Goat Mountain

Chasser pour devenir un homme tel est le cœur de Goat mountain ~ O Carol, signé Georges Van Linthout et adapté de David Vann aux éditions Philéas.

Tous les ans, c’est le même rituel, à l’ouverture de la chasse, à Goat Mountain, un jeune garçon accompagne son père, son grand père et un ami de la famille à la chasse aux cerfs. Mais cette année c’est différent, ce garçon de 10 ans va devenir un homme… Il va avoir le droit de chasser lui aussi. Mais quand les quatre hommes arrivent sur place, il y a un braconnier. Pour mieux le voir, le père donne à son fils, sa carabine… Au moment où le jeune homme l’a dans sa ligne de mire… il tire… L’homme tombe… Ce qui surprend le plus, c’est l’absence de réaction du jeune homme, il ne regrette pas, bien au contraire…

Goat mountain est l’adaptation du roman éponyme de David Vann sorti en 2013. Ce parcours initiatique, violent et animal, ramène aux instincts primitifs et pose la question, peut-on ne rien ressentir lorsque l’on tue une personne ? Voire même à 10 ans, peut-on en tirer une fierté ? Au lieu de partir de cet endroit après le meurtre, pendant plusieurs jours, la chasse continue avec une tension familiale poussée à son paroxysme.

Noir, à la limite du malaise et pourtant, malgré la violence et le sang, on ne peut pas lâcher ce Goat Mountain qui vous absorbe. Page après page, on encaisse, et on a envie de découvrir comment va se dérouler la fin du récit… Finalement je suis peut-être moi aussi un psychopathe…

  • Goat Moutain
  • Auteur : Georges van Linthout, d’après le roman de David Vann
  • Éditeur : Philéas
  • Prix : 19,90 €
  • Parution : 14 avril 2022
  • ISBN : 9782203228641

Résumé de l’éditeur : Automne 1978, nord de la Californie. C’est l’ouverture de la chasse sur les deux cent cinquante hectares du ranch de Goat Mountain où un garçon de onze ans, son père, son grand-père et un ami de la famille se retrouvent comme chaque année pour chasser. À leur arrivée, les quatre hommes aperçoivent au loin un braconnier qu’ils observent à travers la lunette de leur fusil. Le père invite son fils à tenir l’arme et à venir regarder. Et l’irréparable se produit. De cet instant figé découle l’éternité : les instincts primitifs se mesurent aux conséquences à vie, les croyances universelles se heurtent aux résonances des tragédies. Et le parcours initiatique du jeune garçon, abandonné à ses instincts sauvages, se poursuivra pendant plusieurs jours, entre chasse au gibier et chasse à l’homme.

Les lois du coeur

Lorsque le cœur d’un homme sauve celui d’un quasi condamné c’est l’histoire de Les lois du cœur de Julie Raptor  & Audrey Lainé  aux éditions Marabulles. Touchant !

Haute-Savoie, un dramatique accident de la route impliquant deux automobilistes et un motard entraîne, 48 heures plus tard, la mort d’Alex, conducteur d’un des véhicules. Peu après cet accident, à Paris, Charles se fait transplanter un nouveau cœur, suite à une attaque cardiaque survenue deux mois auparavant. Deux hommes, deux vies opposées, deux villes de plus de 500 km d’écart, mais un seul cœur, celui qui est passé d’Alex après sa mort à Charles. Une nouvelle vie pour ce cadre hyperactif, mais quelque chose de nouveau résonne en lui, comme si le cœur d’Alex avait transmis à Charles une partie de sa mémoire… Charles doit en avoir le cœur net…

Le don d’organe est au cœur de cette histoire (j’avoue elle est facile), mais ici l’autrice ne parle pas seulement de science, ou même de médecine, elle parle aussi d’amour, de transmission, de « mémoire cellulaire ». Et même s’il n’y a aucun élément scientifique qui vient appuyer cette théorie, on a envie d’y croire. Julie Raptor nous donne envie d’y croire… et j’avoue ça fait un bien fou. Pour accompagner cette très belle histoire, on retrouve le trait d’Audrey Lainé, dont je vous ai parlé il y a quelque jours, et c’est toujours immense un plaisir pour les pupilles. Je suis totalement sous le charme de son graphisme.

Le cœur a ses raisons que la médecine ignore, voilà comment je pourrais résumer ce récit qui a déclenché en moi d’immenses battements … de cœur !

À noter un dossier bien venu, en fin d’album nous parle de don d’organe.

  • Les lois du coeur
  • Scénariste : Audrey Lainé
  • Dessinatrice : Julie Raptor
  • Editeur : Marabulles
  • Prix : 19,96 €
  • Parution : 06 avril 2022
  • ISBN : 9782226453990

Résumé de l’éditeur : Élodie perd brutalement son mari et se raccroche tant bien que mal à la vie. Suite à une greffe cardiaque, Charles, homme d’affaires dans une multinationale sans âme, voit son existence transformée. Il tente de retrouver sa vie d’avant mais s’aperçoit qu’en récupérant le coeur d’un autre, il s’est aussi approprié ses émotions et sentiments.Entre Paris et Annecy, deux personnes que tout oppose se découvrent à travers un lien indicible et une étrange attirance, le souvenir d’un amour perdu et deux vies à reconstruire.

