Génération Y

Génération Why, Pourquoi, Y est celle des 20-30 ans de 2018. Entrés dans l’ère du tout numérique, certains d’entre eux tardent à savoir qui ils sont, ce qu’ils feront et à se stabiliser dans tous les domaines. Mauryn Parent imagine le quotidien des quatre d’entre eux dans Génération Y.

Jérémy explique à Lise que leur relation est terminée. Il faut souligner que le jeune homme part s’installer en Australie pour y travailler et qu’il ne veut pas d’une relation à distance. En attendant, il retrouve Thomas pour aller boire des coups. De son côté, la jeune femme demande à Mathilde de passer chez elle pour parler…

Mauryn Parent connait bien cette Génération Y puisqu’elle en fait partie, elle est née en 1990. Dans son premier album, elle tente de décrire le quotidien de personnes lambda, anti-héros ordinaires dans des relations simples : métro-boulot-dodo mais aussi accomplissement de soi et loisirs. Ces quatre jeunes Belges ont les mêmes envies, idées et buts que leurs cousins Français.

La Génération Y est un groupe social de femmes et de hommes qui ont actuellement entre 20 et 30 ans. Ils sont dénommés ainsi en référence au fil de leurs écouteurs qui tombent et qui ressemblent ainsi à un Y.

Ce bel album bénéficie d’un dessin réaliste au crayon rehaussé par quelques touches de couleurs légères pour distinguer chaque personnage. Décors évanescents quasi effacés pour rendre la part belle à Lise, Jérémy, Thomas et Mathilde dans leurs relations.

  • Génération Y
  • Autrice : Mauryn Parent
  • Editeur : La Boîte à Bulles
  • Parution : 16 mars 2018
  • Prix : 16€
  • ISBN : 9782849533055

Résumé de l’éditeur : Mauryn Parent raconte au travers d’une année, le quotidien de Lise, Jérémy, Thomas, et Mathilde. Quatre personnages, aux caractères, aux parcours et aux aspirations bien différentes des unes des autres. Ils ont entre 20 et 30 ans et font parti de la génération Y. Hyper connectés, rêveurs, et dans le questionnement permanent, d’où la dénomination «Y», «Why» en anglais qui signifie pourquoi. Ils vivent à Liège, se connaissent tous, de près ou de loin et se rencontrent parfois au gré de ses rues ou de ses événements. L’auteur retranscris leurs interactions, leurs pensées, la vie telle qu’elle est. Par le biais de ces histoires, de ces destins croisés, chaque lecteurs pourra peut-être retrouver une pensée , un moment vécu ou encore un lieu connu. Le portrait juste, et lucide d’une génération de rêveurs, en quête d’un nouvel idéal de vie.

Kedamame, l’homme venu du chaos

Notre avis : Le scénario à la fois déjanté mais brillant de Yukio Tamai se marie parfaitement avec son style de virtuose et fait de Kedamame une excellente série à suivre !

Dans le Japon médiéval (en l’an 1246), Kokemaru est un bouffon qui protège une jolie danseuse nommé Mayu et sa soeur Kyara. Grimé en chat, il adore raconter des inepties. Mais c’est aussi un personnage très mystérieux, responsable de plusieurs phénomènes plutôt étranges lors de ses voyages à travers le pays dans la troupe d’artistes itinérants qu’il suit. Qui est-il vraiment ? Comment, malgré son unique bras, il arrive à être un guerrier aussi impitoyable ? Eh bien en réalité, il est Kedamame, l’homme venu du chaos… Et il n’a pas fini de vous surprendre.

Yukio Tamai est l’auteur de ce seinen qui se déroule en 4 tomes. Ce virtuose va vous emmener avec lui dans un voyage spatio-temporel en vous montrant un chemin aussi clair que celui d’une appli GPS. Kedamame, l’homme venu du chaos est une série à suivre absolument aux éditions Glénat Manga (éditeur de Dragon Ball Super ou encore de Gunnm).

  • Kedamame, l’homme venu du chaos
  • Auteur : Yukio Tamai
  • Editeur : Glénat Manga
  • Parution : 7 février 2018
  • Prix : 7,60 €
  • ISBN : 9782344026144

Résumé de l’éditeur : 1246, Japon médiéval. Kokemaru le bouffon protège la jolie danseuse Mayu et sa sœur la belle Kyara, malgré son unique bras. Grimé en chat, il passe son temps à raconter des inepties, mais il est en réalité Kedamame, l’homme venu du chaos…

Play with me

Play with me est le troisième magnifique artbook signé Nicoletta Ceccoli, publié aux éditions Soleil dans la collection Venusdea.

