Spider #1 – Rabbit Hole –

Notre avis : Détroit, ville du Michigan qui commence à peine à se remettre de sa mise en faillite d’il y a quelques années. C’est à notre époque et dans un climat hostile que va débarquer Charlie Dubowski, fraîchement promue détective. Du haut de ses vingt-cinq ans, l’enthousiasme de la jeune femme face à ses nouvelles fonctions, va vite se refroidir. Les présentations avec son premier coéquipier dressent le tableau noir de ce que sera sera premier volet de Spider.

John Brandt, spécialiste dans les homicides, est un enquêteur qui ne respire pas la joie de vivre. Et on ne peut pas dire que la prise de contact avec celle qu’il appelle Britney Spears soit des plus réussies. Il faut dire que Brandt doit faire face à une affaire on ne peut plus macabre. Dans une ruelle, le corps calciné d’un homme a été retrouvé. De ce qu’il en reste, se distinguent des phénomènes physiques étranges. Le lien avec la drogue qui sévit dans Détroit est tout fait. Et Charlie va l’apprendre à ses dépens…

Car après la première intervention du duo policier devant un junkie hors de contrôle, la détective va s’apercevoir de l’extrême violence que provoque la Spider. Entre mutation génétique et ce besoin irrépressible d’ingurgiter l’insecte aux huit pattes, les effets sont dévastateurs. Rongée par la culpabilité de ce qui va arriver à Brandt, Charlie n’aura d’autre choix que d’infiltrer le réseau emmené par un certain Anansi…

Arachnophobes s’abstenir ! Et associée au titre éloquent, la couverture de Stefano Raffaele ne trompe pas sur la marchandise. Il va y être question d’araignées bien poilues, grosses, et dont les vertus, si on daigne en mettre une dans son estomac, s’avèrent être diablement hallucinogènes. Le dessinateur maîtrise, comme à son habitude, la mise en images de cet univers glauque à souhait. Comme pour Sarah ou Pandémonium, Raffaele apporte énormément d’efficacité pour rendre l’histoire prenante. Des endroits lugubres (avec deux doubles-pages époustouflantes) à ces scènes d’une extrême violence, il équilibre avec un peu de douceur pour alléger cette ambiance anxiogène. Principalement grâce à la sensibilité que dégage le personnage principal.

Au delà de son talent qui n’est plus à prouver, la complicité acquise depuis de nombreux titres avec Christophe Bec, consolide cette aisance à porter brillamment ce type d’intrigue. Le scénariste qui met en scène une idée originale du réalisateur Giles Daoust, a cette faculté d’oppresser le lecteur avec ses récits où parfois se mêlent fiction et réalité (voir références citées plus haut auxquelles on peut en ajouter d’autres telles Bikini Atoll ou la superbe série Prométhée). Avec Spider, il ne déroge pas à la règle. Ce premier tome qui constituera un diptyque, rassemble tous les ingrédients nécessaires pour offrir un ultime tome avec, assurément, son lot de rebondissements.

Bec, Daoust et Raffaele : un trio taillé pour un album d’une profonde noirceur. Et on en redemande !

  • Spider, Tome 1 : Rabbit Hole
  • Scénaristes : Christophe Bec & Giles Daoust
  • Dessinateur : Stefano Raffaele
  • Éditeur : Soleil
  • Prix : 14,95 €
  • Parution : janvier 2019
  • ISBN : 978-2302074460

Résumé de l’éditeur : Detroit, Michigan ; une ville en décrépitude. Charlie, femme flic tout juste sortie de l’école de police, découvre qu’une nouvelle drogue fait des ravages dans les rues de l’ex-cité industrielle. Issue d’expérimentations génétiques, la Spider provoque des mutations inouïes. Charlie s’engouffre bientôt dans une enquête obsessionnelle qui la mènera au plus profond de la Toile, l’organisation qui gère le trafic de Spider, contrôlé par Anansi, un homme ravagé par la drogue. Elle devra dépasser toutes ses limites pour parvenir à démanteler ce réseau…

Les Brûlures

Notre avis : Assane Ndiaye est un flic sans histoire. La seule qu’on lui connaisse vient de son surnom. Lui qui, gamin, a gagné à un concours son poids en pots de pâte à tartiner se fait depuis appeler « Nutella ». La façon qu’il a d’aborder la serveuse du bar de la piscine dévoile une certaine sérénité et une prestance naturelle pour lesquelles la demoiselle ne reste pas indifférente. Pourtant il ne faut pas se fier aux apparences. Nutella traverse une période de sa vie assez cahotique, autant dans son boulot que sentimentalement… Les brûlures sont palpables autour de lui et donnent une atmosphère suffocante.