L’institutrice

L’institutrice, c’est l’histoire d’une enseignante prête à tout pour sauver Jacques, son élève juif. Yves Lavandier et Carole Maurel mettent en image ce très bel albums aux éditions Albin Michel.

Juin 1944, malgré le Débarquement, la traque des Juifs continue. Marie-Noëlle est institutrice et depuis toutes ces années, en dépit de l’occupation, elle prône la morale, le respect, l’égalité et la justice. Elle est libre et résistante dans l’âme. Pour sauver Jacques, le seul enfant juif de l’école, elle s’enfuit avec toute sa classe, poursuivie par la milice locale…

Une fois n’est pas coutume, je vais commencer par le graphisme car je suis totalement sous le charme (et ce n’est pas nouveau) du trait de Carole Maurel. Elle a notamment illustré Coming In, Nellie Bly, Écumes, Collaboration horizontale et bien d’autres encore. L’illustratrice sait parfaitement faire passer les émotions et nous montrer le caractère de ses personnages. Bref, c’est MAGNIFIQUE. Mais le graphisme ne suffit pas dans une bande dessinée. Pour moi, ce qui importe c’est l’équilibre, la réciprocité, il faut que le trait soit au service de l’histoire et l’histoire au service du trait et c’est le cas ici. Yves Lavandier nous brosse le portrait d’une institutrice, pas commode mais généreuse, qui fera tout ce qu’elle peut pour sauver cet enfant juif. L’histoire est d’une beauté simple et juste.

Ce premier tome de L’institutrice, sur deux prévus, est émouvant, sensible et fort. Il rend également hommage aux enseignants et ça fait du bien tant ce métier peut être « chahuté » aujourd’hui .

  • L’institutrice, tome 1
  • Scénariste : Yves Lavandier
  • Dessinatrice : Carole Maurel
  • Editeur : Michel Lafon
  • Prix : 16,90 €
  • Parution : 30 mars 2022
  • ISBN : 9782226453990

Résumé de l’éditeur : BRETAGNE, JUIN 1944. Malgré le Débarquement en Normandie, l’occupantet les miliciens locaux traquent encore et toujours juifs et résistants. Marie-Noëlle veut protéger ses élèves… tous ses élèves !Un récit au grand coeur, véritable hommage au corps enseignant, qui démontre que les forces et les faiblesses de chacun ne résident pas toujours là où on les attend.

Violence Action

Kei, 20 ans. Elle est étudiante en comptabilité, a une appartement sympa et un petit boulot : tueuse à gage.  Violence Action nous raconte son quotidien hors norme, un manga signé Shin Sawada et Renji Asai chez Pika Edition

Kei travaille pour le Service de Livraison Express de Jeunes Filles de Réconfort Fraîches et Naturelles. Une agence de tueuse de tueuse à gage déguisée en agence de Call-girl. Un coup de fil et elle réalise des missions à la demande. Parfois, ce sont des opérations de vengeance, d’autres des missions de protection.

Entre deux contrats, son objectif est d’obtenir son niveau 2 en comptabilité. Kei est une fille simple en apparence.  Le genre à manger une glace et ne pas remarquer qu’elle s’en est mis sur le coin de la joue. Elle est d’un naturel naïf et spontané qui cache bien son côté indépendant.

Le Service de Livraison Express de Jeunes Filles de Réconfort Fraîches et Naturelles est un petit job, Kei y est très bien intégrée. Pour elle, tuer est facile. Elle vit au jour le jour sans se poser de question, si bien qu’il n’y a pas de distinction entre sa vie de jeune étudiante en comptabilité et de tueuse à gage.

Mais son quotidien bien roué est un peu chamboulé lorsque son unique amie invite sans lui demander deux garçons chez elle. Deux garçons maladroits et un peu lourdauds. L’un d’eux est amoureux d’elle et pourrait bien lui mettre inconsciemment des bâtons dans les roues.

  • Violence Action
  • Oeuvre originale : Shin Sawada
  • Dessinateur : Renji Asai
  • Traducteur : Lilian Lebrun
  • Éditeur : Pika Edition
  • Prix : 8,20€
  • Parution : 18 mai 2022
  • ISBN : 9782811668211

Résumé de l’éditeur : Kei Kikuno est étudiante et comme beaucoup de ses camarades, elle subvient à ses besoins grâce à un petit boulot. Sauf que sa vie n’a pas grand-chose à voir avec celle des jeunes de son âge… Son job : tueuse à gages. La numéro 1 du milieu. Sous ses airs de fille un peu dans la lune, Kei est rapide, agile, surentraînée et honore toujours ses contrats, sans qu’on se méfie d’elle. Un jour, un homme singulier appelé “le doc” fait appel à ses services pour venger sa femme et sa fille assassinées par un clan de yakuzas…

Simone, tome 1

Le tome 1 de Simone, Obéir c’est trahir, désobéir c’est servir est un album de Jean-David Morvan, David Evrard et Walter, édité par Glénat.

1972, la deuxième chaîne montre un homme à la télévision, un des visages de la Gestapo et lance un appel à témoin. D’un seul coup, le sol s’écroule sous les jambes de Simone. Cet homme, c’est Klaus Barbie et elle le connaît… Il a été son tortionnaire à Lyon en 1944… Le passé de Simone – alors surnommée Simy – refait surface et avec elle, toute son histoire ainsi que l’Histoire de la Seconde guerre mondiale.