Cet album fascinant d’une cinquantaine d’œuvres est divisé en quatre chapitres :

  • Candyland dont les illustrations concernent les bonbons et autres douceurs,
  • la deuxième partie Wild beauties porte sur les relations entre de jeunes filles et la nature,
  • des scènes d’enfants et de jouets sont au cœur du troisième chapitre intitulé Come play with me
  • enfin la dernière partie est un très bel hommage aux contes dans Tales from Wonderland

Les dessins de Nicoletta Ceccoli est un mélange subtil entre le très beau et les pires cruautés, voire même parfois le glauque. Ils sont sensuels mais aussi troublants et étranges. Ses héroïnes, au regard mélancoliques, sont à la fois fragiles et fortes, à la fois naïves et cruelles.

La peinture de Nicoletta Ceccoli est ainsi à la fois rêveuse, mélancolique, séduisante… et parfois aussi, dérangeante et inquiétante. Elle emporte son lecteur et le submerge d’émotions vives et contradictoires qui ne peuvent le laisser de marbre. Les illustrations sont envoûtantes et hypnotisantes.

Récompensée par le Prix Andersen en 2001, puis par la médaille d’argent de The Society of Illustrators en 2006, Nicoletta Ceccoli est une artiste dont le travail s’expose dans de prestigieuses galeries à l’international.

Elle a réalisé quelques couvertures de titres de la collection Actes Noirs aux éditions Actes Sud. Mathias Malzieu, chanteur de Dionysos et écrivain, l’avait choisie pour réaliser le design des personnages pour son film d’animation La mécanique du cœur en 2014.

Venusdea avait accueilli l’artbook de Arthur de Pins : Vectorama.

  • Play with me
  • Autrice : Nicoletta Ceccoli
  • Editeur : Soleil, collection Venusdea
  • Parution : 21 mars 2018
  • Prix : 29.95€
  • ISBN : 9782302064799

Résumé de l’éditeur : Récompensée par le Prix Andersen en 2001, ainsi que par la médaille d’argent de The Society of Illustrators en 2006, Nicoletta Ceccoli est une artiste dont le travail s’expose dans de prestigieuses galeries à l’international. Elle a, entre autres, réalisé l’illustration de couverture du Prédicateur de Camilla Camilla Läckberg, ainsi que le character-design du film d’animation La Mécanique du coeur, tiré du roman éponyme de Mathias Malzieu. Le travail de Nicoletta, qui mêle mélancolie et séduction, suscite d’intenses émotions et une irrésistible nostalgie. Ce beau livre s’ouvre comme autant de fenêtres sur le temps de l’innocence : friandises, animaux, jouets et contes. Offrez-vous un voyage incontournable au doux pays de l’enfance, entre rêve et cauchemar..

Filles des oiseaux, tome 2

Florence Cestac poursuit sa plongée dans la vie Marie-Colombe et Thérèse dans le deuxième opus de Filles des oiseaux aux éditions Dargaud.

Le lecteur retrouve Marie-Colombe et Thérèse, 50 ans plus tard. Les sexagénaires se remémorent leurs souvenirs entre franche amitié et brouilles qui les ont éloignées.

Après le Pensionnat des Oiseaux où elles se sont connues, les deux adolescentes de 15/16 ans se sont retrouvées embarquées dans le tourbillon de Mai 68. C’est aussi le début de la pilule contraceptive et la loi Veil de 1975. Avec tout cela, il y a aussi leurs amoureux ! Peter l’Anglais pour Marie-Colombe (elle partira avec lui à Londres y vivre quelques années) et Benoît le vendeur de chouchous pour Thérèse…

En 56 pages, Florence Cestac déroule sous nos yeux les 50 ans de ses deux héroïnes toujours avec de la bienveillance et de l’humour. Alors que dans le premier excellent volume de la saga, l’autrice de Harry Mickson dévoilait la vie à la Pension des Oiseaux, ce deuxième opus lui permet de parler des combats féministes de ces cinq dernières décennies, ceux qu’elle-même a aussi mené.

De Mai 68 à la maternité, en passant par le travail ou leurs ex-maris, tout y passe mais toujours avec de la légèreté dans le ton. C’est ce que réussit le mieux la Grand Prix d’Angoulême en 2000 : parler de thématiques fortes, engageantes et sérieuses avec de l’humour. C’est aussi pour cela que l’on apprécie cette grande autrice ! Il y a toujours de l’optimisme, de la combativité et de la gaité malgré les obstacles dans ses albums.

