Jones et autres rêves

Quelle riche idée ont eu les éditions Ici même de publier en recueil les récits surprenants de M. Jones signés Franco Matticchio intitulé Jones et autres rêves.

A travers 256 pages, le lecteur apprend à connaître M. Jones, un chat qui n’en n’est pas un, un étrange animal anthropomorphe affublé d’un bandeau noir sur l’oeil gauche qui rêve, réfléchit et philosophe comme aucun être humain.

Franco Matticchio son créateur est un auteur italien qui a déjà publié des albums en France (La trilogie de Monsieur Ahi et Sans sens). Il anime M. Jones depuis 1985, qu’il a créé dans la revue Linus, célèbre magazine fondé par Giovanni Gandini où l’on pouvait lire des récits de la femme assise de Copi, Pogo de Walt Kelly ou Krazy Kat de George Herriman.

Comme le souligne Giancarlo Ascari dans la préface de M. Jones et autres rêves, les hachures serrées et les histoires de Franco Matticchio sont les dignes descendantes de Roland Topor, de la Famille Adams, du Fritz the cat de Robert Crumb ou des silencieux barbus de Edward Gorey.

Les récits de M. Jones sont à la fois fantasques, étonnants, fantastiques, oniriques mais surtout énigmatiques. Avec énormément d’habileté, de justesse dans la narration et le découpage, l’auteur livre des histoires drôles et parfois cyniques. Tout est sujet au décalage !

Si vous souhaitez passer un moment – comme une parenthèse étonnante – de lecture singulière, une expérience marquante, précipitez-vous sur Jones et autres rêves, un génial album de Franco Matticchio.

A noter qu’une exposition des planches de M. Jones sont visibles à la Galerie Martel jusqu’au 13 janvier 2018 !

  • Jones et autres rêves
  • Auteur : Franco Matticchio
  • Editeur : Ici Même
  • Prix : 29€
  • Parution : 10 novembre 2017
  • IBAN : 9782369120384

Résumé de l’éditeur : « Sérieux et espiègle, surréaliste et philosophique ». Voici comment Art Spiegelman décrit le travail de Matticchio. Ses bandes dessinées et ses illustrations, drôles et énigmatiques, poétiques et fantastiques, sombres et souvent ironiques, ont valu à Matticchio de devenir un auteur culte. L’un de ses personnages les plus célèbres est un chat au bandeau sur l’oeil, nommé Jones. Ses aventures surréalistes et captivantes – décrites par leur auteur comme à mi-chemin entre Walt Disney et Samuel Beckett – sont ici compilées pour la première fois, dans ce beau recueil de 256 pages intitulé Jones et autres rêves. À la sortie du livre, une exposition inédite à la Galerie Martel !

La cuisine japonaise sans sushi ou presque

Non en cuisine japonaise, il n’y pas que les sushis ! Pour découvrir d’autres plats, condiments ou desserts, et pouvoir les préparer soit même, plongez-vous dans La cuisine japonaise sans sushi ou presque, un très beau coffret signé Stéphane Chapuy et Julie Blanchin Fujita.

A chaque fois que l’on évoque la cuisine japonaise, on pense tout de suite aux sushis et au wazabi, pourtant cet univers est beaucoup plus varié et intéressant que ces deux premières notions. Après avoir ouvert le coffret translucide, le lecteur / futur cuisinier va pouvoir découvrir 33 recettes originales, plutôt simples et appétissantes, sous la forme de mini-chevalets très pratiques.

Tous les plats sont regroupés sous des thématiques culturelles japonaises élargies, tels que le sumo ou les geishas (au dos des fiches, ce qui permet d’enrichir sa vision du Japon). Pour que ce coffret puisse convenir à tout le monde, il y a notamment des recettes pour les « débutants » mais aussi plus élaborées pour les « spécialistes ».  Pour chacune d’elle, on y trouve forcément les ingrédients, le matériel, le déroulé et le plat final, le tout sans photographie mais illustré par le trait sympathique et chaleureux de Julie Blanchin Fujita, autrice de J’aime le Nattô chez Hikari Editions.