Sa vie de flic, il la « partage » avec Light. Un coéquipier aussi lourd physiquement que par son humour. Tous les deux doivent faire face à de mystérieux meurtres dont sont victimes des prostituées. Atrocement mutilées, leur enquête sera parsemée de scènes sordides. Le binôme reste fataliste quant à trouver le ou les criminels. Au moins, les deux hommes tentent de trouver une explication.

Face à ce quotidien macabre, l’inspecteur de police trouve une échappatoire en allant nager. Dans cette piscine où il vient se laver de toutes ces ignominies encaissées, il rencontre une jeune femme belle, mystérieuse et paraissant inabordable. Assane tente pourtant de la séduire en se mettant à nu. Il est en train de tomber amoureux. Même si il sent qu’elle cache quelque chose.

Résoudre son affaire de triple homicide et gagner l’intérêt de la jolie sirène dont il s’est épris. Dans ces deux quêtes, Nutella devra s’engouffrer dans des eaux très profondes pour les mener à bien.

Pour ce roman graphique Zidrou et Laurent Bonneau offrent avec Les Brûlures, une histoire intrigante et déroutante. Dès le début, le corps estropié d’une jeune adolescente italienne porte à croire que l’on se dirige vers un scénario classique avec ses rebondissements essentiels pour attirer le lecteur. L’originalité est ailleurs. Zidrou nous mène en bateau. Il serait donc trompeur d’estampiller de « Polar » ce nouveau titre de l’auteur de l’Adoption. Car même si on baigne dans une affaire de meurtres, elle n’est qu’un prétexte pour explorer les attitudes et ressentis, par delà les souvenirs, des différents protagonistes.

Et Laurent Bonneau a bien compris les intentions du scénariste. En utilisant plusieurs procédés graphiques (comme la mine de plomb, l’encre de chine, tout comme ces couleurs diverses et représentatives de séquences bien distinctes), le dessinateur permet cette intrusion dans la conscience des personnages. Car c’est bien là que le binôme veut nous emmener. En particulier avec Nutella. Les nombreux gros plans sur les visages, ces doubles-pages sur des lieux symboliques, ainsi que ces cases dessinées de façon abstraite, témoignent de la façon atypique et réussie dont L. Bonneau s’est emparé de ce récit. Il contribue indéniablement à la bonne compréhension des changements incessants entre le présent et les souvenirs…

Pour cette collaboration inédite, Zidrou & Laurent Bonneau offrent avec Les Brûlures une véritable immersion dans les relations humaines. Un pari risqué tant le sujet à traiter est périlleux. Une chose est certaine, le duo a tellement donné à ses personnages qu’on a l’impression qu’ils sont réels…

  • Les Brûlures
  • Auteur : Zidrou
  • Dessinateur : Laurent Bonneau
  • Éditeur : Bamboo (Grand Angle)
  • Prix : 19,90 €
  • Parution : mars 2019
  • ISBN : 978-2818966778

Résumé de l’éditeur : Une plongée dans les eaux brûlantes du crime ! Dans les rues d’une petite station balnéaire, les putes tombent comme des mouches. Un premier cadavre, atrocement mutilé, est découvert, puis un second, brûlé au chlore. La série, pourtant, ne fait que commencer.

Père et fils, tome 8

Jusqu’à présent, jamais une série manga ne nous avait autant charmé et accroché que Père et fils. Mi Tagawa met une touche finale à son univers bienveillant et tendre avec le huitième et dernier opus. Magique !

Toutes les bonnes choses ont une fin et c’est encore le cas avec cet ultime volume de Père et fils ! Tous les ingrédients qui ont fait la richesse et la singularité de la série transpirent encore dans ce 8e tome. Tori et Shiro, son fils, sont de retour dans le village des grands-parents. Leur vie semble si douce et passionnante auprès des plantes.