À l’heure où j’écris ces mots, je n’ai pas pu m’empêcher de faire un parallèle avec l’actualité. Les images que l’on retrouve des pages quinze à dix-neuf semblent tout droit sorties des journaux télévisés de 2022. Passé ce sentiment oppressant que l’Homme oublie trop vite l’Histoire du monde, je me plonge dans l’histoire de Simone et y découvre une jeune fille au grand cœur qui n’a jamais plié, malgré toutes les horreurs et les trahisons. Après la merveilleuse série Iréna (si vous ne l’avez pas lue, n’hésitez pas c’est une pépite !), Morvan, Evrard et Walter nous parlent une fois de plus d’une grande résistante qui s’oppose à toute répression. Pas de concessions dans cette série et pourtant, elle sera accessible comme pour Iréna à partir du collège en lecture accompagnée.

Un devoir de mémoire et un très bon outil pédagogique, cet album est une véritable réussite à la hauteur d’Iréna. J’ai hâte de lire la suite de cette série prévue en trois tomes (Iréna l’était aussi à l’origine).
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Après Iréna (Glénat) , Madeleine (Dupuis), Jean-David Morvan met, une fois de plus, une femme à l’honneur et c’est pour moi un véritable bonheur de découvrir toutes ces femmes qui ont fait notre passé et donc, notre présent.

  • Simone, tome 1 : Obéir c’est trahir, désobéir c’est servir
  • Scénariste : Jean-David Morvan
  • Dessinateur : David Evrard
  • Coloriste : Walter
  • Editeur : Glénat
  • Prix : 12,50 €
  • Parution : 08 avril 2022
  • ISBN : 9791034757473

Résumé de l’éditeur : Le destin hors du commun d’une résistante. En 1972, la télévision affiche le portrait d’un vieil homme, recherché depuis la fin de la guerre : Klaus Barbie. En le voyant, Simone Lagrange, 42 ans, est d’abord interloquée, avant de voir ressurgir un douloureux passé. Cet homme, elle le reconnait. Ce vieil homme est son tortionnaire, celui qui l’a torturée, à Lyon, à partir du 6 juin 1944… Elle se souvient de la jeune fille qu’elle était, du basculement de la France vers le régime de Vichy, avant que la zone libre ne soit occupée. Elle se souvient de ses années de résistance, en tant qu’agent de liaison. Simone s’appelle alors Simy Kadosche, elle est juive et sait que sa vie et celles de ses proches sont en danger. La délation était monnaie-courante mais personne ne pouvait s’attendre à ce qu’ils soient dénoncés par quelqu’un de si proche. C’est là, au siège de la gestapo, qu’elle a croisé la route du chef de la section V : Le boucher de Lyon, Klaus Barbie. Triptyque historique qui revient sur l’histoire d’une résistante française, déporté à Birkenau d’où elle reviendra après un parcours hallucinant, autant que sur le déroulement du procès historique de Barbie dont elle fût l’un des témoins clé. Simone raconte le parcours d’une femme dotée d’une volonté d’acier mais aussi de résilience. Un biopic bouleversant, qui sait décrire l’indicible à travers un langage visuel subtil – confirmant le talent des auteurs d’Irena – pour nous apprendre et nous émouvoir avec un coeur énorme.

Nous étions trois

On ne sait jamais quand on débute une lecture, à quel point celle-ci va pouvoir nous bouleverser. Cela arrive de temps en temps alors qu’on ne s’y attend pas. Son titre, Nous étions trois, de Naomi Reboul, publié par La Boîte à bulles est en lecture gratuite sur le site de l’éditeur

Un imparfait utilisé dans le titre qui ne peut qu’augurer une situation qui fut…

Une rencontre, deux femmes, un amour naissant :

Comment, quand on s’aime, ne pas vouloir concrétiser cet amour par la venue d’un enfant ?
Alors Naomi et Marie prennent la direction de la Belgique, pour elles ce rêve prendra forme grâce à la PMA.

Deux femmes, un bébé, une famille :

Comment ne pas fondre devant cette nouvelle famille et le bonheur de Naomi et Marie accueillant leur petite Coline ?
La petite fille a deux mamans, prêtes à lui donner tout l’amour dont elle a besoin.

Deux femmes, une petite fille, une vie heureuse :

Comment ne pas être émus devant cette enfant qui grandit dans un cocon familial ?
Grands-parents, oncles et tantes, amis sont présents pour assister à ce qui ressemble à du bonheur.

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Deux femmes, une séparation, une petite fille :

Comment ne pas comprendre les dires de Marie quand elle évoque sa séparation d’avec Naomi ?
Coline pourra continuer à voir la famille de Naomi, qu’elle appelle d’ailleurs tout naturellement Nana ou Maman.

Une femme, une femme, une petite fille :

Comment ne pas être admiratifs devant ces couples qui réussissent leur séparation ?
En effet, quoi de mieux pour un enfant que de continuer à vivre, malgré les changements, dans deux univers où respect et partage sont la base.

Une femme, une petite fille, une disparition :

Comment imaginer un jour être privée de son enfant ?
C’est ce que vit Naomi Reboul depuis le 6 novembre 2021, quand Marie a décidé de modifier le mode de garde convenu entre les deux femmes.