La cuisine japonaise sans sushi ou presque : un superbe coffret très original et très pratique de recettes de mets japonais à s’offrir ou à offrir aux amoureux de la cuisine, du Japon ou de la cuisine japonaise pour Noël ! 良い食欲

  • La cuisine japonaise sans sushi… ou presque
  • Textes : Stéphane Chapuy
  • Dessinatrice : Julie Blanchin Fujita
  • Editeur : Kana
  • Parution : 27 octobre 2017
  • Prix : 14.95€
  • ISBN : 9782505069454

Résumé de l’éditeur : Ce coffret va vous permettre de découvrir qu’il y a une vie gastronomique après les sushis, en vous proposant d’élargir et d’approfondir votre connaissance de la cuisine japonaise, traditionnelle et moderne, de manière pratique et ludique. Vous allez concilier plaisirs de la table et culture générale à travers 12 plats thématiques et simples à confectionner : cuisine de sumo, de salaryman, de samouraï, d’otaku, de fan de mangas, de yakuza, de ninja, de geisha, de lolita, déjeuner sur le pouce, régime d’Okinawa. Enfin, il vous révélera les secrets des différents types d’accompagnements qui composent un repas japonais digne de ce nom : soupes, salades, amuse-bouches, ainsi que l’utilisation des condiments de base qui vous feront apprécier de nouvelles saveurs jusque-là insoupçonnées et qui « japoniseront » un peu plus votre quotidien.

Plus près de toi, première partie

Plus près de toi est une histoire imaginée par Kris et mis en image par Jean-Claude Fournier sur la thématique des tirailleurs sénégalais pendant la Seconde Guerre Mondiale.

Dakar, Sénagal, 1939. Jeune séminariste, Addi prépare sa prêtrise. Alors que la Seconde Guerre Mondiale débute, son père l’enjoint de rejoindre l’armée française comme lui le fit en 1914. Sans vraiment être d’accord avec lui, ce fils unique obéit à son géniteur.

Il se retrouve comme d’autres habitants des 4 communes dans un camp pour « apprendre le métier ». Il se fait rapidement remarquer parce que lettré. Il devient alors officier et embarque sur un navire direction la Métropole, le cœur léger, ne sachant pas vraiment ce qu’il l’attend…

A l’image du magnifique album de Alain Bujak et Piero Macola chez Futuropolis, Le tirailleur, qui mettait en scène un vieux marocain ancien tirailleur devant prouver son identité pour toucher sa solde, Plus près de toi s’intéresse à Addi jeune Sénégalais happé par la Seconde Guerre Mondiale. Peu développé en bande dessinée, cette thématique est pourtant éminemment importante dans l’histoire de notre pays. De plus, il faut souligner qu’il ne reste que très peu de ces anciens combattants encore en vie et que leur existence – s’ils ne mourraient pas – était des plus dure après le conflit comme a pu le montrer l’album cité ci-dessus ou le long métrage de Rachid Bouchareb, Indigènes.

Kris est un scénariste qui a l’Histoire chevillé au corps (Nuit noire sur Brest, Notre mère la guerre ou Un maillot pour l’Algérie) et encore une fois, il livre un récit historique de grande valeur. S’appuyant sur de nombreux documents (voir son Instagram), il imagine une belle histoire d’amour bouleversante, faisant douter le jeune Addi dans ses convictions religieuses.

Au-delà de cette belle romance entre une institutrice et un soldat africain, il y a aussi la thématique de la réhabilitation de ces soldats ayant œuvré pour la patrie française. Si les historiens (Benjamin Stora avec Histoire dessinée de la Guerre d’Algérie ou Pascal Blanchard, notamment) se penchent depuis quelques dizaine d’années sur ces faits, l’opinion est encore loin de l’accepter.

Plus près de toi est magnifiquement mis en image par Jean-Claude Fournier. Le trait de l’auteur de Bizu tranche avec le propos parfois très sombre du récit. Un pari plus que réussi pour cette fresque en deux volumes.

  • Plus près de toi, première partie
  • Scénariste : Kris
  • Dessinateur : Jean-Claude Fournier
  • Editeur : Dupuis, Aire Libre
  • Parution : 06 octobre 2017
  • Prix : 14.50€
  • ISBN : 9782800163000

Résumé de l’éditeur : Lorsque la Seconde Guerre mondiale est déclarée, nombreux sont les hommes valides à être dépêchés en urgence pour servir la France ; parmi eux, Addi, séminariste sur le point de rentrer dans les ordres à Dakar. Contraint d’échanger sa robe contre l’uniforme militaire, le jeune Français sénégalais se confrontera à un tout autre monde, un champ de bataille où les hommes s’exécutent sans concession et où la moindre marque de douceur est une rareté. Aux côtés de son ami Ibrahim, Addi sera fait prisonnier, échappera à la mort, développera un réseau d’entraide pour les minorités étrangères. Et rencontrera l’amour en la personne de Jeanne, une institutrice. Mais les sentiments terrestres sont-ils compatibles avec les voeux religieux ? Peut-on oublier Dieu et la guerre dans les yeux d’une femme ? Récit de guerre, histoire d’amour, Plus près de toi dépeint des instants de grâce au coeur des grands conflits européens de la moitié du XXe siècle. Cette histoire à la sensibilité rare, qui confronte l’horreur à la religion et la violence aux sentiments, est douée d’une force remarquable.