Le lecteur referme ce diptyque de Filles des oiseaux avec un excellent goût en bouche. Bravo !

  • Filles des oiseaux, tome 2/2
  • Autrice : Florence Cestac
  • Editeur : Dargaud
  • Parution : 16 mars 2018
  • Prix : 13.99€
  • ISBN : 9782205076738

Résumé de l’éditeur : Après avoir passé une adolescence corsettée dans un établissement pour jeunes filles tenu par des soeurs, Marie-Colombe et Thérèse ont été happées par le tourbillon de la vie. Après Mai 68, un monde s’ouvrait à ces deux jeunes filles qui seront successivement hippies, féministes, yéyés, top model et chanteuse pour l’une, business woman et startupeuse pour l’autre. Elles se retrouvent et se remémorent 40 ans de passé commun. Des amours, des enfants, des rires et des larmes, tout ce qui fait le sel de la vie. Et toujours le lien de cette amitié indéfectible scellée dès l’adolescence par un énorme fou rire.

Deux ans de vacances, tome 1

Le célèbre roman de Jules Verne, Deux ans de vacances, est librement adapté en bande dessinée par Frédéric Brrémaud, Philippe Chanoinat et Hamo. Embarquez sur le Sloughi par une très jolie aventure jeunesse.

Nouvelle-Zélande. Onze jeunes adolescents s’embarquent sur le Sloughi, une petite goélette pour les vacances d’été : Onze enfants de 8 à 14 ans dont sept britanniques, deux français, un mousse noir et Phann un chien.

Alors qu’ils naviguent sur le Pacifique, ils sont pris dans un terrifiante tempête. Leur bateau s’échoue sur les rochers qui borde une île. Commence alors la vie en communauté dans ce lieu isolé…

Publié en 1888, Deux ans de vacances est un roman d’aventure de Jules Verne. Frédéric Brrémaud et Philippe Chanoinat en ont décliné une belle adaptation libre très réussie. Dès les premières planches, le lecteur est au cœur de la tempête, donnant un aspect très accrocheur au récit. A peine sauvés, les membres du Sloughi doivent s’organiser : habitation dans une grotte, vivres à stocker, chasser et cueillette pour manger ou exploration des lieux. Après la désignation d’un chef, les tensions se font sentir. Comment rester unis sur une île déserte ? Comment conjuguer les compétences de chacun pour survivre ?

Très bon album jeunesse, Deux ans de vacances plaît par sa narration classique, simple mais redoutablement efficace. Cette robinsonnade moderne bénéficie du talent graphique de Hamo. Le dessinateur de L’envolée sauvage ou de Le bon petit Henri réalise des planches attrayantes par un trait semi-réaliste agréable à l’oeil. Les taches ajoutées aux couleurs pastel apportent de la chaleur à l’histoire.

Prévue en trois volumes, Deux ans de vacances, cette belle aventure s’achèvera au cours de l’année 2018.

  • Deux ans de vacances tome 1/3
  • Scénaristes : Frédéric Brrémaud et Philippe Chanoinat
  • Dessinateur : Hamo
  • Editeur : Vents d’Ouest
  • Parution : 07 février 2018
  • Prix : 13.90€
  • ISBN :  9782344016428

Résumé de l’éditeur : Quatorze jeunes garçons, pensionnaires d’un collège en Nouvelle-Zélande, se retrouvent piégés sur une goélette à la dérive au large du Pacifique. Lorsque leur navire fait naufrage sur une île visiblement déserte, ils doivent apprendre à s’organiser pour vivre par eux-mêmes et chercher des secours. Mais des rivalités ne tardent pas à apparaître au sein de la petite communauté. D’autre part, en explorant les lieux, les quatorze aventuriers découvrent que l’île recèle bien des secrets… Redécouvrez un classique de la littérature d’aventure en BD ! Les auteurs ont insufflé de la modernité à la robinsonnade de Jules Verne pour en livrer une série grand public dans la lignée de Seuls ou Esteban. Une trilogie qui paraîtra intégralement dans l’année 2018.

Les noctambules de l’autre côté du bar

Ancienne barmaid, Pauline Perrolet dévoile les coulisses d’un célèbre bar de Bruxelles dans Les noctambules de l’autre côté du bar chez Delcourt.