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Une femme, un album, des témoignages :

Comment ne pas être touché par Nous étions trois ?
Naomi Reboul réussit à nous parler de sa douleur, sans jamais être jamais larmoyante. Les témoignages sont sobres, sans être négatifs à l’encontre de l’autre maman.
Subsiste juste l’incompréhension face à cette terrible situation où le manque ronge la vie.

L’autrice d’Iris deux fois a accompagné les paroles de ses proches par des dessins en noir et blanc, empreints d’une telle tendresse et de tant d’amour.

Un coup de cœur doit tout simplement ressembler à cela

  • Nous étions trois
  • Autrice : Naomi Reboul
  • Editeur : La Boîte à bulles
  • Parution : 19 avril 2022
  • Prix : en lecture gratuite jusqu’au 19 juin 2022 sur https://www.la-boite-a-bulles.com/book/806
  • ISBN : 9782849537145

Résumé de l’éditeur : En 2018, désirant un enfant, Naomi et sa compagne Marie ont recours à la PMA. Marie portera l’enfant. Neuf mois plus tard, Coline verra le jour.

À mesure que la petite fille fait ses premiers pas dans le monde, Naomi découvre les joies d’être maman. Quelques années plus tard cependant, elle et Marie se séparent. Malgré tout, les deux femmes entretiennent des rapports cordiaux et partagent la garde de Coline.
L’attitude de Marie à l’égard de son ex-compagne va pourtant changer : le temps que Naomi passe avec Coline ne dépend plus que de son bon vouloir à elle, la mère biologique. Enfin, la décision est prise : Marie veut repenser les modalités de la garde.
S’il est alors de plus en plus difficile pour Naomi de voir sa fille, cela lui sera bientôt impossible. Sans même l’avoir concertée, Marie a radié Coline de l’école et déménagé… Le tout en l’espace de quelques jours.
Aujourd’hui, Marie vit à 250 kilomètres.
Depuis le mois de novembre 2021, Naomi est sans nouvelle de sa fille…
Par l’intermédiaire d’extraits d’attestation de témoins, Naomi Reboul livre un témoignage glaçant, le cri du cœur d’une mère face à l’insoutenable : l’amour d’un enfant refusé, une parentalité bafouée…

Les Pionniers

Les cinémas Pathé Gaumont, un nom de salles de cinémas présente partout en France. Mais à l’origine, à la fin du 19e siècle, ces deux patronymes étaient bien loin d’être accolés. En effet, Louis Gaumont et Charles Pathé étaient des ennemis. Leur champ de bataille, le cinéma. Ou plus exactement ce qui allait devenir le cinéma. Avec Les Pionniers édité chez Rue de Sèvres, Guillaume Dorison, Damien Maric au scénario et Jean-Baptiste Hostache  au dessin, reviennent dans ce premier tome, sur les origines de cette incroyable invention.

Une course à l’inventivité

Dans les années 1890, il est au départ question de phonographe, une machine qui permet d’écouter de la musique comme à l’Opéra. Alors que certains se penchent sur le développement du son, comme Charles Pathé qui a décidé de vendre ces machines, d’autres comme Louis Gaumont veulent miser sur la photographie.

Mais en quelques années de nouvelles inventions vont révolutionner cette fin de siècle. Le phonoscope, le bioscope, le kinétoscope, le cinématographe, les inventeurs tels que les frères Lumière ou Thomas Edison font évoluer la technique de l’image qui bouge, avec l’arrivée des pellicules souples.

Des techniques révolutionnaires

Si les appareils pour filmer et projeter se perfectionnent en continu, il faut prévoir les projections à grande échelle. C’est ainsi que Pathé monte en 1895 un réseau de distribution dans les foires, qui sera concurrencé cinq ans plus tard par la construction de la première salle de cinéma à Paris, le Gaumont Palace.

La production de film s’accroît elle-aussi avec l’apparition de studios de cinéma, organisant des tournages sur lesquels il y aura des figurants. Des réalisateurs comme Alice Guy se lancent dans la création de films d’envergure. Terminé le film avec caméra fixe des Frères Lumière filmant l’entrée du train dans la gare La Ciotat.

Un ouvrage complet

Une bible, voilà ce qu’est ce tome 1 de “Les Pionniers”. Tout ce que vous voulez savoir sur les origines du cinéma se trouve dans ce très intéressant album. Couvrant les années 1894 à 1907, il met en lumière (facile !) tous les acteurs, ainsi que leurs découvertes, qui ont chamboulé à tout jamais le monde de l’image.

Un incroyable travail de recherche et visuel, le tout projeté dans un très bel objet livre.

  • Les Pionniers tome 1 La machine du diable
  • Scénariste : Guillaume Dorison
  • Scénariste : Damien Maric
  • Dessinateur : Jean-Baptiste Hostache
  • Editeur : Rue de Sèvres
  • Parution : 20 mars 2022
  • Prix : 25 €
  • ISBN : 9782810212705

Résumé de l’éditeur : 1894. Paris est au centre du monde. Artistes, inventeurs et industriels se fréquentent dans une grande fièvre. La technique est au centre de toutes les préoccupations. Les arts, comme l’économie ou les sciences, se rationalisent. Le monde entier semble en passe d’être mécanisé… Six personnes détiennent le même secret. Une invention démoniaque dont ils cherchent à comprendre le sens et maîtriser la puissance. Ils sont ingénieur, fils de boucher, magicien, forain ou jeune secrétaire-sténographe. Ils sont jeunes, rêveurs, ambitieux et vont devoir se démarquer. Ils se nomment Léon Gaumont, Charles Pathé, Georges Méliès, Louis et Auguste Lumière ou Alice Guy. Et leur enjeu s’appelle le Cinéma.