Mais le père préfère se séparer de nouveau de son fils. Surtout qu’il va entrer à l’école et que l’herboriste va récupérer la clientèle de son père. La nouvelle ne réjouit pas Shiro. Il est triste de ce nouveau abandon. Ajouter à cela, un potentiel mariage qui ne dit rien à Tora, l’ombre de Shiori sa femme qui plane sur eux, des kilomètres de route à avaler et les temps sont durs.

Le lecteur est à la fois heureux de connaître la fin, de retrouver les héros de Père et fils mais triste que cela se termine. La délicatesse des rapports père/fils, les émotions vives et variées dont de ce récit une pure merveille !

C’est beau graphiquement, c’est émouvant, c’est sincère, c’est juste, c’est questionnant, c’est délicat, c’est tout ce que l’on attend d’une série et d’une bande dessinée.

Mi Tagawa est une grande autrice, on attend que les éditions Ki oon signent sa future série. Merci pour ces sublimes moments de lecture !

  • Père & Fils, volume 8/8
  • Autrice : Mi Tagawa
  • Editeur : Ki oon, collection Seinen
  • Parution : 18 octobre 2018
  • Prix : 7.90€
  • ISBN : 9791032703267

Résumé de l’éditeur : Torakichi pense de plus en plus à se remarier pour le bien de son fils, mais le coeur n’y est pas… Parti chercher conseil auprès de sa soeur, il la trouve alitée et d’une humeur massacrante, épuisée par sa troisième grossesse. Pas moyen d’aborder le sujet dans ces conditions ! L’herboriste finit par se résoudre à rencontrer la demoiselle que Funado Minegi souhaite lui présenter. Reste à faire part de la nouvelle à Shiro, et ça, le jeune père s’en montre bien incapable ! Le rendez-vous ne s’annonce pas sous les meilleurs auspices… Laissez-vous attendrir par le duo père-fils le plus improbable du manga ! Mi Tagawa décrit avec une grande délicatesse les joies et les peines de ses héros hors du commun. Avec son trait fin et minutieux, l’auteur nous entraîne dans un voyage à travers le Japon traditionnel. Quelle que soit l’époque, la paternité s’apprend à petits pas !

Blue thermal, 1

Belle romance éditée par les éditions Komikku, Blue Thermal est un manga signé Kana Ozawa. On s’envole vers le ciel…

Tout juste inscrite à l’université, Tamaki ne rêve que d’une seule chose : trouver l’amour. Alors que beaucoup d’adolescentes ont déjà connu ce sentiment amoureux, elle ne l’a jamais vraiment éprouvé.

Afin de rencontrer du monde mais surtout son futur petit ami, elle prend un licence au club de tennis de l’université. Débutante, elle n’est pas super douée. Son coup droit sort du court et atterrit sur la tête d’un garçon. Pire, elle a salement amoché l’aile d’un planeur que tenait l’étudiant.

La facture est élevée : 15 millions de yens ! N’ayant pas cette somme pour l’acquitter, elle fait alors de petites tâches à l’aéroclub. Elle assiste à son premier décollage. Mieux, elle grimpe et effectue son baptême de l’air…

Les éditions Komikku ont souvent l’habitude de publier de jolies petites histoires. Après L’enfant et le maudit, Marion ou Créatures fantastiques, elles proposent de nouveau une série attendrissante, drôle et lumineuse. A la manière d’un bon shojô, Kana Ozawa imagine une romance sympathique. Pour renforcer l’intrigue, la mangaka choisit l’univers des planeurs et aéroclubs pour décor.

Tamaki est attachante, un peu gauche, tête en l’air, volontaire et débrouillarde. Les deux étudiants qui l’accueillent sont pour l’instant, pas très agréables. Le lecteur se plait à suivre ses premiers pas dans cet univers très masculin.

Et si l’amour donnait des ailes ?

