tenter de percer son mystère pendant la première partie du manga.

Yuri tente de surnager en tentant de se convaincre qu’elle est une bonne personne. Le lecteur est totalement dans l’empathie et peut ressentir lui-même sa douleur, son pathos. Elle trouve d’ailleurs son alter ego en la personne de Chio, qui lui aussi a un lourd passé et qui est attiré comme un aimant par sa camarade.

Malgré quelques erreurs dans le dessin et une fin mal ficelée, on se laisse prendre par cette belle histoire basée sur le pardon; un drame à l’ambiance lourde et pesante.

Avec La valeur de ma vie, les éditions Akata continuent de tracer son sillon – très original – dans le genre shôjo. Ici l’histoire ne se déroulera pas sur plusieurs tomes mais un seul. Audacieuses dans ses choix dans ce genre manga, elles publient autre chose que des histoires romantiques sans intérêt mais mises sur des récits à portée plus profonde Pour ce nouveau label, Akata veut mettre en lumière des histoires imaginés par des auteures majeures ou en devenir.

  • La valeur de ma vie
  • Auteure : Yoshimi Tôda
  • Editeur : Akata, collection M, one-shot
  • Prix : 6.95€
  • Parution : 09 février 2017

Résumé de l’éditeur : Yuri rentre au lycée… Mais contrairement à d’autres, ce n’est pas le coeur léger qu’elle envisage les dernières années de sa vie d’adolescente. Ex-voyou, elle semble porter en elle le poids d’une mystérieuse culpabilité. Ce n’est pas pour rien, d’ailleurs, qu’elle a perdu une partie de la mobilité de son bras droit. Chio, un garçon du lycée, commence à lui tourner autour… Mais Yuri n’est pas disponible pour l’amour. Son leitmotiv reste inchangé : lors de ses années lycée, tout ce qu’elle souhaite, c’est « prouver la valeur de sa vie ». Pourquoi ? Et pour qui ?

La structure est pourrie camarade

Notre avis : Un professeur arménien conte Erevan, son architecture et ses souvenirs de jeunesse dans La structure est pourrie camarade, un bel album de Viken Berberian et Yann Kebbi aux éditions Actes Sud BD.

Erevan, Arménie, de nos jours. Frunzik Zakoyan, architecte et professeur reconnu, se promène avec ses étudiants au cœur de la ville. En pleine mutation de structure, d’immeubles et d’architecture, la capitale arménienne est un parfait exemple du mélange de style soviétique et d’un style plus moderne venu des Etats-Unis.

En marchant, il leur parle donc des immeubles qui l’entourent mais aussi de son passé, de son enfance. Frunzik est le fils de Sergei, surnommé aussi Monsieur Ciment, puisqu’il a dirigé une grande société de cimenterie et fut aussi directeur du Radical Architecture Department (RAD), un génie incompris à son époque. Sa mère était Française.

D’ailleurs, Frunzik a étudié en France plusieurs années et a suivi les cours de Le Corbusier ou Louis Kahn. Il s’inspira de ses illustres prédécesseurs pour créer son propre univers. De son côté, son père a beaucoup rasé, cassé et reconstruit pour faire entrer son pays dans plus de modernité.

Viken Berberian, romancier (Das Kapital, Le cycliste) est né dans une famille arménienne. Après des études en Grand-Bretagne, il devient analyste financier et journaliste, il habite quelques temps en France et enfin a emménagé à Erevan. Fin connaisseur de ce petit pays francophile et très francophone, il brosse le portrait de l’Arménie mais aussi des ex-pays soviétiques qui veulent s’affranchir du diktat de Moscou. Il parle de l’Art, de l’architecture, toujours en mouvement, qui est influencé par le monde, la nature et qui s’auto-influence aussi.

Cet album empli d’humour est admirablement mis en image par Yann Kebbi. Après une première collaboration autour d’une nouvelle pour le magazine Dorade, le scénariste a décidé de nouveau à faire appel au dessinateur français. Diplômé de l’Ecole Estienne et des Arts décoratifs à Paris, l’illustrateur donne à voir dans ses très belles planches de La structure est pourrie camarade. Avec ses crayons de couleur, il réalise des pages où il n’y a pas de vignettes ni cadre. Ses grandes illustrations déstructurées sont d’une grande force graphique.