Moon

Avec son album Moon, publié chez Rue de Sèvres, Cyrille Pomès nous fait entrer dans un univers qui vit au rythme des saisons. Celui d’un bord de mer où des adolescents sont accrochés aux réseaux sociaux.

Une ville en bord de mer

Le bord de mer, un bonheur qui n’est pas donné à tous de vivre au quotidien.

Bien sûr parfois il faut laisser ceux qui y vaquent, se l’approprier provisoirement. Puis vient le temps de le récupérer, pour en profiter sereinement, en attendant à nouveau de le prêter.

Oui c’est vrai que nous sommes une sorte de royaume de L’Atlantide, qui disparaîtrait au gré des vacances et des vacanciers.

Un rythme au gré des vacances

Mais la ville de bord de mer vit à l’année. Il suffit de regarder les endroits stratégiques comme l’abribus où se retrouvent, pour fumer la nuit tombée, Mel et la jolie Luna.

Autre point de rencontre, devant la boulangerie, une fois le rideau fermé pour Loïc le bad boy et ses potes.

Le point commun de tous ces adolescents, le téléphone. Et passer des heures sur Snoop pour regarder les photos et vidéos postées par les uns et les autres.

Tous, non, il y a Cosmos. Son père lui interdit l’accès à ce précieux sésame. Lui a perdu sa mère et son habitude, c’est d’aller ramasser les canards en plastique jaune échoués sur la plage.

Un univers bouleversé

Quand la rentrée arrive, tous se retrouvent et le quotidien reprend le dessus, rythmé par les likes, les followers et les émojis, même au fin fond du collège, c’est-à-dire les toilettes !

Alors quand un orage éclate et que le réseau disparaît, les ados ne s’en “balèkent” plus, mais plus du tout. D’autant plus que les réparations de l’antenne-relais vont prendre plus de temps que prévu.

Comment survivre alors dans un désert numérique quand on a perdu son GPS ? Les cartes sont rebattues. Quels sont ceux qui vont réussir à s’en sortir et à s’adapter dans un monde sans internet ?

Une vie sans connexion

C’est à une plongée dans une quatrième dimension à laquelle nous assistons avec Moon.
Cyrille Pomès a imaginé un retour en arrière pour une génération d’adolescents hyperconnectés, qui vont devoir vivre sans téléphone et surtout réinventer leur quotidien.

Des relations vont se dénouer et d’autres se nouer, une fois que l’écran n’est plus là.
Les masques tombent et la réalité apparaît, je dirais, enfin !

Moon, une jolie parenthèse de vie où les sentiments naissants et la poésie ont la part belle et où la réalité reprend le dessus, provisoirement, sur la virtualité.

Podcast disponible sur le site de Rue de Sèvres : Cyrille Pomès, débrancher les ados pour les connecter

  • Moon
  • Auteur : Cyrille Pomès
  • Éditeur : Rue de Sèvres
  • Prix : 18,00 €
  • Parution : 23 mars 2022
  • ISBN : 9782810214228

Résumé de l’éditeur :  En bord de Méditerranée, lorsque les vacances sont terminées, les estivants désertent les plages et hors-saison, chacun tue le temps comme il peut en attendant le mois de juillet. C’est au coeur de ce quotidien où l’ennui n’est jamais loin que vivent Gabriel, surnommé Cosmos car il semble venir d’une autre galaxie, et Luna, fille populaire, redoutée et admirée sur les réseaux sociaux. Le jour où la foudre s’abat sur l’antenne-relais de la station balnéaire : Internet, téléphones et réseaux sociaux sont coupés et le blues s’abat définitivement sur la petite bande à laquelle ils appartiennent. Obligés de faire bouger les lignes qui régissaient jusqu’ici la cour du collège, ils vont apprendre dans ces conditions à réinventer leur quotidien 2.0. Un récit d’une grande justesse et aux dialogues percutants sur l’adolescence, ou comment faire face à l’autre, dans le jeu du paraître et le besoin de lien social.

Bagnard de guerre

Vous connaissez déjà Ferdinand Tirancourt, c’est normal. Il était le héros, voire même l’anti-héros, de l’album Pinard de guerre écrit par Philippe Pelaez (scénario) et Francis Porcel (dessins et couleurs) édité chez Grand Angle

Après avoir fait des siennes dans les tranchées pendant la Grande Guerre, avec un trafic pour le moins illicite, Ferdinand se voit maintenant dans l’obligation de payer l’addition. Et parfois, celle-ci peut se révéler élevée. Alors la sanction lui est proportionnelle. Pour l’ancien opportuniste et profiteur, ce sera le bagne en Guyane.