  • Blue thermal, 1/5
  • Autrice : Kana Ozawa
  • Editeur : Komikku
  • Parution : 28 mars 2019
  • Prix : 7.99€
  • ISBN : 9782372874311

Résumé de l’éditeur : Tamaki est un vrai garçon manqué, fan de sport. De ce fait elle n’a jamais eu beaucoup de succès avec les garçons, mais son entrée à l’université est sûrement l’occasion de changer cela. Au cours d’une partie de tennis, elle tente de faire la fille mignonne et maladroite, mais le naturel reprend le dessus et elle joue avec force. Sans le faire exprès, elle envoie la balle sur un planeur et l’endommage sérieusement. Elle doit rembourser 2 millions de yens de dommages, mais le club de planeur lui propose un marché : elle s’acquittera de sa dette en travaillant gratuitement là-bas. Tamaki accepte, car elle n’a pas d’argent. D’abord peu intéressée, elle va vite se prendre de passion pour le planeur et en apprendre les secrets. Alors que les membres du club se préparent à une compétition contre une université voisine, elle apprend que la championne du camp adverse n’est autre que sa demi-soeur avec qui elle a de très mauvais rapports…

 

L’extraordinaire abécédaire de Zoé Marmelade

Plus qu’un abécédaire, l’album L’extraordinaire abécédaire de Zoé Marmelade est une très jolie histoire signée Guillaume Bianco et Marie Pommepuy.

Zoé s’ennuie. Il pleut dehors et seul Nunuche lui tient compagnie. C’était sans compter sur son imagination débordante et un crocodile dans le salon ! Les premières lettres s’égrènent, des animaux arrivent, les mots forment des phrases et les objets prennent vie…

Guillaume Bianco donne corps à cet album inclassable mais ô combien intelligent ! Les 26 lettres de l’alphabet : facile ! Pourtant, cet album est bien plus que des pages avec des lettres.  Sous chacune d’elle, il joue avec les mots à travers des allitérations sublimement senties. De « Un alligator albinos » à « Zoé sème la zizanie », en passant par « Juché sur le jaguar », « En Ouganda, un ours orange » ou « Sur la table, un titan tatoué », l’auteur de Billy Brouillard s’en donne à coeur-joie ! Le vocabulaire est soigné, les mots pesés, oubliés ou non.

Il entrecoupe son abécédaire de petits récits sous forme de bande dessinée. Le rêve, la poésie, le surréalisme à l’image de Robert Desnos ou Charles Trenet et l’imagination sont au cœur de ce merveilleux ouvrage.

Pour accompagner le scénariste, Marie Pommepuy fait des prouesses. Son dessin est doux, chaleureux et lumineux ! L’autrice de Miss pas touche (avec son double, Sébastien Cosset, alias, Kerascoët) emporte le jeune lecteur par de superbes planches à l’aquarelle. Le trait est rond et la palette chromatique, superbe.

L’extraordinaire abécédaire de Zoé Marmelade : un régal !

  • L’extraordinaire abécédaire de Zoé Marmelade
  • Scénariste : Guillaume Bianco
  • Dessinatrice : Marie Pommepuy
  • Éditeur : Soleil, collection Métamorphose
  • Prix : 22.95€
  • Parution : 17 avril 2019
  • ISBN : 9782302059719

Résumé de l’éditeur : Cet abécédaire animalier, signé Guillaume Bianco et Marie Pommepuy, propose un voyage pour petits et grands enfants, entre lettrines illustrées et bandes dessinées. Il ne s’agit pas d’un simple abécédaire… mais d’un ouvrage enrichi, qui stimule l’imaginaire. À chaque lettre de l’alphabet correspondent plusieurs mots contant un court récit aux tonalités communes aux deux auteurs (bizarrerie, humour et poésie). Plusieurs de ces lettres sont développées en histoires de bande dessinée oscillant entre 6 à 16 pages, tel le « L » de la « Limace » dont l’apparence se révèle trompeuse. En fin d’ouvrage, un glossaire ludique lève le voile sur des mots rares ou mal connus tandis qu’une magnifique illustration se déploie spectaculairement sur plusieurs volets. Un ouvrage à lire et expérimenter seul ou à plusieurs pour une immersion réjouissante dans l’art de narrer des histoires à travers les lettres de l’alphabet.