Pauline – Popol – travaille dans un bar branché de Bruxelles. Mario, Luigi, Stanley, Gaëtan, Katerine, Javier et Carlos sont ses nombreux collègues. Complètement décalée dans sa vie, elle bosse toutes les nuits jusqu’à 8h du matin et dort le soir. Elle côtoie la faune bigarrée des clients. Entre le lourd, le dragueur, elle fait même parfois office de psy. Rapidement, elle accuse le coup et est sans cesse fatiguée. On lui propose alors plein de sortes de drogues. Avec l’alcool, cela fait des ravages mais lui permet de tenir toute la nuit…

L’album de Pauline Perrolet est avant tout très drôle. La bonne humeur, l’ambiance légère et joyeuse des nuits rejaillissent sur son récit. L’autrice belge (Je peux t’appeler Jean-Pierre, Débordée, moi ? Plus jamais) réunit des anecdotes vécues soit par elle, soit par ses collègues. Le monde de la nuit est plutôt bien dépeint. Les barmen et barmaid vont-ils s’y retrouver ? Sûrement ! En deux ans, elle en aura vu passer des clients de toutes sortes et des situations parfois rocambolesques. Restent les questions autour de l’alcool et de la drogue, omniprésentes au fil de l’album.

Pour prendre de la distance, Pauline Perrolet a décidé de représenter les humains sous la forme d’animaux. Une belle idée que l’anthropomorphisme pour cette bande dessinée. De gentils animaux, de la couleur et un dessin naïf qui tranchent avec le monde « d’adultes » de la vie noctambule.

  • Les noctambules, de l’autre du bar
  • Autrice : Pauline Perrolet
  • Editeur : Delcourt, collection Encrage
  • Parution : 07 mars 2018
  • Prix : 16.95€
  • ISBN : 9782413002673

Résumé de l’éditeur : Être barmaid, c’est cool : des potes et la bringue nonstop ! Mais c’est aussi une vie à l’envers : un travail ingrat et épuisant, des magouilles, beaucoup d’alcool, de drogue. Pauline pète les plombs et finit par changer de vie loin de ses chers noctambules. Une BD drôle et toute en finesse sur l’univers des bars de nuit, truffée d’anecdotes truculentes et de personnages hauts en couleur.

Let’s be a family

Un couple d’hommes se voit confier la garde de Ayu, le bébé de Tomoe leur amie qui part en reportage. Comment vont s’en sortir Kazuma et Chiaki qui jusqu’à présent étaient très loin de la maternité ? Tomo Kurahashi dévoile Let’s be a family, un très joli yaoi édité par Taifu Comics.

Alors que Kazuma demande une énième fois à Chiaki de venir vivre avec lui dans son appartement, Tomoe arrive . Le couple d’hommes est amis d’enfance de la jeune femme enceinte. Quelques temps plus tard, à la clinique, les deux compagnons découvrent la petite Ayu.

Un an plus tard, Tomoe débarque chez Kazu et Chiaki sa valise dans la main et Ayu dans les bras. Elle ne laisse pas le choix au couple de s’occuper de la petite fille puisqu’elle part en reportage dans un pays en guerre, elle est photographe.

Etonnés mais pas vraiment surpris par l’attitude de la maman, ils savent qu’elle leur fait confiance. C’est le début d’une longue histoire entre eux trois, allant même jusqu’à adopter Ayu

Belle histoire d’amour et d’amitié, Let’s be a family aborde la question de l’homoparentalité sous un angle très original. Les deux hommes en couple depuis 8 ans ne voulaient ni adopter ni s’en remettre à une mère porteuse mais vont devenir parents par la force des choses : un mère qui part travailler loin et qui ne peut s’occuper de sa fille.

Le récit de Tomo Kurahashi est aussi très drôle et léger, sans jamais donner de leçons. La mangaka laisse le lecteur se faire sa propre opinion en déroulant le fil de son récit, une histoire simple, qui ne souffre pas d’obstacles; tout y est positif parce que cela semble très naturel.

Quelques scènes osées complètent ce tableau très sympathique. Tomo Kurahashi réalise de très belles planches où ses protagonistes sont jeunes, beaux et en pleine santé. Elle alterne avec des moments kawaï pour les rendre encore plus drôles.

  • Let’s be a family
  • Autrice : Tomo Kurahashi
  • Editeur : Taifu Comics
  • Parution : 22 mars 2018
  • Prix : 8.99€
  • ISBN : 9782375060865

Résumé de l’éditeur : En couple depuis huit ans, Kazume et Chiasa vont se voir confier le bébé de leur amie d’enfance, incapable d’assumer sa maternité. Dès lors, une nouvelle vie commence pour nos deux nouveaux papas de substitution. Se découvriront-ils des instincts maternelles ? Une chose est sûre, leur quotidien ne sera plus le même. Les joies de la vie de famille résonneront désormais entre leurs murs !