Sérum

Un produit qui empêche de mentir est injecté à Kader afin de le rendre plus docile, depuis qu’il a été séparé de sa femme et de sa fille. Cyril Pedrosa et Nicolas Gaignard dévoilent Sérum, une thriller psychologique aux éditions Delcourt.

Cyril Pedrosa est un auteur que nous apprécions particulièrement à Comixtrip. Après les merveilleux Trois Ombres, Portugal, Auto-bio ou Equinoxes, il imagine un formidable scénario mis en image par Nicolas Gaignard.

Relations conflictuelles dans son ancien couple, éloignement de sa fille, rendez-vous chez la psychologue et travail peu valorisant sont les particularités de la vie de Kader. Afin de contenir ses excès, un produit lui est régulièrement injecté, le rendant très (trop?) zen et l’empêchant de mentir ; délicat lorsque l’on doit ne pas froisser les autres.

Si cette histoire très intimiste est très juste dans le ton, Cyril Pedrosa la rend encore plus accrocheuse par la toile de fond qu’il y imprime. Très politique (dans un futur très proche), cette dystopie plait parce que le gouvernement restreint les libertés individuelles et que la colère commence à grandir chez les citoyens.

Sérum bénéficie d’un dessin de très grande qualité de Nicolas Gaignard dont c’est le premier album. Ayant fait ses armes dans le graphisme, il a aussi publié des récits courts dans Fluide Glacial ou Alimentation Générale. Ses planches au trait réaliste sont glaçantes de justesse. Par l’expression des visages de ses personnages et ses couleurs très froides, il renforce l’ambiance thriller du récit. Excellent !

  • Sérum
  • Scénariste : Cyril Pedrosa
  • Dessinateur : Nicolas Gaignard
  • Editeur : Delcourt, collection Hors Collection
  • Parution : 18 octobre 2017
  • Prix : 18.95€
  • ISBN : 9782756065915

Résumé de l’éditeur : Un homme condamné à dire la vérité peut-il encore vivre ? Cyril Pedrosa signe un scénario taillé sur mesure pour l’élégance du trait de Nicolas Gaignard. Ensemble, ils donnent corps à un surprenant récit d’anticipation politique. Paris, 2050. Depuis les purges qui ont suivi le changement de régime, les tensions sont loin d’être apaisées. Une organisation clandestine semble préparer une action spectaculaire. Reclus dans son minuscule appartement, Kader vit seul. Il ne parle à personne. Une injection de « Sérum », un produit psychoactif, l’empêche de mentir. Qu’il le veuille ou non, il ne peut dire que la vérité. Rien que la vérité. Toute la vérité. Cette malédiction fait de sa vie un enfer.

La fleur dans l’atelier de Mondrian

Jean-Philippe Peyraud et Antonio Lapone dévoilent La fleur dans l’atelier de Mondrian, une tranche de la vie parisienne du célèbre peintre.

Depuis que sa compagne est décédée, Piet Mondrian a beaucoup de mal à s’en remettre. Amsterdam et son pays natal ne l’intéressent plus, il préfère retourner à Paris, ville des Arts. Comme tous les mercredis, le peintre achète ses toiles prêtes à l’emploi chez Lucien Lefebvre-Foinet. Pourtant pour l’instant, le déclic n’arrive pas vraiment.

Il rencontre un belle jeune femme, elle aussi veuve, qui l’attire beaucoup. Ensemble, ils dansent dans des night clubs de la capitale. Pourtant, Piet est toujours bloqué par son inhibition vis-à-vis des femmes…

C’est une photographie qui est à l’origine de cet album ! Jean-Philippe Peyraud et Antonio Lapone possèdent ce même cliché qu’ils ont accroché au-dessus de leur table à dessin ! Etonnant hasard, ils décident de raconter l’histoire de cette fleur en plastique qui orne la photographie, prétexte à découvrir la vie de Piet Mondrian.