 

Bienvenue à l’usine

Après Comme un frisson et Mon petit Ponant, la collection Soudain des éditions Vide Cocagne s’agrandit avec Bienvenue à l’usine, un très bel album de Bastien Bertine.

Dessinateur, un jeune homme est embauché dans une usine de métallurgie. Au milieu d’une forêt se dresse les infrastructures de ce géant de l’industrie. La chaleur, le bruit et l’odeur se mêlent à la faune bigarrée des ouvriers.

Nouveau dans l’usine, il n’est pas épargné par les remarques des uns, le bizutage des autres et l’œil du KGB du contremaître…

Diplômé de l’EESI d’Angoulême, Bastien Bertine se dessine en double pour raconter son expérience dans Bienvenue à l’usine. Sans être un documentaire ou un récit de reportage, le lecteur apprécie la justesse de propos de ce beau témoignage sociologique.

S’il est vraiment un ouvrier à part, le narrateur est un sacré témoin d’un monde en mouvement, qui change et se meurt. La désindustrialisation, les ouvriers « à l’ancienne » et le pouvoir des petits chefs sont là, sans filtre. Bastien Bertine dépose cela devant nos yeux de lecteurs mais n’est pas donneur de leçons. Chacun se fera son opinion.

Le trait est agréable et les personnages haut en couleurs. L’ogre a des faux airs du héros de Blast de Larcenet. Son comparse misanthrope fait peur et la mécano est belle.

Bienvenue à l’usine : une belle plongée dans une usine telle qu’on n’en fait plus…

  • Bienvenue à l’usine
  • Auteur : Bastien Bertine
  • Editeur : Vide Cocagne
  • Parution : 15 février 2019
  • Prix : 15€
  • ISBN : 9782379360022

Résumé de l’éditeur : Quelque part, dans un paysage de forêt et de montagnes, se tient une usine rouge, déversant jour et nuit ces volutes noires. Le narrateur, un double de Bastien Bertine, décide de s’y engager pour comprendre ce qui s’y joue : comprendre ce que vivent ses amis qui y travaillent, ses proches, les habitants de toute une ville. Il découvrira l’horreur quotidienne des bruits permanents, des odeurs de poissons morts qui imprègnent malgré la douche, des démangeaisons et de la crasse ; mais aussi les accidents mortels qui « arrivent » et contre lesquels « on ne peut rien » . Il rencontrera des ouvriers qui voient sa présence de « bleusaille » ou comme un vent de fraîcheur ou comme une intrusion méprisante. Car le narrateur dessine, l’usine, ses ouvriers : lui, il le sait en arrivant, n’est qu’un témoin de passage ; mais combien d’autres y sont pour la vie ? Bastien Bertine par son dessin et ses couleurs apporte une poésie, une touche de décalage à l’observation fictionnelle de ce monde absurde et sans pitié.

Une drôle de famille : un quotidien pas si paisible

Notre avis : Découvrez le quotidien de la famille Honda, une famille pas comme les autres. Disons plutôt, une drôle de famille…

Tarô et Chiharu sont deux parents de deux petits loustics, Yuki et Kotarô. Même s’ils sont très heureux tous ensemble, il est parfois difficile de se sentir normal. Surtout lorsque les enfants sont très turbulents, que la maman ne se souvient plus de la dernière fois où elle a pris soin d’elle, que le papa est aussi chahuteur que ses rejetons et que la famille semble passer pour une bande d’hurluberlus à chaque sortie.

Une drôle de famille est un manga touchant, drôle, terriblement pragmatique, mais surtout extrêmement fidèle et sympathique. À chacune des pages, on découvre de petits histoires courtes pleines d’humour et de bons sentiments pendant lesquels l’on suit petit à petit l’évolution des chers bambins ainsi que de leurs parents.

Yumi Unita nous sert ces contes avec brio et pour cause. L’autrice est une maman de deux enfants et n’en est pas à son coup d’essai. Mangaka depuis 1998, elle fut découverte par sa nouvelle Voice. Depuis, elle a enchaîné les petites histoires jusqu’à sa série Un drôle de père. Cette dernière dura six ans, de 2005 à 2011, et fut même adaptée en série animée et en film live. Aujourd’hui, elle fait encore un véritable carton avec Une drôle de famille. Une série à découvrir absolument aux éditions Delcourt/Tonkam (Rumic World 1 or W, Fruits Basket) !