Petite Jérusalem

Les souvenirs remontent à la surface lorsqu’un homme revient dans sa ville natale de Salonique. Elettra Stamboulis et Angelo Mennillo dévoilent Petite Jérusalem, un très bel hymne aux langues parlées dans le monde.

Romanos après la Chute du Mur de Berlin en 1989 revient dans sa ville natale de Salonique en Grèce. Au fil de ses balades dans la cité millénaire, il écrit des lettres à sa grand-mère. Ces moments de pur bonheur font remonter à la surface des souvenirs, les siens mais aussi historiques.

Amoureux des langues, le jeune homme est à l’aise avec le Grec, mais aussi le Turc ottoman et l’Arménien. Multi-linguiste, elle rêve du jour où toutes les langues ne feront qu’une, telle la Tour de Babel dans le Bible.

Pour l’instant, Salonique est troublée par d’étonnantes agitations et cela l’invite à méditer sur ce qui fut la cité tour à tour romaine, grecque ou turque et où de nombreux peuples se sont croisés des Arméniens, des Albanais et des Juifs séfarades…

Etonnant, Petite Jérusalem est un album hybride entre le texte pur et la bande dessinée. Fort et tourbillonnant, le récit de Elettra Stamboulis est exigeant à la lecture. En effet, le lecteur passe d’une époque à l’autre, avec un faux fil conducteur. Les méandres de l’histoire peuvent rebuter parce que tout se mélange et l’on en vient vite à s’y perdre. Le verbe et les mots sont bien choisis, faisant de Petite Jérusalem une œuvre très littéraire et très historique. Restent les questions autour de la langue et des langues. Comment elles se diffusent ou comment elles se transmettent ?

Cette non-bande dessinée est portée par le dessin de Angelo Mennillo, lui aussi exigeant. Il y a peu de vignettes dans Petite Jérusalem mais des illustrations en noir et blanc au trait épais, très volubiles.

  • Petite Jérusalem
  • Scénariste : Elettra Stamboulis
  • Dessinateur : Angelo Mennillo
  • Editeur : Rackham
  • Parution : 09 février 2018
  • Prix : 16€
  • ISBN : 9782878272192

Résumé de l’éditeur : Quelques jours après la chute du mur de Berlin, un homme revient dans la ville qui l’a vu naître… et que peut-être il n’a jamais quitté. Il en arpente les rues dans un périple sans fin et ne s’arrête que pour écrire des courtes lettres à sa grand-mère, sans pourtant en attendre une réponse. Le passé refait lentement surface et ses souvenirs se fondent aux récits entendus de la bouche de ses proches… Il est entouré par des ombres qui se dessinent sur les murs ; les façades fatiguées des immeubles lui renvoient l’écho de langues désormais oubliées. Les fantômes des anciens habitants, que le XXe siècle finissant a emporté avec lui, l’entourent mêlant leurs voix avec celles des hommes et des femmes, ceux-ci bien réels, qui les ont remplacés. En redonnant vie et forme à ses souvenirs familiaux, Elettra Stamboulis brosse par petites touches un portrait intime de Salonique, trait d’union entre l’Orient et l’Occident, ville à l’histoire millénaire et aux multiples facettes séfarades, valaques, arméniennes, pontiques, albanaises ; ville emblématique d’un pays à l’identité hybride, la Grèce. Le récit d’Elettra Stamboulis en parcourt l’histoire récente : l’Occupation allemande, l’extermination presque totale de sa communauté juive, la Guerre civile qui l’a divisée et ensanglantée, comme le pays tout entier. La plume d’Angelo Mennillo redouble la dimension poétique du texte de Stamboulis et forge une clé de lecture puissante et originale de l’histoire en noir et blanc qui a été, et continue d’être, celle de la République hellénique.

Cosmobacchus, première partie : Lucifer

Quand un viticulteur rencontre un auteur de bande dessinée et décide de l’emmener faire le « tour » des vignerons, cela donne Cosmobacchus, un joli album signé Jean-Benoît Meybeck aux éditions Eidola.

Sud de la France. Jean-Benoît, auteur de bandes dessinées, pousse la porte du Bris’soif, une cave à vin. Là, il rencontre un drôle de viticulteur à la mine débonnaire et ressemblant comme deux gouttes d’eau à Obélix, le menhir sur le dos en moins. Il propose alors au dessinateur de le suivre chez les vignerons pendant un an et de raconter son métier en bande dessinée. Après réflexion, Jean-Benoît accepte.