L’un des précurseurs de l’art abstrait par ses bandes verticales et horizontales alternant le blanc et les couleurs, ce peintre eu aussi une vie étonnante quasi romanesque (comme souvent bon nombre de créateurs et artistes). Si son œuvre est très connue, lui-même ne l’est pas. Très bon danseur, il aimait à passer ses nuits dans des night clubs où l’on s’enivrait et on se remuait jusqu’au petit matin. Cette époque des années-folles, de l’entre deux guerres, voulait que les femmes et les hommes se reconstruisent après la folie meurtrière de la Grande Guerre. Paris devint ainsi le lieu de toutes les cultures et de tous les arts.

Sous le trait du dessinateur italien, le lecteur découvre un être encore très marqué par le décès de sa femme et un artiste que ne veut encore rien dévoiler de son œuvre. Jean-Philippe Peyraud (L’inversion de la courbe des sentiments) et Antonio Lapone (Greenwich Village) réalisent un très bel album, rendant hommage à Mondrian. Poésie, danse entêtante et peinture sont au cœur de ce récit magnifiquement mis en image par Lapone. Dans les pas de Serge Clerc, Yves Chaland ou Torres, il envoute son lectorat par une ligne claire qui sied à merveille pour rendre beau le travail géométrique de Mondrian.

  • La fleur dans l’atelier de Mondrian
  • Scénariste : Jean-Philippe Peyraud
  • Dessinateur : Antonio Lapone
  • Editeur : Glénat, collection Les grands peintres
  • Parution : 29 novembre 2017
  • Prix : 19.50€
  • ISBN : 9782344008256

Résumé de l’éditeur : Une évocation sublime d’une figure majeure de l’art abstrait. À l’origine, il y avait cette même photo que Jean-Philippe Peyraud et Antonio Lapone avaient au-dessus de leur table à dessin. Celle d’une fleur en plastique dans l’atelier de Mondrian, seul rappel du végétal dans l’univers à la géométrie implacable du peintre. C’est l’histoire de cette fleur que les auteurs ont décidé d’imaginer pour raconter Mondrian, figure majeure de l’art abstrait, dont on connaît peu de choses, si ce n’est qu’il vivait au coeur du Montparnasse des années folles et qu’il était un inconditionnel de la danse de salon… La Fleur dans l’atelier de Mondrian est autant une évocation subtile de l’art abstrait qu’un magnifique album au format hors normes (enrichi de 40 pages d’études, de crayonnés et de story-board), servi par le graphisme élégant d’Antonio Lapone et le scénario d’une incroyable poésie de Jean-Philippe Peyraud.

Balzac et la petite tailleuse chinoise

Freddy Nadolny Poustochkine adapte le roman de Dai Sijie, Balzac et la petite tailleuse chinoise aux éditions Futuropolis.

Premier roman de Dai Sijie, Balzac et la petite tailleuse chinoise fut un succès éditorial international, contant ses souvenirs d’enfance dans la Chine de Mao Zedong. Né en 1954, il fut incarcéré dans un camp du Sichuan pour être rééduqué à l’âge de 17 ans. Pendant trois années, il vivra dans des conditions inhumaines. L’auteur habite la France depuis 1984 et réalisera lui-même l’adaptation en long métrage de son ouvrage en 2012.

Attiré par les récits asiatiques, Freddy Nadolny Poustochkine adapte avec beaucoup d’élégance et de pureté le livre de Dai Sijie. L’auteur de La colline empoisonnée (Futuropolis, 2010) suit fidèlement le récit très intimiste de l’auteur chinois. Placé en camp de rééducation dans les années 70, le jeune garçon ne vit que pour travailler au fond de la mine, un endroit sombre et humide. Avec son amie, ils découvrent une valise remplie de livres. Pour lui, l’adolescent lettré, cela est une aubaine, cela lui permet de s’évader et de tenir. Violoniste, son éducation lui permet de tenir tête aux plus durs du camp.

Avec cet album, Freddy Nadolny Poustochkine dévoile tout son talent de conteur. Cette histoire entre rêve et réalité, entre dureté du camp et découverte de son corps, il la magnifie par des planches subtiles et élégantes.