  • Une drôle de famille
  • Auteur : Yumi Unita
  • Editeur : Delcourt/Tonkam
  • Parution :  27 février 2019
  • Prix : 9.35 €
  • ISBN : 9782413017400

Résumé de l’album : Suivez le quotidien heureux mais pas toujours paisible de la famille Honda. Tarou et Chiharu, un jeune couple qui, avec leurs deux enfants Yuki et le petit frère Kotaro, forment une famille banale, avec ses joies mais aussi ses problèmes… De petites histoires courtes et souvent cocasses à travers lesquelles on observe Yuki et Kotaro grandir sous le regard inquiet et bienveillant de leur maman.

Caca room

Après Office & Humans et X-Mas Surprise, les éditions Misma accueille le nouvel album de Roope Eronen, Caca Room, un récit déjanté sur les déjections. Surprenant !

En s’enfilant son petit-déjeuner, un chien lit une annonce sérieuse sur le journal : « Recherche crotteur pour BD sérieuse. Poste à pourvoir début janvier ». Il décide de téléphoner et la personne au bout du fil lui demande d’envoyer un échantillon de son caca.

Quelques jours plus tard, il est reçu par William C, le producteur de la bande dessinée, en forme de toilettes. Trois candidats sont là pour passer des tests. Il est retenu.

Il rencontre alors le réalisateur de la série. Ensemble, ils partent en voiture pour commencer le tournage des séquences…

Disons-le tout net : Caca Room est surprenant, dingue et complétement fou ! Dans la même veine que ses précédents ouvrages, Roope Eronen aime déstabiliser ses lecteurs. Après une inversion intelligente de personnages jouant à un jeu de société dans Offices & Humans, il s’amuse avec des animaux autour d’un thème universel mais tabou : le caca. S’il en joue, il n’est jamais scato et rien que cela, c’est fort !

L’auteur finlandais né en 1982 imagine une histoire aussi attachante par ses personnages que drôle par les situations complètement saugrenues. Des chiens doués de parole et une producteur en forme de toilettes sont des héros pas si commun que cela.

Les petites saynètes s’enchaînent et le lecteur sourit sans se forcer. Le trait de Roope Eronen est faussement naïf et enfantin. Les couleurs aux feutres apportent une ambiance joyeuse et chaleureuse.

  • Caca Room
  • Auteur : Roope Eronen
  • Editeur : Misma
  • Parution : 12 avril 2019
  • Prix : 15€
  • ISBN : 978-2916254708

Résumé de l’éditeur : Ce matin, la rubrique Petites Annonces du journal affiche une drôle d’offre d’emploi : Recherche crotteur pour bd sérieuse. Poste à pourvoir à partir de janvier. Tél 047-67272 Et si c’était LE JOB qui allait changer sa vie, se demande notre héros-toutou ? Ni une, ni deux, il répond à l’annonce et envoie un échantillon de caca par la Poste. Sélectionné pour passer le casting, il réussit la toute dernière épreuve de papier toilette, et est finalement retenu pour le rôle. Et voilà notre toutou embarqué dans la voiture du dessinateur de la bd pour faire le repérage des décors et des plans qui serviront à la réalisation de la bande dessinée. Mais le plus gros du travail consistera à arriver à se retenir car il n’y aura qu’une seule prise pour la scène finale !

Les temps sont flous

Les éditions Delcourt dévoilent Les temps sont flous, un sympathique et très drôle recueil de strips de Terreur Graphique.

Depuis quelques années, Terreur Graphique publie chaque semaine une planche dans le supplément week-end du journal Libération. La collection Pataquès les regroupent dans le recueil Les temps sont flous.

L’auteur du Petit livre de la bande dessinée (avec Hervé Bourhis) dépeint avec malice (je n’ai pas dit vice), les travers de ses contemporains. C’est enlevé, c’est intelligent, parfois subtile et surtout très drôle. Il n’hésite pas à se moquer – avec délice et bienveillance – de toute la faune bigarrée des grandes villes. Parfois branchés, parfois à la marge, il les croque avec une certaine jouissance. Ils ont un avis sur tout, souvent définitif et c’est cela qui amuse Terreur Graphique.