Une peine à purger

Vous n’avez pas lu Pinard de guerre, aucun soucis, vous pouvez parfaitement lire Bagnard de guerre. Les deux albums, bien que liés par un même personnage, sont deux histoires complètes et indépendantes. Dès les premières pages de ce deuxième album, le ton est donné. Le récit commence à bord du navire-prison qui quitte St Martin de Ré, surnommé à l’époque « l’antichambre du bagne ». Les hommes, qui viennent d’embarquer, sont tous des prisonniers condamnés à de lourdes peines. Ils partent pour une destination dont la plupart ne reviendront pas. Certains même n’arriveront pas à Cayenne, une bagarre à bord est si vite arrivée. C’est ce qui arrive à Ferdinand, qui dès le début doit se battre pour défendre le modeste pécule qu’il a en lui.

Un lieu hostile

C’est alors que Ferdinand se lie avec le jeune David, un violoniste juif sans défense, condamné injustement et lui offre sa protection. En effet, très rapidement les nouveaux arrivants réalisent dans quelle galère ils sont tombés. Et le terme galère est très approprié, puisque les prisonniers avant l’ouverture des bagnes, étaient condamnés aux galères.

Le bagne est un endroit où les condamnés sont répartis en fonction des travaux à effectuer, mais également en fonction de la lourdeur de leur peine. Si l’enfer se trouve à Cayenne, où les gardiens se comportent comme des sadiques et où les rations alimentaires nauséabondes sont calculées pour assurer la survie, l’enfer de l’enfer se situe à Charvein. Surnommé également le camp de la mort, c’est un lieu où les pires forçats étaient envoyés et dont on ne revenait pas, ou alors atteint par la folie.

Mais étrangement, alors que Ferdinand y est envoyé, sans aucun motif grave, il n’y restera que quelques jours. Quelle est donc l’explication de ce soudain retour en grâce ?

Un album réaliste

Bagnard de guerre décrit parfaitement ce que fut l’univers carcéral outre-Atlantique jusqu’en 1946, date de sa fermeture, alors que la loi fut votée en 1938 ! Les derniers bagnards qui effectueront la fin de leur peine, rentreront même en 1953. Les prisonniers, qui étaient condamnés à une peine de plus de huit ans, ne pouvait plus revenir en Métropole. Ils devaient rester sur place. C’est ainsi que la Guyane française a aussi été peuplée.

Les auteurs nous montrent parfaitement bien la réalité de ce qu’était le bagne. Une prison à ciel ouvert où la maltraitance et le travail, 80 heures par semaine, côtoyaient la maladie. Cela ne laissait que très peu de chances aux hommes de s’en sortir.

En dépit de son comportement dans Pinard de guerre, Ferdinand apparaît dans cet album sous un jour plus humain. Comment l’horreur des hommes et des lieux peut-elle avoir un tel effet rédempteur ?

Bagnard de guerre est un album dur à l’image du bagne. Les auteurs Philippe Pelaez  et Francis Porcel (le duo de Dans mon village, on mangeait des chats) ont parfaitement retranscrit cette dureté à travers ce récit et ces images, où la violence est omniprésente.

Mais parfois au milieu de la noirceur peut exister un soupçon d’humanité et de reconnaissance.

  • Bagnard de guerre
  • Scénariste : Philippe Pelaez
  • Dessinatrice : Francis Porcel
  • Éditeur : Grand Angle
  • Prix : 14,90 €
  • Parution : 30 Mars 2022
  • ISBN : 9782818980088

Résumé de l’éditeur : « On ne mourait pas au bagne, on y agonisait indéfiniment ». Après ses déboires dans les tranchées, Ferdinand Tirancourt se retrouve au bagne de Cayenne pour y purger une peine qui, comme celle des autres insoumis dont il va partager le quotidien, sera longue et définitive. Envoyé au terrible camp forestier de Charvein, réservé aux fortes têtes, il est pris en grippe par un surveillant qui prend un plaisir pervers à le harceler. Pourtant, ce n’est pas ce qui inquiète le plus Ferdinand ; c’est cet autre prisonnier, étrange et silencieux, qui semble épier le moindre de ses gestes.

Cet amour

Après deux premiers albums Ted et Salade de nouilles publiés chez L’atelier du poisson soluble, Valentine Safatly revient avec un récit plus intime Cet amour édité par La boîte à bulles. Une plongée dans une relation amoureuse qui, à aucun moment, ne pourra vous laisser indifférents.

 

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D’une relation amoureuse

Cet amour, pourquoi l’utilisation de ce pronom démonstratif pour désigner un amour ? Pourquoi pas un amour, l’amour ou même mon amour ? Pourquoi tant de distance vis-à-vis du plus beau des sentiments.

La distance est donc bien là avec cet amour. Ce fut un amour, mais il n’est plus.

Pour Valentine, il a d’abord été l’amour. Une rencontre, un appel et elle est accro. Une rencontre avec ses enfants, une installation chez lui et elle est sa fée.

Sa vie à lui devient sa vie à elle. Elle est amoureuse, peu importe ce qu’il propose, tout lui convient.

À une relation toxique

Mais rapidement Valentine s’oublie, fait en fonction de lui, en fonction de ce qu’il aime, en fonction de ce qu’il veut.
Elle fait le vide de ce qu’elle possède et elle fait le vide de ce qu’elle est. Elle devient de plus en plus invisible.

Alors Valentine disparaît dans un gouffre, elle ne va pas bien. Elle qui voudrait tant exister pour lui et pour lui montrer combien elle l’aime. Elle s’excuse pour qu’il s’aperçoive qu’elle est là, peu importe ce qu’il lui dit. Peu importe ce qu’il lui fait.