Les voilà tous les deux arpentant les routes de France pour aller à la rencontre de ces femmes et ces hommes dont le métier s’articule autour du vin. Après une halte dans un hôtel, ils décident d’aller visiter les chais d’un viticulteur utilisant la méthode de la biodynamie. Ils s’inscrivent même à une formation autour des préceptes de Rudolf Steiner

Très joli road-trip à travers les routes françaises, Cosmobacchus plait dès les premières pages par la vitalité des actions, par la personnalité du viticulteur et du dessinateur. Si le sujet est passionnant, parfois sombre, Jean-Benoît Meybeck le rend plus attrayant par un bel humour. Les relations entre les deux bons vivants, les bouteilles descendues très vite ou la bonhomie du vigneron participent à l’atmosphère détendue de la bande dessinée.

Si la thématique du vin en bande dessinée est très fournie (voir notre Top 10) Cosmobacchus possède ce petit plus qui attire le lecteur. Il faut souligner qu’au-delà des dégustations et de leur bonne humeur, l’auteur de Koko au pays des toutous (Des ronds dans l’o) met en lumière la nébuleuse de la méthode Steiner, dite de biodynamie dans la veine du courant ésotérique de l’anthroposophie.

Alors que Etienne Davodeau dans Les ignorants mettait surtout en avant la relation amicale entre lui et Richard Leroy le viticulteur utilisant cette méthode, Jean-Benoît Meybeck tente de la décrypter. Solidement documenté (voir les sources à la fin de l’album), le récit possède ce double sentiment : la joie des deux protagonistes mais surtout la méfiance qu’engendre la biodynamie. Il faut souligner qu’elle repose non pas sur de la science et de l’agronomie pures mais sur des croyances mêlées d’ésotérisme et d’astrologie. Ce concept de forces cosmiques et de forces terrestres fut développé par Rudolf Steiner (à partir de 1924) apparemment après la lecture de La métamorphose des plantes de Goethe.

Rapidement, l’auteur de CRA se rend compte que tout cela ressemble parfois à des pensées sectaires (la MIVILUDES ayant un œil sur les écoles Steiner-Waldorf). Il faut souligner que Meybeck a eu le déclic lorsqu’il a lu le blog de Grégoire Perra ancien anthroposophe qui a bien expliqué les rouages de la méthode.

Teinté de rouge comme le vin, Cosmobacchus bénéficie du trait vif et nerveux de Meybeck apportant là de l’humour, là de la consternation avec les traits de Steiner en Lucifer. L’encre de Chine et le rouge se marient parfaitement pour réaliser des planches efficaces.

  • Cosmobacchus, livre 1 : Lucifer
  • Auteur : Jean-Benoit Meybeck
  • Editeur : Eidola
  • Parution : 02 février 2018
  • Prix : 15€
  • ISBN : 9791090093225

Résumé de l’éditeur : Un caviste et un auteur de bandes dessinées nous embarquent dans un road trip à la découverte des domaines viticoles, et nous font partager leurs découvertes stupéfiantes. La biodynamie est à la mode dans la viticulture et certains vignerons se révèlent de fervents adeptes de la pensée « steinerienne », l’anthroposophie, aux pratiques ritualisées, parfois étranges et inattendues, souvent occultes. Mais nos deux compères abasourdis par leurs explorations, n’en perdent pas pour autant de vue leurs multiples dégustations !

Le chantier

Tout juste arrivée dans un cabinet d’architecture, Flora se voit confier un gros projet. Fabien Grolleau et Clément C. Fabre proposent Le chantier, un très joli album aux éditions Marabout.

Barcelone. Flora Del Sol vient tout juste d’être embauchée dans un grand cabinet d’architecture, dont le patron – très volubile – est l’un des meilleurs dans son domaine. Alors qu’elle n’a pas encore fait ses preuves, la jeune femme se voit confier le projet Bissaro sur les hauteurs de la ville.

Pour la première visite du terrain à bâtir, elle y va en vélo, difficile car la route est pentue. Elle rencontre la femme de ce riche couple avec deux enfants. Elle lui expose ses envies dont celle d’abattre le pin de Monterey centenaire au milieu de la propriété…

Ancien diplômé en architecture, Fabien Grolleau connaît bien son sujet ! Il a imaginé la vie d’une toute jeune architecte sur son premier chantier. Tout y passe : son bizutage, les artisans qui n’en font qu’à leur tête ou les envies insensées des futurs propriétaires. Il ajoute à son récit sympathique l’envers du décor d’un cabinet d’architecture. Notamment l’exubérance du patron ou la jalousie des collègues de Flora (le bras droit Lucca).