Il décline ainsi des sujets « brûlants » de l’actualité : l’élection de Trump, les migrants, la Syrie, la circulation alternée, Je suis Charlie, la gauche, la droite, l’extrême-droite, la vapoteuse, le burn-out, la radicalisation, la disparition des moustiques, les funérailles des gens célèbres, la voyance, le conflit israélo-palestinien, Mai 68 ou la rentrée littéraire; qui dans la bouche de ces anonymes prennent un tour ridicule et absurde.

Dans les pas de Claire Bretécher ou René Pétillon, Terreur Graphique nous amuse avec une vision acérée de la société qui nous entoure. Encore un excellent album de l’auteur tourangeau !

  • Les temps sont flous
  • Auteur : Terreur Graphique
  • Editeur : Delcourt, collection Pataquès
  • Parution : 27 février 2019
  • Prix : 17.50€
  • ISBN : 9782413013297

Résumé de l’éditeur : Bobos, bobios, hipsters, metrosexuels, trans.cis.genres, vieille gauche et nouvelle droite, grands, gros, maigres, petits avec les oreilles décollées… Dans la lignée assumée et revendiquée de Brétecher, Lauzier, Wolinski ou Pétillon, Terreur s’amuse à dépeindre son époque à travers la vie et surtout les avis de la nouvelle faune urbaine.

Showtime

Un journaliste prend en stop trois individus. Une aventure surprenante s’engage entre eux dans Showtime de Antoine Cossé.

Un homme file dans sa Mercedes C220 sur le périph. Le voyage jusqu’à Ronin risque d’être très long puisqu’il devrait durer 14 h !

Plus tard, il s’engage sur une route secondaire. Il prend en stop trois hommes, trempés par la pluie. Leur voiture est tombée en panne alors qu’ils se rendaient à un rendez-vous d’entretien d’embauche. Le conducteur est journaliste et se rend dans la petite ville pour y interviewer un magicien…

Après La baie des mutins et La villa S. , Antoine Cossé revient avec Showtime, un récit surprenant. Construite comme un road-trip, sa bande dessinée est une étonnante histoire à la trame psychologique. Beaucoup de questions se posent autour de ses personnages et en premier lieu, le journaliste. Pourquoi réagit-il ainsi à chaque scène ? Les mystères sont nombreux.

A première vue, Showtime semble difficile d’accès. Pourtant, il ne faut pas s’arrêter aux premières pages (notamment le joli préambule avec un rat) et plonger dans ce récit où les relations humaines sont le cœur.

En choisissant l’univers de la magie, Antoine Cossé peut aussi naviguer dans l’irréel, dévoiler les secrets des tours  les plus connus et multiplier les fausses pistes.

Né en 1981, cet auteur français vivant actuellement à Londres apporte une touche de suspense par son dessin en noir et blanc prenant plusieurs formes.

  • Showtime
  • Auteur : Antoine Cossé
  • Editeur : Les requins marteaux
  • Parution : 15 mars 2019
  • Prix : 21€
  • ISBN : 9782849612477

Résumé de l’éditeur : « Vous atteindrez votre destination dans 14h. » annonce la voix laconique du GPS quand le journaliste le programme pour Ronin, où il doit rejoindre M. le Magicien. Alors qu’un déluge allonge son voyage, il prend en stop trois individus perdus et trempés sur le bord de la route. Eux aussi se rendent à Ronin pour la fête organisée pour l’annonce du grand retour du magicien. M. Le magicien… Qui est-il ? Qui est-il vraiment ? Un célèbre illusionniste disparu des écrans depuis plusieurs années ? Un mage aux pouvoirs surnaturels capable de faire s’envoler des navires ? Un homme étrange s’invitant dans vos rêves pour délivrer de mystérieux messages ? Ou un habile charmeur amateur de cartes et de conquêtes féminines ? Et si ce voyage en voiture sous la pluie était la clé de toutes ces énigmes ? Si M. le magicien n’apparaît que par le biais de la voix du héros, il transparaît comme un homme nébuleux aux multiples facettes qui sait pourtant manipuler son public et son image. Dans un récit ponctué de flashbacks à la Citizen Kane, le lecteur pensera souvent pouvoir dresser les contours de cet homme insaisissable. La parole du journaliste semble libérer le dessin de l’auteur qui imagine, lors de scènes grandioses, les tours de magie de M.