Ce que Valentine pense être de l’amour pour cet homme n’en est pas. En réalité, c’est une dépendance affective, un déséquilibre entre les sentiments de l’un et ceux de l’autre.
C’est progressif, c’est insidieux, mais quand on s’en rend compte, il est trop tard.
L’amour peut avoir le même effet de dépendance qu’une drogue. Il faut parfois toucher le fond pour réagir et avoir le courage de décrocher.

Cet Amour

Un récit pour mieux comprendre

Avec Cet amour, Valentine Safatly nous décrit parfaitement bien ce mécanisme. Le ton est juste, le ton est vrai. Il nous fait passer par tous les sentiments depuis la joie de la rencontre jusqu’à l’horreur de la fin d’une histoire.

La simplicité et la sobriété du trait au crayon gris soulignent parfaitement la palette d’émotions par lesquelles Valentine va passer et cela sans artifices, au plus juste.

Le choix d’un album d’un petit format avec une couverture toilée, nous donnerait presque l’impression d’entrer directement dans les pages d’un carnet intime rédigé par l’autrice. Comme une marque de confiance qu’elle nous ferait, en nous laissant y accéder.

Une vérité dans les mots, une véracité dans les dessins, une mise à nue indispensable pour dire, pour comprendre, pour réagir et surtout pour enfin essayer de reprendre goût à une véritable vie.

Merci Valentine Safatly pour la pudeur qui accompagne ce témoignage, elle lui sied à merveille.

  • Cet amour
  • Autrice : Valentine Safatly
  • Éditeur : La boîte à bulles
  • Prix : 16,00 €
  • Parution : 09 Mars 2022

Résumé de l’éditeur :  « Pour évoquer l’amour toxique qu’elle a vécu, sa dépendance piégeuse à l’autre, Valentine Safatly n’a pas eu envie de recourir aux cris, lamentations, invectives. Elle a préféré parler d’amour – car ce fut avant tout un amour extrêmement puissant. Tombée sous le charme d’un homme de seize ans son aîné, Valentine s’enfonce dans une idylle passionnelle qui va la transformer. Tiraillée entre les études et sa nouvelle vie de famille, elle prend peu à peu ses distances avec ses amies, puis ses passions, et ceci jusqu’à se perdre elle-même. Une saynète après l’autre, Valentine Safatly nous immerge dans cette passion qui l’a étreinte et comprimée jusqu’à l’étouffement. Cet amour nous parle de sentiments avec délicatesse, par petites touches, comme une toile pointilliste. Son dessin minimaliste implante une ambiance douce-amère bouleversante, ponctuée de doux moments de poésie. Une oeuvre profondément sensorielle, à la lecture poignante ! »

Virginia Woolf

Avec Virginia Woolf,  son album traduit de l’italien et édité chez Des Ronds dans l’O, Liuba Gabriele nous permet de découvrir qui était la femme qui se cachait derrière la femme de lettres, une des grandes figures littéraires du 20e siècle.

Une femme à découvrir

Dès les premières pages de cet album, comment ne pas être marqués par le mouvement, l’ondulation des traits, un film est littéralement en train de se dérouler sous nos yeux. Nous sommes en 1941, une femme se promène dans la campagne anglaise. Elle se trouve en bordure d’une rivière. Ce seront ses derniers pas. Cette femme c’est Adeline Virginia Alexandra Stephen (1882-1941), plus connue sous le nom de Virginia Woolf ( (1882-1941).

Rapidement viennent à notre regard les couleurs utilisées. Dans cette période des années 1920, on s’attend plutôt à découvrir un album en sépia.

C’est le total contre pied qu’a pris Liuba Gabriele, l’autrice italienne de ce roman graphique.
Retour en 1922, c’est lors d’une réunion au Bloomsbury group auquel elle appartient, ainsi que son époux Leonard, que Virginia rencontre la poétesse Vita Sackville-West (1892-1962).

Même si ce n’est pas le coup de foudre immédiat entre elles-deux, l’amour enflammé sera bien au rendez-vous deux ans plus tard.

Une femme perdue

C’est à la première personne du singulier que l’autrice a choisi d’écrire cet album, ce qui nous procure l’étrange sentiment d’entrer dans la tête et dans la correspondance de ces deux femmes.
Nous sommes à côté d’elles quand elles se parlent et se regardent, quand elles s’écrivent et se lisent, quand leurs peaux se rapprochent et s’aiment.

Les vagues, l’onde, l’eau… Pendant toute sa vie, Virginia sera submergée par cet élément liquide. Une vague de disparition dans sa famille la laisse avec un vague à l’âme. L’onde de choc de la seconde guerre mondiale lui fait douter de l’existence d’un monde meilleur.

L’eau devient alors, pour elle, le seul endroit pour accueillir son mal être.

Un album lumineux

Et c’est avec ses crayons de couleur aux teintes vives et de manière émouvante que Liuba Gabriele donne vie mais également éteint la vie de cette écrivaine féministe. Elle qui aura marqué son siècle avec Mrs Dalloway (1925), La Promenade au phare (1927), Orlando (1928) et Les Vagues (1931)…

Un magnifique album pour remettre à flots une existence riche intellectuellement mais noyée par les émotions et la peur de finir folle.