Alors qu’elle travaille dans un société où le classicisme des projets l’emporte, elle tentera d’imposer un vison plus moderne et écologique de ses plans.

Le chantier est raconté avec beaucoup d’humour et de modernité, le tout à Barcelone, la ville modelée par Antoni Gaudi.

Pour accompagner le scénariste de Sur les ailes du monde, Audubon (avec Jérémie Royer) ou de Nordics (avec Thomas Gilbert) au dessin, c’est Clément C. Fabre qui a hérité de la partie graphique. Le dynamisme de son trait et la beauté de ses aquarelles lui permettent de réaliser de superbes planches. Par des personnages stylisés, il apporte aussi de l’humour à l’histoire. On notera aussi la qualité des titres des chapitres. La calligraphie du dessinateur de Martin Page (Warum)  à l’aquarelle est sublime !

  • Le chantier
  • Scénariste : Fabien Grolleau
  • Dessinateur : Clément C. Fabre
  • Editeur : Marabout, collection Marabulles
  • Parution : 07 février 2018
  • Prix : 12.99€
  • ISBN : 9782501122252

Résumé de l’éditeur : Flora est une jeune femme architecte fraîchement diplômée qui démarre sa carrière dans un grand cabinet d’archi. Ce récit contemporain raconte les déboires de Flora Del Sol qui est l’apprentie du grand architecte El Rodrigo, capricieux, talentueux et picaresque. Flora va découvrir tous les rouages et autres humiliations de cette agence et mais aussi toutes les joies du métier d’architecte. Elle va construire son propre projet, prendre son indépendance et s’épanouir dans son métier. Au départ une peu coincée et maladroite, elle va prendre son envol et s’impliquer dans l’écologie et la construction durable, libre de toute influence.

Cintré(e)

Quand deux personnes abîmées par la vie se rencontrent, cela donne Cintré(e) un très joli témoignage fictionnel signé Jean-Luc Loyer chez Futuropolis.

Un auteur de bande dessinée rondouillard, un peu à la peine se rend dans le nord de la France pour assister aux funérailles de sa nièce, il en est tout retourné :  » […] Petite fleur, car sans le savoir, et au-delà de toute ma tristesse… Tu venais de bouleverser ma vie ».

Tout ne va pas pour le mieux dans son existence : il entretient un relation avec une femme mariée qui ne débouche sur rien et son estomac crie famine. Il faut dire que tous ses projets sont retoqués par les éditeurs, que ses histoires sont soient trop ou soient pas assez, qu’il n’a plus grand chose à mettre dans son assiette et que sa propriétaire attend le règlement de plusieurs mois de loyer. Et ce n’est pas son meilleur ami qui pourra l’aider dans sa mouise, lui aussi dedans.

Pour pouvoir enfin vivre, il accepte l’arrangement de monsieur Lelong : être responsable du service communication de sa société en contrepartie de prendre sous son aile Eléonore, sa fille malade qu’il veut aider. A peine arrivée, la jeune femme a des comportements étranges…

S’inspirant de faits réels même s’ils ont été romancés, Cintré(e) est un très belle auto-fiction de Jean-Luc Loyer, à la fois tendre et dure, délicate et bouleversante. Avec sa bonhommie et son altruisme, l’auteur du Grand A (avec Xavier Bétaucourt) tente d’aider du mieux qu’il le peut Eléonore. Mais qui va vraiment être aidé pendant cette période ? La jeune femme schizophrène ou le dessinateur de La boîte à un franc ? Ils étaient faits pour se rencontrer, faire un bout de chemin ensemble et tenter de remonter la tête hors de l’eau.

L’alternance entre les moments de bien être et les humeurs imprévisibles d’Eléonore peuvent à la fois nous attirer et nous révulser, avoir de l’empathie pour elle, comme envie de la secouer. Car c’est ainsi, nous, les simples personnes qui ne sommes pas habituées à cela comme a pu le montrer avec une grande justesse Espé dans son magnifique album autobiographique Le perroquet. Restent des instants magiques, souvent drôles où la fille du patron n’a plus de filtre.