La cantoche 4

C’est avec délice que l’on retrouve les personnages de La cantoche dans ce quatrième opus, Faut pas gaspiller ! Encore un excellent recueil de gags de Nob !

Décidément Nob est l’un des meilleurs auteurs jeunesse de ces dernières années. Avec Mon ami Grompf, la merveilleuse Mamette et la drôlissime et moderne série Dad, son univers humoristique grand public est génial ! Pour le compléter depuis 2015, il imagine les gags de La cantoche, des mini-récits prépubliés dans J’aime Lire.

Il utilise avec une grande maîtrise narrative tous les codes de l’école et de la cantine. Pour ce quatrième tome, il pousse les murs et emmène même ses petits héros anonymes en dehors de ce lieu sacré d’instruction.

En quatre vignette sans cadre, Nob croque de petites saynètes drôles et inventives autour de la nourriture. Il y a aussi de la douceur, de l’optimisme et de la poésie dans ses planches.

Si vous ne connaissez pas encore La cantoche ni les autres formidables séries de cet auteur, précipitez-vous chez votre libraire. A coup sûr, vous ne serez pas déçu. Vous serez même charmé ! Nob, il a tout d’un grand !

  • La cantoche, tome 4 : Faut pas gaspiller !
  • Auteur : Nob
  • Editeur : BD Kids
  • Parution : 03 avril 2019
  • Prix : 9.95€
  • ISBN : 9791036304750

Résumé de l’éditeur : La cloche a sonné, c’est l’heure de la cantoche ! Tous les enfants se retrouvent pour une pause déjeuner bien méritée… qui peut vite partir en catastrophe ! Entre les batailles de nourriture, les disputes, les chutes et les réclamations auprès du cuisiner fan de légumes, l’ambiance n’est pas toujours rose. Mais heureusement, il y a aussi les copains, les fous rires et le steak-frites ! Et quand on n’y mange pas, on ne l’oublie pas pour autant… La cantoche, on en parle aussi ! Les gags s’enchaînent autour de cet univers délicieux (ou pas !)… Y’a du rab ?

Les mécanos

Deux petits mécanos sont missionnés par la Reine pour construire des bornes. Max Saladrigas imagine Les mécanos, un bel album de la collection Somnambule des éditions La joie de lire.

Timothée et Théotim sont deux petits mécanos qui adorent créer des inventions. Un jour, ils sont convoqués par la Reine qui leur confie la mission de « construire 5 bornes capables de capter l’énergie des 5 lunes pour alimenter toute la cité ». Sac sur le dos, ils arpentent le royaume pour ériger les capteurs. Mission facile ?

Décidément, on aime énormément la collection Somnambule ! Les titre publiés y souvent excellents ! Pour cette nouvelle histoire, Max Saladrigas propose un conte fantastique aux ressorts narratifs classiques et simples mais redoutablement efficaces.

Si la mission acceptée par Les mécanos semble d’une facilité déconcertante, les deux petits héros vont rapidement entrevoir une idée détestable de la Reine.

Seules quelques phrases parsèment l’album imaginé par l’auteur espagnol dont c’est la première publication en bande dessinée. On apprécie aussi la partie graphique très lisible, des dessins modernes et vivant. Max Saladrigas choisit un cadrage panoramique pour ses planches, préfigurant un dessin animé qui se déroulerait sous nos yeux. Les personnages gros nez tout en rondeur tranchent avec les formes plus géométriques des décors. On apprécie son très joli violet pour les scènes de nuit.

  • Les mécanos
  • Auteur : Max Saladrigas
  • Editeur : La joie de lire, collection Somnambule
  • Parution : 21 mars 2019
  • Prix : 10.90€
  • ISBN : 9782889084685

Résumé de l’éditeur :

Les Mécanos,
inventeurs en tout genre,
sont convoqués par la Reine
pour une importante mission…