  • Virginia Woolf
  • Autrice : Liuba Gabriele
  • Éditeur : Des Ronds dans l’O
  • Prix : 20,00 €
  • Parution : 02 Mars 2022

Résumé de l’éditeur : « Cette biographie commence le jour de la mort de Virginia . Elle marche seule, le long de la rivière. Dès les premières cases, on est subjugué par le personnage. Le dessin et les couleurs de Liuba Gabriele, suggèrent l’intensité et la profondeur des réflexions de l’écrivaine et le texte nous entraîne dans ses romans, œuvre fondamentale qui a fait de Virginia Woolf, une des écrivaines les plus marquantes de son époque et qui reste aujourd’hui, une œuvre fondatrice. Liuba Gabriele est une jeune artiste italienne, diplômée de l’Académie des Beaux-Arts de Brera . Elle utilise des couleurs intenses et le choix d’une écriture poétique rend un vibrant hommage à Virginia Woolf… La vie de l’écrivaine est retracée à travers ses propos et des personnes qui ont traversé sa vie, sa sœur Vanessa et le cercle de Bloosmbury, son mari Leonard et son amante et amie Vita Sackville-West. »

Rocking chair

Quand un objet devient le principal protagoniste d’un récit ! Il fallait oser. Alain Kokor et Jean-Philippe Peyraud l’ont fait avec Rocking chair, leur nouvel album paru chez Futuropolis.

Un objet emblématique

Cet objet, c’est donc bien un meuble, un rocking chair. Selon la légende, il aurait même été inventé par Benjamin Franklin, ce qui est en réalité faux. Apporté depuis l’Europe par de nombreux colons, il est devenu le meuble emblématique du continent nord-américain, qu’on retrouve dans tout intérieur, ou presque.

Milieu du 19e siècle, Kees et Daatje arrivent d’Europe avec leurs familles respectives. Ils font partie d’un convoi de chariots guidé par l’étrange Bronson. Leur vie entière, matérialisée par des objets provenant de leur pays natal, se trouve dans cette caravane. Alors quand le convoi est attaqué par deux complices de Bronson, c’est le carnage. Plus aucun survivant, exceptés les deux adolescents. Dorénavant, leur but sera de rejoindre l’Ouest, en se greffant à un nouveau convoi. Kees décide donc d’emporter avec lui le seul souvenir qu’il lui reste de sa mère, ce rocking chair, cadeau de mariage fabriqué par son grand-père.

Un objet transitionnel

Mais la Conquête de l’Ouest n’est ni un long fleuve tranquille, ni une morne plaine. Les deux jeunes gens vont devoir affronter la rudesse de ce pays encore à défricher, subir des conditions météorologiques diluviennes et apprendre à faire des choix pour avancer. Un rocking chair, dans de pareilles conditions, ne fait plus partie de l’essentiel.

Jean-Philippe Peyraud et Alain Kokor, avec ce récit, nous permettent de suivre toute une palette de personnages à travers un objet. C’est lui qui fait la transition entre les différentes histoires qui vont s’échelonner sur une quinzaine d’années. Des personnages aussi variés les uns que les autres, des lieux différents, des situations difficiles, cet album est un véritable état des lieux de la société américaine et de son mode de vie.

Un objet protagoniste d’un récit

Le scénario de Jean-Philippe Peyraud est intelligent et original. Il permet à un objet de nous faire voyager dans le temps et dans l’espace. Malgré les vicissitudes de cette période, l’objet résiste, devient fil conducteur. Et même s’il ne tient plus qu’à un fil, ou plutôt que par un clou, ce rocking chair tient parfaitement son rôle d’objet transitionnel, entre le monde de l’adolescence et celui des adultes.

Les dessins d’Alain Kokor sont réalisés avec des traits incisifs dans des teintes où la rudesse de la vie transparaît sur fond de magnifiques grands espaces.

Un album qui permet de se rendre compte que les objets, eux-aussi, peuvent avoir un passé, une mémoire et rassembler ceux qui y sont attachés.

  • Rocking chair
  • Scénariste : Jean-Philippe Peyraud
  • Dessinateur : Alain Kokor
  • Éditeur : Futuropolis
  • Prix : 22,00 €
  • Parution : 12 Janvier 2022

Résumé de l’éditeur : « Venus d’Europe avec leurs familles, les deux adolescents Kees et Daatje voient leurs proches massacrés par les guides qui les accompagnaient à travers l’ouest sauvage. Les deux orphelins survivants n’ont plus pour eux qu’un chariot de la caravane, quelques vivres et un rocking chair, qu’ils vont devoir abandonner en route avant que leurs chemins se séparent. Le fauteuil va alors passer de main en main : trappeur, indien, cowboy naïf, prostituée, commerçant douteux, et même un ours… Autant de destins meurtris. Et un fauteuil de plus en plus brisé. Pourtant, il finira par revenir à Kees. En le récupérant, les souvenirs remontent à la surface et Kees va éprouver le besoin de retrouver Daatje, malgré toutes ces années passées. Un western atypique qui fait d’un rocking chair le symbole de la conquête de l’ouest! Et contrairement à ce que son titre laisse entendre, il est loin d’être de tout repos. Pour leur premier livre en commun, Jean-Philippe Peyraud et Kokor prennent le pari audacieux de transposer dans un western tout le charme de leurs récits contemporains! »