  • Balzac et la petite tailleuse chinoise
  • Auteur : Freddy Nadolny Poustochkine, d’après le roman de Dai Sijie
  • Editeur : Futuropolis
  • Prix : 32€
  • Parution : 12 octobre 2017
  • IBAN : 9782754811330

Résumé de l’éditeur : Deux amis de 17 et 18 ans, le narrateur et son ami Luo, qui se connaissent depuis l’enfance, sont envoyés en rééducation dans la province du Sichuan, car ils sont considérés comme des « intellectuels ». Nous sommes en pleine période de la Révolution culturelle lancée par Mao Zedong, en 1971. Le narrateur est plutôt réservé et joue du violon. Luo, son meilleur ami, était son voisin de palier avant leur départ pour la rééducation. Il est beaucoup moins timide, il est même un bon conteur. Il raconte toutes sortes d’histoires au chef du village, et surtout les films que ce dernier leur demande d’aller voir en ville. Les deux amis rencontrent la fille du tailleur du village voisin. Elle est considérée comme la plus belle de la montagne, pleine de vie, mais sans aucune instruction. Tous deux en tombent immédiatement amoureux. Luo devient l’amant de la petite tailleuse. Pour service rendu, le Binoclard, un autre garçon lui aussi en rééducation dans un village voisin, prête aux deux amis Ursule Mirouët, un roman de Balzac. Fascinés, les deux amis volent toute la valise de livres interdits du Binoclard, valise contenant les romans des plus grands auteurs occidentaux du XIXe siècle. Luo fait alors un serment : « Avec ces livres, je transformerai la Petite Tailleuse. Elle ne sera plus jamais une simple montagnarde ».

Lolonoa, tome 1

Au XVIIe siècle, François l’Olonnois prend possession d’une frégate espagnole. Fanny Lesaint dévoile les aventures de ce pirate dans Lolonoa, un album Beaupré.

Vers 1650. Jeune terre-neuva qui doit embarquer sur un navire, François est une petite main, corvéable à merci mais épris de liberté et de l’appel du large. Pourtant, il ne se laisse pas faire face aux colosses marins du bateau et décide même de ne pas faire le voyage avec ces quelques hommes détestables.

Après quelques jours d’errance, il réussit à se faire embaucher sur L’Aurore par le capitaine du bateau. Pendant le trajet, il s’avère être polyvalent et plus habile que les vieux loups de mer, ce qui ne leur plait forcément pas trop…

François l’Olonnois, pirate authentique, fut découvert par Steinbeck et Voltaire par les écrits de son biographe principal Exquemelin. C’est cette figure très connue dans le monde de la piraterie que Fanny Lesaint a décidé de faire découvrir au plus grand nombre à travers Lolonoa (son surnom donné par les Indiens des Caraïbes). Prévue en trois tomes, cette saga d’aventures tient ses promesses : embarquer le lecteur vers le large et vers les terres inconnues, en découvrant les nombreux dangers en mer (le temps et les flibustiers).

Originaire des Sables d’Olonnes, François aura eu une belle vie romanesque en seulement 39 ans, se faisant décapiter par des Indiens (les premières pages de l’album s’ouvrent sur cette événement tragique, donc nous ne vous gâchons pas l’intrigue).

La lauréate du Prix Charette en 2014 pour son album Victorine imprime une belle modernité dans ce récit par des planches très vivantes. Les visages de ses personnages sont géométriques et ses couleurs numériques très belles. Une belle réussite pour ce premier volume prometteur !

  • Lolonoa, journal d’un pirate des Caraïbes, 1/3
  • Autrice : Fanny Lesaint
  • Editeur : Beaupré
  • Prix : 14€
  • Parution : 25 octobre 2017
  • IBAN : 9782919154241

Résumé de l’éditeur : Caraïbes, 1660. Parti de l’île de la Tortue à la tête d’un groupe de flibustiers, François d’Olonnais s’empare d’une frégate espagnole. Le début d’une folle épopée.

En attendant l’apocalypse

Les éditions Tanibis poursuivent la publication de l’œuvre de Paul Kirchner avec En attendant l’apocalypse, une anthologie de ses plus beaux travaux édités entre 1974 et 2014.

Comme il l’explique dans la postface, Paul Kirchner a choisi les récits de ce recueil lui rendant hommage en collaboration avec Claude Aumager et les éditions Tanibis. Ce qu’il considère comme le meilleur de ses illustrations va plaire aux amateurs de récits très psychédéliques comme ceux publiés dans les années 70-80. De la folie, des mélanges détonants, des histoires décalées et un dessin de haut-vol.