Au-delà de la maladie de la jeune femme, Jean-Luc Loyer parle de boulimie, d’anorexie, du travail d’auteur de bande dessinée, de la précarité, des boulots alimentaires, de courriers que l’on ouvre pas par peur, d’amitié (avec Eléonore, avec son meilleur ami), d’amours tumultueuses, de deuil ou de religion. Parce que, oui, l’auteur de Sang noir, se dévoile avec beaucoup de pudeur et de retenue. Le lecteur tombe sous le charme de cet auteur si humain et chaleureux. Cintré(e) est donc un récit beaucoup plus positif qu’il n’y parait.

Cintré(e) : un album touchant, optimiste, pour dire oui à la vie !

Monsieur Lelong : « Je m’approche, elle se détruit… je m’éloigne, je la laisse se détruire. C’est tout »

  • Cintré(e)
  • Auteur : Jean-Luc Loyer
  • Editeur : Futuropolis
  • Parution : 08 février 2018
  • Prix : 20€
  • ISBN : 9782754816847

Résumé de l’éditeur : C’est la rencontre de deux personnages que tout oppose. Lui, timoré et effacé, vit sa vie en pointillé. Dessinateur de bande dessinée, il trimballe sa vie comme il trimballe son obésité. Tout est une charge. Le suicide d’une gamine le hante. Même s’il n’y est pour rien, il se sent coupable. Il aurait dû voir, dire, parler, intervenir… Il supporte docilement sa maîtresse, acariâtre et véritable manipulatrice, qui lui fait espérer une vie qu’il n’aura jamais. Puis il croise le chemin d’Eléonore. Extravertie, délirante et désinhibée, elle est son opposé. Mais derrière cette façade, elle aussi fuit quelque chose : sa jeune vie chaotique, faite d’alcool, de drogue et de prostitution… Aujourd’hui, elle tente de se reconstruire. Mais son sevrage, sa situation familiale et son caractère laissent apparaître des troubles qui vont s’accroître à grande vitesse.

Ballistic : tout arrive, mais surtout le pire

Notre avis : Un bon cocktail de science-fiction et de polar mélangé à une métropole futuriste et psychédélique, voilà une nouvelle boisson bien violente, Ballistic !

Bienvenue à Repo-city. Cette ville n’est pas vraiment de tout repos car vous ne pouvez faire confiance qu’à vous-même. Même les réparateurs d’air conditionné ne sont que des brutes sanguinaires. Pour preuve, Ballistic nous présente Butch, un réparateur d’air conditionné bien décidé à se propulser sur le devant de la scène criminelle grâce à ses plus bas instincts et à un ami un peu particulier, Gun. Gun est en fait une arme à feu… génétiquement modifiée. En plus de parler, c’est surtout un fauteur de troubles, un alcoolique et un drogué. Seulement leur quête d’un avenir plus radieux comme criminels endurcis ne va pas vraiment se passer comme prévu…

Ce comics ultra-violent et surtout d’un grand désordre est en fait un vrai petit bijou, sûrement dû au scénario de Adam Egypt Mortimer, réalisateur et producteur, spécialisé dans le cinéma de genre et d’horreur. On peut parler exemple citer Some Kind of Hate ou encore Jerk All-Stars. A sa droite, un dessinateur tout aussi habitué à ce style, j’ai nommé Darick Robertson. Il a travaillé pour des séries comme Justice League ou Wolverine, mais il est surtout le co-auteur de The Boys, une série noire et ultra-violente.

Ballistic donc est à découvrir pour les moins jeunes d’entre nous, aux éditions Glénat Comics, éditeur de Lazarus et de Black Magick.

  • Ballistic
  • Scénariste : Adam Egypt Mortimer
  • Dessinateur : Darick Robertson
  • Editeur : Glénat Comics
  • Parution : 14 février 2018
  • Prix : 15,95 €
  • ISBN : 9782344019580

Résumé de l’éditeur :
Bienvenue dans un futur pas si éloigné que ça du nôtre, bienvenue à Repo-city, la ville où tout le monde est un salopard, y compris les réparateurs d’air conditionné. Dans cet enfer cyberpunk, on rencontre Butch, un gros bourrin, et son pote Gun, une arme à feu génétiquement modifiée, grande gueule et dopée aux drogues les plus dures. Cette paire de brutes aussi improbable que violente va essayer de propulser Butch lui-même sur le devant de la scène criminelle de Repo City. Finies les heures passées à réparer les stations de refroidissement, Butch va enfin pouvoir se laisser aller à ses instincts les plus vils. Sauf qu’évidemment, ça ne va pas se passer comme aimeraient nos deux acolytes…