  • La structure est pourrie camarade
  • Scénariste : Viken Berberian
  • Dessinateur : Yann Kebbi
  • Editeur : Actes Sud BD
  • Prix : 26€
  • Parution : 31 janvier 2017

Résumé de l’éditeur : Au coeur de la capitale arménienne et de cette révolution architecturale, Yann Kebbi, et l’énergie monumentale de son trait, associé à l’humour absurde de l’écrivain Viken Berberian, dessine un portrait grotesque et terriblement réaliste de notre monde. «Il faut tout reconstruire, terminés les vieux immeubles historiques, place au renouveau !»

Shit is real

Notre avis : Après l’excellent Brigitte et la perle cachée, Aisha Franz imagine Shit is real, une histoire entre science-fiction, réalité et rêve, publiée par L’employé du moi.

Selma ne sait plus du tout où elle en est : elle déprime depuis qu’elle a perdu son travail et que Max, son compagnon, l’a larguée. Après quelques temps troublés, elle se dit que c’est peut être un moment pour se relancer. Surtout que Yumi, sa meilleure amie, ne l’écoute pas vraiment lorsqu’elle se confie, plus empressée à vivre son nouvel amour naissant.

Elle découvre alors une carte magnétique qui lui permet d’ouvrir la porte de chez sa voisine. Une aubaine pour Selma qui jusqu’à présent l’observait à trouver le trou dans son mur. Elle peut maintenant découvrir encore mieux la vie de cette jeune femme très fashion qui passe son temps à faire le tour du monde.

Elle se rapproche aussi de Anders, un vendeur d’animalerie dont elle tombe amoureuse. Mais, il disparaît mystérieusement. A-t-il vraiment existé ?

Dans un Berlin du futur hyper-connecté, le personnage principal de Aisha Franz se fourvoie, bouge et se perd. Son très bon récit de science-fiction est un mélange subtil de romance (parfois évanescente), le rêve et la réalité. Ses cauchemars se confondent alors avec ses rêves, quitte à angoisser le lecteur. Il faut souligner que Selma est dans un état psychologique très troublé, en quasi dépression. Afin de ménager des espaces de respiration, l’auteure de Petite terrienne (çà et là), apporte néanmoins un peu d’humour.

A travers ses 188 pages, Aisha Franz dévoile une histoire originale mais parfois troublante. Son dessin à la mine de plomb est d’une belle force graphique.

  • Shit is real
  • Auteure : Aisha Franz
  • Editeur : L’employé du moi
  • Prix : 21.50€
  • Parution : 07 février 2017

Résumé de l’éditeur : Tout commence lorsque Selma se fait mettre à la porte par Max, son compagnon. Elle se retrouve alors seule, sans emploi, aux prises avec son quotidien dans son nouvel appartement. C’est peut-être pour elle l’occasion de prendre un nouveau départ. L’intrigue se déroule dans un Berlin futuriste, excentrique et absurde où la technologie et les phénomènes de mode ostentatoires et excessifs mènent la danse. Son entourage ne déroge pas à la règle ; même Yumi, sa meilleure amie, la snobe et lui préfère les frivolités de la vie mondaine. Cette superficialité l’oppresse, elle se sent aliénée par la civilisation et finit donc par être gagnée par la mélancolie. Machinalement, dans ses rêves, elle s’échappe vers un mystérieux désert. Tout devient prétexte à l’évasion : un poisson dans un aquarium ou bien le trou dans le mur qui donne chez le voisin. Par la suite, Selma s’entiche d’Anders, le gérant d’une animalerie pour le moins ennuyeux. Mais ce dernier disparaît inexplicablement après leur premier rendez-vous. A-t-il vraiment existé ? Shit is real est un étrange récit qui mélange romance et science-fiction, fantasmagorie et réalité, imaginaire avant-gardiste et mine de plomb. Aïsha Franz décrit dans ce livre une crise d’identité, un mal contemporain que les habitants des grandes métropoles connaissent bien. Après Petite Terrienne en 2012 et Brigitte en 2013 (aux éditions Çà et Là), Shit is real est le troisième ouvrage traduit en français de l’auteure berlinoise qui avait plus récemment participé au collectif Échos à L’employé du Moi.