La plupart de ces travaux ont été réalisés entre 1974 et 1981 faisant les beaux jours des revues de la contre-culture américaine. A la croisée de Mad, de Raw et des travaux d’auteurs de Métal Hurlant (Moebius, Druillet ou Caza), ces 152 pages fascinent et repoussent parfois aussi les lecteurs. Mais c’est cette ambivalence qui plaît dans En attendant l’apocalypse !

Dans la première partie du recueil, le lecteur découvre douze histoires de Dope Rider – qui avaient été prépubliées dans High Times – cavalier squelette en quête de drogue dans un monde western post-apocalyptique. Les récits complètement décalés et surréalistes sont lovés dans un univers psychédélique étonnant entre sexe, baston, cow-boys, indiens et soldats américains.

La deuxième partie du recueil met en lumière des histoires d’invasion d’aliens mais aussi des récits plus sexy, entrecoupés de plusieurs dizaines de couvertures de Paul Kirchner pour le magazine Screw.

Après la publication de Le bus, deux ouvrages de Kirchner, les éditions Tanibis ont eu la riche idée d’éditer une anthologie de ce même auteur. Pas simple d’accès au premier abord, cet album n’est pas à glisser entre toutes les mains. Il reste néanmoins un excellent travail d’éditeur pour (re)découvrir cet auteur de l’univers underground américain.

  • En attendant l’apocalypse
  • Auteur : Paul Kirchner
  • Editeur : Tanibis
  • Prix : 24€
  • Parution : 09 octobre 2017
  • IBAN : 9782848410432

Résumé de l’éditeur : Après avoir remis le bus de Paul Kirchner en orbite avec deux volumes publiés en 2012 et 2015, Tanibis poursuit son exploration des mondes divergents de l’auteur américain à travers une anthologie rassemblant des récits courts et illustrations réalisés dans les années 70 et 80 pour divers magazines emblématiques de la contre-culture, ainsi que d’autres travaux plus récents, parfois inédits. On y croise Dope Rider, sac d’os défoncé poursuivant des quêtes improbables dans un univers psychédélique que l’on pourrait situer entre les westerns de Sergio Leone et les tableaux de Salvador Dalí. Alternant non sequiturs et logique floue, les aventures de Dope Rider, publiées en leur temps dans le magazine High Times, sont également pour l’auteur une façon de s’essayer à une forme singulière de poésie graphique. Dans une même veine subversive, l’ouvrage reprend également une sélection d’histoires où il est question d’invasion sextraterrestre, de voyages spirituels vers des mondes shamaniques, d’univers totalitaires inspirés de la société des abeilles ou encore, littéralement, de l’Apocalypse biblique. Enfin, En attendant l’Apocalypse rassemble une bonne partie des couvertures réalisées par Kirchner pour le magazine pornographique Screw. On y retrouve son trait précis et son goût pour l’humour et le surréalisme.

The monkey family

Album paru au début de l’année 2017 – que nous avions laissé passé – The monkey family est une très jolie histoire Jeunesse signée Margo Renard aux éditions La Palissade.

Dans un petit village de Singes au cœur d’une forêt. Le Banana Festival va bientôt avoir lieu, mais Ba n’en peut plus de manger des bananes. A toutes les sauces et dans tous les plats, les singes en raffolent et lui de moins en moins. Il aimerait de la variété, de la nouveauté.

Alors qu’il boude, arrive Haï qui lui fait goûter une banane de terre (un ananas) qu’il a trouvé dans la Forêt Interdite. Trouvant cela excellent, Ba décide d’aller en chercher d’autres dans cet endroit de tous les dangers. Pour cela, il demande à Haï et Moh de l’accompagner…

Jeune autrice, Margo Renard a étudié à l’école Emile Cohl.  The monkey family est la première bande dessinée qu’elle réalise. Elle imagine une très jolie aventure avec des Singes un peu espiègles mais très drôles. Alors qu’ils se mettaient en route pour trouver ces fameuses bananes de terre, les petits animaux vont être aux prises avec les dangers de la forêt ; leur aventure se transformant alors en une belle quête initiatique.

Margo Renard utilise des animaux anthropomorphes pour relater son histoire, des êtres vivants idéaux pour que les jeunes lecteurs s’identifient facilement à eux.

Si le récit est rythmé et accrocheur, la partie graphique est très alléchante. Les planches vivantes de l’autrice sont agrémentées d’aquarelles très réussies. Les couleurs chaudes très attirantes font ressortir le grain du papier donnant un cachet très fort au dessin.

Après Cache-cache de Terkel Risbjerg, les éditions La Palissade publient The monkey family, une histoire sympathique, drôle et intelligente.

  • The monkey family
  • Autrice : Margo Renard
  • Editeur : La Palissade
  • Prix : 14.50€
  • Parution : 26 janvier 2017
  • IBAN : 9791091330336

Résumé de l’éditeur : Dans la Monkey Family, tout le monde raffole des bananes. Tous sauf Ba?! Avec Moh et Haï, ils décident d’en finir avec ce régime unique. La 10422 ème fête de la banane, est l’occasion rêvée pour faire découvrir au village leurs recettes concoctées avec les nouveaux fruits découverts par Haï dans la Forêt Interdite. Mais leur plan ne va pas du tout se dérouler comme prévu. Bannis du village, ils devront partir à l’aventure à la rencontre d’autres animaux dangereux et imprévisibles. Personnage principal : Ba, Moh et Haï, trois petits singes insolents et débrouillards.

Le partisan

Fondé sur l’histoire du grand-père de Maurizio A. C. Quarello, Le Partisan est un très joli récit muet aux éditions des Elephants.

Maurizi Damarco vit avec sa femme dans un village montagnard italien. Depuis le début de la Seconde Guerre Mondiale, l’homme s’est toujours tenu droit devant les fascistes italiens ou les soldats allemands. Alors que le conflit touche presque à sa fin, il décide même de rejoindre la résistance.

En pleine nuit avec l’aide de camarades, il fait arrêter un camion de miliciens, les tuant. Blessé au bras, il regagne au petit matin son foyer. Arrivent alors deux soldats italiens à la recherche des résistants coupables du méfait. Il se cache dans le grenier, sa femme s’occupant de détourner le regard des deux hommes…

Le partisan est un très bel hommage d’un petit-fils à ses grands-parents. En choisissant de rendre muet le récit, Maurizio A. C. Quarello lui imprime plus de vie mais aussi plus de violence. L’histoire relate les derniers moments du conflit dans une Italie en guerre mais déjà plus vraiment fasciste. (Le duce Mussolini ayant quitté Rome pour tenter de gouverner à Salo).

A la tête d’une trentaine d’albums depuis 2015 (notamment L’appel de la forêt chez Sarbacane ou Le dernier voyage aux éditions des Elephants), l’auteur livre un récit simple, fort et poignant.

Proche du trait de Jean-Pierre Gibrat, ses planches à l’aquarelle restituent admirablement l’ambiance sombre du début de l’album puis plus enjoué à la fin de l’album (il y ajoute des teintes plus vives).

Le partisan : un beau récit sans texte sur la résistance au fascisme italien ; un bel hommage à ses femmes et ses hommes et plus particulièrement au grand-père de Maurizio A. C. Quarello.

  • Le partisan
  • Auteur : Maurizio A. C. Quarello
  • Editeur : Les éditions des éléphants
  • Prix : 18€
  • Parution : 19 octobre 2017
  • IBAN : 9782372730426

Résumé de l’éditeur : Dans une bande dessinée muette et saisissante, nous vivons un moment charnière de l’histoire italienne, les derniers jours de la Seconde Guerre mondiale, aux côtés d’un homme, le grand-père de l’auteur, qui choisit de rejoindre le maquis, et de son épouse, qui fait face aux soldats allemands. Des embuscades dressées par les partisans aux rafles effectuées par les fascistes et les nazis, jusqu’à la Libération au printemps 1945, cet ouvrage est un bel hommage de Maurizio Quarello à ses grands-parents, aux valeurs qu’ils lui ont transmises, et à la résistance.

Fante Bukowski, volume 2

Après un premier volume qui avait enchanté la critique, Noah Van Sciver dévoile le deuxième opus de Fante Bukowski, son écrivain qui n’a encore rien publié.

Colombus dans l’Ohio. Fante Bukowski a décidé de se retirer loin de chez lui pour pouvoir enfin produire en paix. Pour cela, il loue une chambre miteuse dans un motel qui ne l’est pas moins. Le patron de l’établissement ne veut pas de problème avec ses clients et donc le met en garde.

Lui de toute façon, il veut écrire, pensant être le plus grand écrivain contemporain vivant. Si aucun éditeur n’a retenu ses textes, lui est persuadé, il est le meilleur. En attendant, il se rend à une nuit de la poésie où il tente de faire connaître son talent…

Encore un volume de grand valeur avec ce Fante Bukowski. Noah Van Sciver, auteur reconnu dans le monde de la bande dessinée indépendante américaine, poursuit la quête de réussite de son personnage principal.

Avec une grand justesse d’observation, il dépeint cette Amérique des petites gens, l’Amérique profonde des villes moyennes, celle très actuelle des années 2010. Colombus dans l’Ohio, les motels déclassés, les prostituées et la recherche incessante de la réussite dans un pays où le capitalisme est érigé en Dieu tout puissant, laissant de côté des millions d’anonymes.

Si Fante Bukowski a un ego surdimensionné, véritable tête à claques, il peut parfois faire preuve d’humanité. En effet, Kelly Perkins de son vrai nom s’identifie à John Fante et Charles Bukowski, rien que ça ! Dans ce volume, il lui est aussi difficile d’accepter le succès de Audrey, son ex-copine qui vient de publier un livre.

Fante Bukowski : un deuxième volume intelligent et accrocheur de cet écrivain maudit dans une Amérique qui laisse de côté les plus pauvres. Porté par un récit d’une grande valeur narrative, Fante Bukowski enchante aussi par une partie graphique forte et efficace.

  • Fante Bukowski, volume 2
  • Auteur : Noah Van Sciver
  • Editeur : L’employé du  moi
  • Prix : 17€
  • Parution : 13 octobre 2017
  • IBAN : 9782390040354

Résumé de l’éditeur : Une année s’est écoulée depuis que nous avons quitté Fante Bukowski. Il lutte toujours pour faire reconnaître son travail d’écrivain auprès des élites littéraires. À ce jour, il n’a toujours pas été publié, ce qui ne l’empêche pas de fantasmer son futur succès. Dans ce second volume, il se veut poète. Orgueilleux et arrogant, il n’est pas du genre à remettre en cause ses capacités et las d’essuyer les refus des éditeurs qui ne comprennent rien à rien, il décide de s’autopublier. Alors qu’il s’échine laborieusement à essayer de vendre les 20 000 exemplaires de son fanzine de 8 pages, Audrey, son ex-copine, connaît quant à elle la consécration avec la publication de son dernier roman. Malgré son caractère relativement antipathique, Fante Bukowski est un personnage pour le moins attachant. Dans l’ombre de son ego âpre se cache un être sensible en quête d’amour. Si Audrey cherche à renouer avec lui, c’est peut-être grâce à la rencontre inattendue d’une prostituée que sa vie va prendre un nouveau tournant… N’en déplaise aux critiques, Noah Van Sciver est une étoile montante de la bande dessinée indépendante américaine. Bientôt, il comptera parmi les auteurs majeurs du XXIe siècle. La légende est en route. Dans ce second volume de Fante Bukowski, il démontre sa capacité à manier l’art de la parodie en forçant les traits, sans jamais tomber dans la caricature ou le pathos.

L’air de rien

Tous les week-ends dans le supplément de Libération, Aude Picault livre des petits strips drôles très contemporains. Les éditions Dargaud les publient dans un très bon recueil intitulé L’air de rien.

Autrice de grand talent, Aude Picault n’en n’est pas à son premier coup de maître. Après Moi je, Papa ou Idéal Standard – sa dernière excellente publication – elle revient avec des saynètes humoristiques ancrées dans notre époque. Dans la veine de son précédent album, elle explore le quotidien des trentenaires français. Avec finesse et une grande justesse d’observation, elle dépeint une jeunesse urbaine française plutôt dorée.

C’est tendre, c’est très drôle et tous les sujets qui les concernent sont traités : sexe, couple, travail, amis, famille ou enfants. Même si les thèmes peuvent être parfois profonds, le lecteur ressent de l’empathie pour ces anonymes.

Le dessin d’Aude Picault est fait d’un simple trait apportant une grande lisibilité à ces tranches de vie. Agrémentés d’aplats de couleur différente selon les histoires, les strips gagnent en efficacité.

A noter qu’une quinzaine d’illustrations pleine-page dans les pas de Jean-Jacques Sempé émaillent cet excellent recueil !

  • L’air de rien
  • Autrice : Aude Picault
  • Editeur : Dargaud
  • Prix : 16.45€
  • Parution : 13 octobre 2017
  • IBAN : 9782205077377

Résumé de l’éditeur : L’Air de rien est un album entièrement consacré aux relations sociales dans un univers urbain – Paris. À travers cent strips et une quinzaine de grandes illustrations, Aude Picault, auteure trentenaire, croque avec tendresse et une ironie délicatement distanciée ses contemporains et notre société moderne et urbaine. Indispensable et remarquable !